Giandomenico, dit Tommaso Campanella

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Écrivain et philosophe italien (Stilo, Calabre, 1568 – Paris 1639).

Dominicain, il s'enthousiasme très tôt pour la philosophie de B. Telesio, calabrais lui aussi, dont il reprend les idées principales dans son Philosophia sensibus demonstrata (1591). Fuyant les tracasseries de ses supérieurs, il se rend à Naples en 1589, où il se lie avec G. Della Porta. C'est alors qu'il commence à subir des persécutions : de 1592 à 1597, il affronte quatre procès pour hérésie et est condamné à résider en Calabre. À peine rentré dans son village natal, jugeant à certains signes astrologiques que la fin du siècle doit coïncider avec une radicale « renovatio mundi », il organise une conjuration destinée à instaurer une république calabraise, conçue sur le modèle qu'il décrira dans la Cité du Soleil (1602). Trahi par quelques conjurés, il est emprisonné à Naples en 1599. D'abord condamné à mort, il obtient, en simulant la folie, que sa peine soit commuée en détention à perpétuité. Sa captivité durera presque vingt-sept ans, pendant lesquels il élaborera l'essentiel de son œuvre politique, philosophique et théologique (on se souviendra au moins de Sur le sens des choses et de la magie et de la Métaphysique). Libéré par l'Espagne en mai 1626, il tombe aux mains de l'Inquisition romaine dès juin. Il ne sera relâché qu'en 1629 sur l'intervention du pape Urbain VIII, que séduiront les pratiques magiques et astrologiques de Campanella. Celui-ci n'en bravera pas moins son protecteur en soutenant publiquement, lors de son procès de 1632, la cause de Galilée, qu'il avait déjà défendue en 1616 dans son Apologie de Galilée. La crainte de nouvelles persécutions le pousse en 1634 à quitter définitivement Rome pour Paris, où la naissante hégémonie de la monarchie française incarne son espoir d'une unification politique et religieuse de l'Europe chrétienne. L'œuvre de Campanella inclut aussi de nombreux poèmes qui, par leur virtuosité technique et leur tension dramatique, constituent le plus haut exemple de poésie philosophique depuis Dante. La postérité associe toutefois son nom à l'utopie de la Cité du Soleil, qui tire son intensité prophétique de sa brièveté. Ses idées maîtresses (la communauté des biens et des femmes, l'éducation, la sexualité, l'eugénisme, la hiérarchie des techniques et des sciences, le régime des délits et des peines, la division du travail, etc.) mêlent totalitarisme et utopie libertaire.