Jan Van der Heyden ou Jan Van der Heyde
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre et graveur néerlandais (Gorinchem 1637 – Amsterdam 1712).
Établi en 1650 à Amsterdam, Van der Heyden fut un spécialiste de paysages urbains, qu'il rendit d'une façon plus minutieuse encore que G. Berckheyde ; il décrivit avec prédilection la ville d'Amsterdam, faisant preuve d'une précision et d'une délicatesse remarquables, traduisant aussi bien la poésie d'un mur de brique, la fluidité de l'atmosphère, les jeux de lumière que le frémissement des feuillages ou la netteté des architectures se reflétant sur l'eau des canaux paisibles ; citons le Dam, la Martelaarsgracht (Rijksmuseum), la Westerkerk (Londres, Wallace Coll. et N. G.), le Herengracht, l'Hôtel de ville (1688, Louvre), le Gracht (musée de Karlsruhe). Cet art soigneux et net, quoique nuancé par un très fin sentiment de la lumière, trahit l'activité d'ingénieur de Van der Heyden ; en effet, dès 1668, il s'intéressa aux problèmes de l'éclairage public et fit paraître un ouvrage sur les pompes à incendie à boyaux, dont il grava les planches (dessins préparatoires au cabinet des Estampes du Rijksmuseum), au reste, c'est pour cette activité d'ingénieur plus que pour sa peinture qu'il fut célèbre en son temps. Il ne faudrait pas en conclure, cependant, que ses paysages soient toujours d'une grande fidélité topographique ; la majorité de ses vues associent, dans le même tableau, des motifs architecturaux tirés de ses voyages rhénans avec d'autres motifs authentiquement néerlandais, les baignant de la lumière idéale et poétique d'un doux ensoleillement, à la façon de Potter ou d'Adriaen Van de Velde, qui a d'ailleurs peint les personnages qui animent maint paysage de Heyden. En cela, il anticipe Canaletto dans la création de lieux et de villes imaginaires, ce dernier a parfaitement pu subir son influence. On sait que, dès 1669, le grand duc de Toscane avait acheté une Veduta de Van der Heyden. Si l'on met à part l'hypothétique voyage à Londres cité par Houbraken, Heyden entreprit av. 1661 un voyage vers le sud qui le mena à Cologne (Vue de Cologne, Londres, N. G. et Wallace Coll. ; Ermitage), à Emmerich (Sainte Aldegonde d'Emmerich, Louvre) et à Düsseldorf (l'Église des Jésuites à Düsseldorf, 1667, Mauritshuis) ; avant 1673, il se rendit aussi à Bruxelles : l'Ancien Palais des ducs de Bourgogne (Louvre ; Dresde, Gg ; musée de Kassel). Il peignit plus de 220 tableaux. On se prend à regretter qu'il se soit limité à la Veduta. Un Paysage avec un mur de parc (loc. inc.), à l'atmosphère inquiétante, prouve qu'il avait des qualités indéniables de paysagiste. Quant aux natures mortes qu'il a produites, essentiellement à la fin de sa vie, et jusqu'à 75 ans, elles ont des qualités d'étrangeté qui confinent à l'hyperréalisme, associant nature morte et scène d'intérieur. Il faut citer à cet égard la Nature morte presque abstraite, en rouge et blanc, du musée de Budapest, mais aussi celles du Mauritshuis (1664) et de l'Akademie de Vienne.
Peintre agréable, exécutant délicat et même virtuose, Van der Heyden a exercé une grande influence sur les paysagistes urbains du xviiie s. tels que Jan Ten Compe, Isaac Ouwater, La Fargue, Johannes Prins, qui, à son exemple, cédèrent à une sorte d'exploitation sentimentale du thème, national par excellence, des villes endormies dans leur calme.