Phénoménologie de la perception
Essai de Maurice Merleau-Ponty (1945).
La question centrale de l'essai de Merleau-Ponty, comme son nom l'indique, est celle de la perception ; contre le psychologisme, contre le pragmatisme, contre la philosophie empiriste même, il s'agit de revenir – au moyen d'un examen très attentif des données expérimentales et des données cliniques de la pathologie nerveuse et mentale –, à la « perception vivante », à la perception en train de se faire, au « réel » tel qu'il se donne, sans vouloir, dans un premier temps, substituer à la « chose même » que l'on perçoit et que l'on ne peut que décrire, un ensemble d'explications, quel qu'il soit.
« L'homme est au monde, c'est dans le monde qu'il se connaît. » Cette formule permet d'approfondir ce problème de la perception, car la question centrale est bien de savoir qui connaît, et comment on connaît. Or, celui qui connaît est seulement un « existant », un « être au monde », immergé dans un « entourage » qui est la réalité du monde tel qu'il se donne, et le processus de la connaissance n'est plus dès lors dévoilement d'un objet par un sujet qui lui est nécessairement extérieur, mais bien co-naissance. La réalité n'est donc pas un en-soi, elle n'est pas davantage une construction du sujet, elle est une intentionnalité, par rapport au monde comme par rapport aux autres. La conscience, toujours présente à ce dont elle est consciente, est à la recherche d'un sens, mais cette recherche s'effectue dans le cadre d'une dimension temporelle – le temps expérimenté, mais aussi l'histoire.
Phénoménologie de la perception interroge, à travers la notion d'intentionnalité, sur l'homme pris dans son existence concrète, et sur ses possibilités d'action, elles-mêmes dépendantes du sens qu'il confère à l'histoire. Moins immédiatemment politique que la pensée de Sartre, cette œuvre exerça cependant, dans la période de l'après-guerre, une profonde influence sur le mouvement existentialiste.