Pierre Drieu La Rochelle
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain français (Paris 1893 – id. 1945).
C'est, dès l'enfance, un « homme grave », hanté par le suicide. Trois fois blessé pendant la guerre, il en restera traumatisé : « J'étais un homme, mon sang avait coulé » (Comédie de Charleroi, 1934). En proie à une hantise de l'accomplissement, il se cherche et cherche parallèlement une Europe forte (Mesure de la France, 1922 ; le Jeune Européen, 1927). Face à la décadence des démocraties, il « respire fasciste ». « Trop sensible pour être sensuel » (l'Homme couvert de femmes, 1925), il conte ses expériences amoureuses, et Gilles (1939) en donne le fin mot : « Tu as perdu ton temps avec les femmes, tu ne les aimes pas. » Le Feu follet (1931) offre une vision précisée du suicide, acte de Romain viril, au moment même où l'aventure du nazisme le subjugue (Socialisme fasciste, 1934). Sous l'Occupation, il dirige la Nouvelle Revue française, écrit dans le Figaro et Je suis partout. L'engagement politique tourne au désastre. Drieu se réfugie en littérature (l'Homme à cheval, 1943 ; les Chiens de paille, écrit en 1944, publié en 1963). Le 15 mars 1945, un mandat d'amener est délivré contre lui : le soir même, il réussit sa quatrième tentative de suicide en dix mois. L'homme de Genève ou Moscou (1928) n'a trouvé nulle part, pas plus à Berlin qu'à Paris, de quoi satisfaire ses rêves de guerrier malade. Contradictions, alternances et alternatives l'ont épuisé. Cet homme blessé laisse une œuvre diverse, où il ne parle en définitive que de lui, de ses poèmes (Interrogation, 1917) jusqu'à son Journal 1944-1945 (1961), et où l'encre de l'œuvre et le sang de l'existence se mêlent étroitement (Récit secret, 1958 ; Exorde, 1961 ; Mémoires de Dirk Raspe, 1966).