John Griffith, dit Jack London
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain américain (San Francisco 1876 – Glen Ellen, Californie, 1916).
Auteur de romans d'aventures et pionnier du socialisme américain, il fut le romancier le plus populaire de son temps et l'un des plus controversés. On a souvent considéré l'auteur de l'Appel de la forêt (1903) et de Croc-Blanc (1905) comme un écrivain pour la jeunesse, dans la lignée de Kipling. C'était oublier que, dans le Talon de fer (1907), London est le prophète d'une révolution anarchiste. Son roman le plus étonnant réside dans sa vie d'aventurier, qu'il raconte dans des œuvres autobiographiques comme Martin Eden (1909) et John Barleycorn (1913) – ses luttes contre le déterminisme des classes, l'alcoolisme et le désespoir.
Fils naturel d'un astrologue irlandais et d'une spirite yankee, il dut survivre dans le San Francisco de la ruée vers l'or. Vendeur de journaux, ramasseur de quilles dans un bowling, chasseur de chats pour leurs peaux, écumeur des parcs à huîtres, chasseur de phoques au Japon, il rejoignit en 1894 l'armée rebelle des chômeurs de Jacob Sechler Coxey, en marche sur Washington. En 1897, chercheur d'or en Alaska avec une équipe d'illuminés, il passait ses nuits à discuter de Karl Marx et de Nietzsche, de Milton et de Kipling. À vingt-trois ans, il commença une carrière de pigiste à dix dollars les mille mots, exploitant ses souvenirs d'aventurier, dans un style qui renverse les conventions frileuses du roman. En 1898, son premier récit, À l'homme de la piste, est publié dans l'Overland Monthly, suivi de Odyssée du Grand Nord, puis d'un recueil de récits, le Fils du loup (1900), son premier véritable livre. En une dizaine d'années de travail acharné, Jack London se hisse au premier rang des romanciers populaires américains, produisant à un rythme inégalé une série de romans, dont les plus connus sont l'Appel de la forêt (1903), le Loup des mers (1904), la Lutte des classes (1905), Croc-Blanc (1905), le Talon de fer (1907), Smoke Bellew (1911), la Vallée de la lune (1913). En dix ans, il gagne de sa plume un million de dollars-or, sans cesser de dénoncer la société capitaliste et d'exalter les vertus compétitives de la lutte pour la vie dans les forêts nordiques. Il se vante d'être l'écrivain le plus payé au monde, mais signe ses lettres « Vôtre pour la révolution ». Play-boy du socialisme, il enquête sur les taudis de Londres (Peuple de l'abîme, 1903), mais se fait construire le plus beau yacht du monde et la plus belle villa de Californie. Milliardaire et endetté, surmené et alcoolique, il se suicide à quarante ans. C'est moins un idéal collectif qui anime cette vie et cette création prolifique, qu'une volonté de revanche. Dans ces symboliques histoires d'animaux, on devine sous le thème de la meute une fascination pour l'instinct primitif de survie individuelle. Des titres comme la Brute abyssale (1913), la Force aux forts (1913) révèlent cette obsession. Héros d'une époque qui a poussé le culte de l'entreprise jusqu'à la férocité, Jack London dénonce les maux d'un capitalisme anarchique et sauvage, mais cède à la fascination destructrice de cette grandeur colossale.