Henri de Régnier
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Poète et romancier français (Honfleur 1864 – Paris 1936).
Les évolutions caractéristiques mais sans ruptures de l'œuvre riche et variée de Régnier contribuent de manière originale à inscrire le symbolisme dans la tradition littéraire française. Issu d'une famille noble de Normandie, il fait ses études à Stanislas puis à la faculté de droit de Paris. Ses premiers recueils (il fréquente alors le salon de José Maria de Hérédia) portent l'empreinte du romantisme et du Parnasse (les Lendemains, 1885 ; Apaisement, 1886 ; Sites, 1887 ; Épisodes, 1888). Ses liens avec Viélé-Griffin et Pierre Louÿs, son assiduité aux « mardis » de Mallarmé (dont il devient le disciple fervent), ses nombreuses collaborations aux « petites revues » (l'Ermitage, les Entretiens politiques et littéraires, la Revue blanche...) l'engagent dans l'aventure symboliste : il adopte le vers libre, les thèmes et la musicalité symbolistes (Poèmes anciens et romanesques, 1890 ; Tel qu'en songe, 1892) ; son poème dramatique « la Gardienne » sera représenté par Lugné-Poe au Théâtre de l'Œuvre, en 1894, dans une mise en scène comparable à celle de Pelléas et Mélisande. À partir de 1895 se dessine toutefois une évolution nette du poète vers le néoclassicisme (Aréthuse), et un retour vers des exigences formelles et des motifs hérités du Parnasse (au même moment, il épouse Marie de Hérédia, fille du poète, connue sous le nom de plume de Gérard d'Houville, et qui avait un faible marqué pour Pierre Louÿs). Cette évolution est sensible dans le titre de ses recueils : Jeux rustiques et divins, 1897 ; les Médailles d'argile, 1900 ; la Cité des eaux, 1902 ; la Sandale ailée, 1906 ; le Miroir des heures, 1910 ; Vestigia flammae, 1921. L'inspiration mélancolique et austère de sa poésie semble s'alléger dans ses contes (Contes à soi-même, 1893 ; la Canne de jaspe, 1897) et ses nombreux romans, où Régnier explore aussi bien les voies de l'étrange que du comique et du sentimental, renouant avec un xviiie siècle qu'il réinvente délicieusement (la Double Maîtresse, 1900 ; la Pêcheresse, 1902 ; les Rencontres de Monsieur de Bréot, 1904, etc.). Venise est également une source d'inspiration constante dans les textes de cette dernière période (Esquisses vénitiennes, 1906 ; l'Altana ou la vie vénitienne, 1929 ; le Voyage d'amour, 1930). En 1911, il est élu à l'Académie française, au fauteuil du vicomte de Vogüe.