chant grégorien
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».
Expression aujourd'hui courante pour désigner l'ensemble du répertoire monodique de l'Église latine médiévale.
On a vu à l'article Grégoire (saint) que cette appellation, qui ne date guère que du début du xxe siècle (Motu proprio de Pie X, 1903 ; on disait auparavant « plain-chant » ou « chant ecclésiastique »), est historiquement sujette à caution. Les « grégorianistes » ou spécialistes du « chant grégorien » se gardent bien, du reste, d'employer ce terme dans cette acception généralisée, et le restreignent à l'ordonnance de rite romain pouvant effectivement être datée avec vraisemblance de l'époque de ce pape, soit du viie siècle environ. Ils en excluent donc, d'une part, l'ensemble des répertoires de rite non romain (ambrosien à Milan, gallican en France, mozarabe en Espagne, etc.), d'autre part, celui des rites romains antérieurs ou parallèles, dont le principal est le chant dit « vieux-romain », qui se serait maintenu jusqu'au xiiie siècle environ et aurait été ensuite éliminé sous l'influence des franciscains ; toutefois aucun des manuscrits considérés comme « vieux-romains » n'est antérieur au milieu du xie siècle, ce qui étend considérablement la part de l'hypothèse. Il faut également distraire du domaine « grégorien » les différents remaniements du répertoire effectués au cours des siècles, par exemple le chant cistercien, abondant en amputations mélodiques, et le répertoire tardif des tropes, séquences ou offices mesurés qui, bien que partiellement officialisés, introduisent un style quelque peu différent. La composition des mélodies dites grégoriennes se ralentit notablement à partir du xie siècle et cesse à peu près à la fin du xve (le Kyrie et le Gloria de la Messe des Angles ou Anglais, dite par corruption Messe des Anges, sont parmi les pièces les plus tardives). Des essais de composition en plain-chant, influencés par les déformations de style survenues entre-temps, se rencontrent encore au xviie siècle, surtout en France (Henri Dumont, Lully le fils), puis s'éteignent pour renaître aux premiers jours de la résurrection solesmienne (Dom Pothier, Lambillotte). Elles demeurent marginales : lorsque apparaissent de nouveaux offices (Sacré-Cœur, Sainte-Jeanne-d'Arc, etc.), les liturgistes adaptent le plus souvent d'anciennes pièces sans en créer de nouvelles. C'est encore ce qu'ils font actuellement pour ménager tant bien que mal une possibilité de service du chant grégorien dans les nouveaux rituels postconciliaires, trop souvent conçus hâtivement sans que l'on ait prêté une attention suffisante à leurs incidences musicales.