Tite-Live

en lat. Titus Livius

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Historien latin (Padoue, v. 60 av. J.-C. – 17 apr. J.-C.).

Né en Gaule Cisalpine dans une riche famille plébéienne, il resta dans sa ville natale jusqu'à la fin des guerres civiles, puis vint à Rome. Il exerça sans doute la profession d'avocat et commença par composer des ouvrages de rhétorique et de philosophie. Malgré ses sympathies pour le parti pompéien, il fréquenta la famille impériale et donna le goût des recherches historiques au futur empereur Claude ; cependant, à la différence des historiens qui l'avaient précédé, César ou Salluste, Tite-Live ne joua aucun rôle dans la vie publique. C'est en 26 av. J.-C. qu'il commença à rédiger son Histoire romaine, œuvre monumentale qui raconte l'histoire de Rome des origines à l'an 9 av. J.-C. (mort de Drusus) en 142 livres regroupés en « décades », et dont il ne reste que la première décade (de la fondation de la ville à 293), les troisième et quatrième décades, une partie de la cinquième (de 221 à 167), des fragments, ainsi que des résumés, ou periochae, des livres disparus. Le dessein de Tite-Live n'était pas de faire œuvre de propagande ou de justification politique. C'était, en effet, l'histoire nationale par excellence, car son auteur était parvenu à écrire une œuvre assez impartiale, sans républicanisme frondeur ni flatterie pour le régime impérial. Ayant connu les périodes troublées des guerres civiles et le rétablissement de la paix par Auguste, il a voulu témoigner de son patriotisme dans sa grande œuvre historique dont il a dit qu'elle était destinée à fixer les hauts faits du peuple souverain de l'univers. Son tableau exalté de la Rome primitive et de ses vertus arrivait opportunément pour soutenir la politique d'unité nationale d'Auguste. Mais le rôle privilégié qu'il donne à Rome dans l'histoire mondiale n'empêche pas qu'il évoque avec pessimisme dans sa préface la dégradation de la vie publique à Rome, et bien probablement les derniers livres de l'Histoire romaine, disparus aujourd'hui, montraient cette lente érosion des valeurs romaines. C'est par opposition à ce présent troublé que l'évocation du passé prend toute sa valeur symbolique, passé que Tite-Live évoque avec relief en mêlant mythes et fables aux événements proprement historiques. Son œuvre est loin d'être celle d'un érudit, la critique des sources est souvent insuffisante, et Tite-Live utilise, au lieu des documents bruts, les textes littéraires des Annalistes auxquels il a emprunté la présentation année par année des événements. Le peuple romain constitue l'unique objet de cette fresque historique au point que l'auteur laisse sciemment de côté l'histoire des autres peuples voisins. Et Tite-Live opère une telle résurrection du passé de Rome qu'il avoue lui-même avoir eu « l'âme antique ». Cette sympathie avec les Romains d'autrefois lui inspire des portraits mémorables (Hannibal, Scipion) en même temps qu'il excelle dans la peinture des mouvements de foule. Les nombreux discours fictifs, loin d'alourdir le récit, permettent de mieux cerner la psychologie d'un personnage, l'originalité d'une situation. et des anecdotes enrichies par un style orné de tournures poétiques ou archaïques. Dans son œuvre, Tite-Live a laissé une image inoubliable de la grandeur de Rome telle que les contemporains d'Auguste la concevaient, une puissance construite de génération en génération depuis les temps mythiques de la fondation de la Ville.