Porto Rico
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Territoire espagnol puis nord-américain, l'île de Porto-Rico devient un État libre associé aux États-Unis en 1952. Les premiers noms de ses lettres sont ceux des poètes José Gautier Benítez (1848-1880), Lola Rodríguez de Tío (1843-1924) et Alejandro Tapia y Rivera (1826-1882). Le père du roman « rural », courant qui irriguera la littérature de l'île jusqu'à nos jours, est Manuel Alonso (1823-1890), auteur du célèbre Gíbaro (1849), tandis qu'Eugenio M. de Hostos (1839-1903) entreprend une œuvre doctrinale et pédagogique qui le rendra très influent. Francisco Mariano Quiñones (1830-1908) écrit deux romans à thème « persan », et Manuel Corchado, une Histoire d'outre-tombe, sorte de manifeste spiritiste. Le théâtre romantique est encore illustré par les pièces historiques de A. Tapia y Rivera, et le courant naturaliste, par Manuel Zeno Gandía. Cayetano Coll Toste s'inspire du Péruvien Ricardo Palma pour écrire des Traditions et légendes portoricaines où s'amalgament légende et histoire. Le modernisme n'apparaît à Porto-Rico qu'en 1913, avec la fondation de la Revista de las Antillas, dirigée par Luis Lloréns Torres, avec Evaristo Ribera Chevremont, Virgilio Dávila, José I. de Diego et Luis Palés Matos.
À partir du début du xxe siècle, les lettres portoricaines sont étroitement liées au problème essentiel de l'île : sa fausse indépendance. Les États-Unis, en 1917, tentent d'imposer l'anglais comme langue officielle ; cela entraîne une réaction des intellectuels contre tout ce qui vient d'Amérique du Nord et, par contrecoup, face à l'industrialisation et à la modernisation, un culte du ruralisme (Lloréns Torres, V. Dávila, Juan Antonio Corretjer, Francisco Manrique Cabrera). À partir de 1930, la littérature critique se fait abondante et riche, avec pour chefs de file Tomás Blanco et les fondatrices de la revue Asomante (1939), Concha Meléndez, Margot Arce et Nilita Vientos Gastón. Luis Palés Matos publie ses meilleures œuvres, en cultivant l'antillanisme, tout comme Julia de Burgos. L'amertume provoquée par la situation politique de l'île transparaît bien chez Francisco Matos Paoli, auteur de Chant à la folie, et chez Luis Hernández Aquino, qui publie Île de l'angoisse et fonde la revue Guajana. Les préoccupations patriotiques sont le véritable point commun des créateurs contemporains. Le poète Pedro Juan Soto se fit le peintre des Portoricains de l'exil (Spiks, 1956). L'exode massif vers New York, Miami ou Chicago est d'ailleurs un des principaux problèmes actuels d'une île en pleine mutation. Plusieurs écrivains portoricains résident à l'étranger (José Luis Gonzáles, Emilio Díaz Varcarcel) ou écrivent parfois en anglais (René Marqués). Les plus jeunes écrivains (Ramos Otero, Carmelo Rodríguez Torres, José Luis Méndez, Arcadio Díaz Quiñones, Luis Rafael Sánchez), conscients de cette situation critique, recherchent une ouverture sur la population et veulent échapper au danger de l'élitisme.