Alfred George Deller
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».
Contre-ténor et chef d'orchestre anglais (Margate, Kent, 1912 – Bologne, Italie, 1979).
Il appartint à un chœur d'église de sa ville natale, travailla en autodidacte la voix d'alto mâle (contre-ténor), fit partie des chœurs de la cathédrale de Canterbury (1940-1947), puis de ceux de Saint-Paul à Londres, tout en commençant une carrière de soliste (ses premiers disques datent de 1949). En 1950, il constitua un groupe de chanteurs, généralement accompagné d'instrumentistes, le Deller Consort, dont il fut le chef et l'animateur, et dont le but était de faire connaître l'art du madrigal anglais et la musique de l'époque élisabéthaine. L'extension du répertoire du Deller Consort amena plus tard Alfred Deller à une véritable activité de chef d'orchestre, par exemple dans des œuvres lyriques de Purcell ou de Haendel. Parallèlement à sa carrière de chanteur, Deller se consacra à la pédagogie, en particulier en France lors de stages à l'abbaye de Sénanque en Provence.
Oubliée pendant un siècle et demi, parfois même méprisée, la voix de contre-ténor avait seulement survécu à l'état latent dans l'exécution de la musique religieuse en Angleterre, et n'était plus défendue et illustrée que par des personnalités très isolées comme le chanteur américain Russell Oberlin. Alfred Deller a été le chef de file d'une nouvelle école d'interprètes qui retrouvent et cultivent cette voix. Mais parmi les contre-ténors apparus durant ces dernières décennies, la voix d'Alfred Deller possédait une couleur très particulière, une pureté cristalline que nul n'a, à ce jour, égalée. L'art de Deller était caractérisé par un sens du style, une musicalité et un goût parfaits. Il a donné des interprétations que l'on peut qualifier d'idéales de la musique anglaise d'époque élisabéthaine, par exemple des ayres de John Dowland. Grâce à sa technique, Deller a pu aussi tenter, dans des œuvres comme Sosarme de Haendel, de ressusciter sinon le timbre des castrats, assez différent de celui des contre-ténors, du moins leur virtuosité et leur art de l'expression. La voix de Deller était de celles qui peuvent inspirer des compositeurs : Britten écrivit pour lui le rôle d'Obéron dans le Songe d'une nuit d'été (1960).
L'un des enfants d'Alfred Deller, Mark, s'est à son tour forgé une voix de contre-ténor et assume la responsabilité du Deller Consort depuis la mort de son père.