Joaquín Sorolla y Bastida
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre espagnol (Valence 1863 – Cercedilla, prov. de Madrid, 1923).
Issu d'une famille d'artisans valenciens, orphelin dès l'enfance, élevé par un oncle forgeron, qui l'employait le jour et lui laissait les soirées pour suivre des cours, notamment à l'Académie des Beaux-Arts, il révéla ses dons très jeune. Dès 1884, il obtenait une médaille à l'Exposition nationale de Madrid avec son Dos de Mayo a Valencia (Villanneva y Geetŕıs musée Balaguer), tableau d'histoire dans le goût de l'époque, mais peint en plein air, et, l'année suivante, une œuvre de même genre (Soulèvement de Valence contre Napoléon) lui valait un séjour à Rome, qui n'eut aucune influence sur son art. En revanche, Paris allait lui révéler en 1885 à la fois le réalisme de Bastien Lepage et la technique des impressionnistes, sans qu'il eût été en rapports personnels avec eux. De retour en Espagne, installé à Madrid, il éclaircit sa palette ; à Valence, où il se rend fréquemment, il est attiré à la fois par la lumière du paysage et par la vie des pêcheurs ; il se met à peindre les paysages ensoleillés du Levant espagnol. Entre 1890 et 1900, il se partage entre Madrid et Valence : il atteint la plénitude de son art, se dégageant graduellement d'un certain naturalisme anecdotique et humanitaire (Et ils disent que le poisson est cher, 1895, Caśon) et adoptant pour des sujets " intemporels " — plages méditerranéennes, jeux d'enfants nus, pêcheurs valenciens (Retour de pêche, 1892 ; Bœufs tirant une barque, Paris, musée d'Orsay) — une manière de plus en plus lumineuse et abrégée. Exposant fréquemment en Espagne, en France, en Allemagne et aux États-Unis, il collectionne les médailles et triomphe à l'Exposition universelle de Paris en 1900 : Monet parle avec éloges de son art joyeux et coloré. Dans les années 1910, son œuvre devient plus lumineuse, sa manière plus brusque (Enfants sur la plage, 1910, Casón, Madrid ; Baie de Valence le matin, 1908, Hispanic Society of America à New York.
Ce succès se confirme avec une exposition de ses œuvres aux Craffton Galleries de Londres (1908) puis en 1909 à la toute nouvelle Hispanic Society de New York. Le fondateur, Archer Huntington lui commande en 1911 le décor d'une salle spécialement conçue à cet effet sur le thème des Costumes et Fêtes des Provinces d'Espagne, l'un de ses centres d'intérêts. 14 grandes toiles, lumineuses, joyeuses, sont le brillant point d'orgue du " costumbrisme " espagnol (1911-1919) [esquisses au musée Sorolla à Madrid]. Il réalisa également, pour la bibliothèque d'Huntington, fortement influencé par la génération de 98, 47 portraits d'intellectuels espagnols (Ortega y Gasset, Pardo Bazén...). Son art du portrait peut d'ailleurs traduire un Sorolla plus intime, portraitiste parfois sobre et pénétrant de ses familiers (D'Antonio Garcia, son beau-père ; le Docteur Gonzalez, musée de Valence), de ses filles (Maria convalescente, Valencienne à cheval, Valence, musée des Beaux-Arts), des écrivains, artistes en vogue au début du xxe s. (le peintre Aureliano de Beruete, les actrices Maria Guerrero, Prado ; Lucrecia Araña, musée de Valence). Certains tableaux de ses dernières années, où Ségovie et Burgos voisinent avec Grenade et Ibiza, surprennent par des architectures simplifiées, une matière épaisse, des harmonies éclatantes et larges. Le peintre légua à l'État espagnol sa maison et son atelier de Madrid, devenus aujourd'hui le musée Sorolla. Le Prado, le musée de Valence, de nombreux musées provinciaux et, surtout, l'Hispanic Society of America de New York abritent l'essentiel de son œuvre.