Félix Vallotton

Lautréamont
Lautréamont

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Peintre suisse naturalisé français (Lausanne 1865  – Paris 1925).

Issu de la bourgeoisie protestante de Lausanne, Vallotton, qui décide de se consacrer à la peinture à l'âge de dix-huit ans, s'inscrit à Paris à l'académie Julian. Après trois ans d'une vie difficile et isolée, il expose pour la première fois au Salon des artistes français un portrait où se révèle son admiration pour Holbein (Portrait de M. Ursenbach, 1885, Zurich, Kunsthaus). Il copie assidûment au Louvre Léonard, Antonello de Messine et Dürer, mais c'est Ingres qu'il admire surtout ; on dit qu'il éclata en sanglots lorsqu'il découvrit le Bain turc (Louvre).

Vallotton participe dès 1893 au Salon des indépendants avec un Bain au soir d'été (Zurich, Kunsthaus), qui fait scandale par son érotisme caricatural et froid, sa technique lisse et son dessin contourné. À partir de la même année, il expose avec les Nabis, ses amis de l'académie Julian, mais ne fait vraiment partie du groupe qu'en 1897. Au cours de cette période, il exécute de nombreuses gravures sur bois (technique qu'il employait depuis 1891), qui connaîtront très vite un succès international en paraissant dans le Courrier français et le Rire dès 1894, dans la Revue blanche, le Chap Book de Chicago et le Jugend de Munich l'année suivante, puis, autour de 1900, dans le Cri de Paris, la revue d'Ibels le Sifflet, le Mercure de France, le Rire, le Scribner de New York, ou dans des journaux nettement polémiques : l'Assiette au beurre, les Temps nouveaux, l'Ymagier.

Dans la gravure sur bois, aimée des Nabis et d'Alfred Jarry, le goût de l'art naïf, de l'art pur s'appuyait sur une contrainte technique : simplification des formes et suppression des passages semblables aux formules de la peinture nabi. Vallotton, par un découpage net des plages de noir et de blanc et par d'autres moyens de simplification, transmet avec force une vision du monde amère et sans complaisance, que ce soit dans ses portraits (illustrations du Livre des masques de Remy de Gourmont) ou dans les scènes où se marque sa sympathie pour le mouvement anarchiste et sa violence contre la société bourgeoise de son temps (la Manifestation, 1883 ; Sauvons Rome et la France, 1893 ; l'Exécution, 1894 ; le Train de plaisir, 1903, Paris, B. N., cabinet des Estampes). Ses peintures de jeunesse (la Cuisinière, 1892 ; la Malade, 1892) comme celles de la période nabi (triptyque du Bon Marché, 1898) ou les œuvres plus tardives (Autoportrait, 1923, musée de Berne) sont toujours d'un réalisme quasi photographique, rendu par une technique lisse, et d'une probité devant les laideurs et les ridicules de l'humanité qui tourne à la délectation morbide : " Il ne se régale que d'amertume ", écrit de lui Jules Renard. Vallotton a laissé plusieurs écrits, le meilleur étant un roman : la Vie meurtrière, où l'observation froide, la sensibilité blessée et l'amertume recoupent et commentent sa peinture. Ses nus sont parfois de pénibles académies de ménagères, mais ils peuvent atteindre à un érotisme glacial dans la ligne de l'Angélique d'Ingres et préfigurent, par leur naturalisme halluciné, leur vision mordante, tantôt les surréalistes Delvaux ou Magritte, tantôt Balthus (l'Enlèvement d'Europe, 1908, coll. Hahnloser).

Vallotton est représenté au musée d'Orsay, Paris (la Troisième Galerie au Châtelet, 1895 ; le Dîner, 1899 ; la Partie de poker, 1902 ; Madame Vallotton ; le Ballon, 1899), aux musées de Besançon, de Bagnols-sur-Cèze, d'Albi, de Grenoble, de Lille, de Lyon, de Nantes, de Nice, de Rouen, de Strasbourg, de Bâle, de Berne, de Lausanne, de Neuchâtel, au Kunsthaus de Zurich, à la fondation Ghez (Petit Palais) de Genève et à la Neue Pin. de Munich.

Félix Vallotton, le Dîner, effet de lampe
Félix Vallotton, le Dîner, effet de lampe
Lautréamont
Lautréamont