Benjamin, dit Ben Jonson
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Poète et auteur dramatique anglais (Westminster 1572 ? – Londres 1637).
Fils posthume d'un prédicateur écossais, maçon, soldat, comédien ami de Shakespeare (qui jouera dans ses pièces), il tue en duel un acteur, est marqué d'infamie, se fait pour un temps catholique (1598-1610). Trois fois emprisonné, mêlé à la Conspiration des poudres (1605), il sera toute sa vie à contre-courant. Son théâtre s'inspire de la théorie des humeurs, dérivée de la médecine antique : l'homme est régi par le jeu des quatre « humeurs » ou fluides corporels (sang, pituite, bile, mélancolie). La prédominance d'une humeur engendre des types (l'atrabilaire, le flegmatique, etc.) dotés d'un destin médical et social. De ces types dérivent les « caractères », personnages types qui sont déterminés physiologiquement et agissent en fonction d'une humeur, d'une manie qui maintient leur comportement identique dans toutes les situations. Chacun dans son humeur (1598) et Chacun hors de son humeur (1599) brossent ainsi une galerie d'excentriques et de possédés. Volpone, ou le Renard (1605) peint un univers cynique fait de convoitise et d'hypocrisie, bestiaire humain où chacun manœuvre pour son désir. Épicène, la femme silencieuse (1609) et la Foire de la Saint-Barthélemy (1614) poursuivent la satire des mœurs contemporaines. Séjan (1603) et Catilina (1611), tragédies à l'ancienne, illustrent la corruption du pouvoir fondé sur la délation. Ben Jonson est aussi le spécialiste du « masque », spectacle de cour associant théâtre, musique, chant et ballet. En 1600, les Fêtes de Cynthia rendent hommage à la reine Élisabeth : les vices comparaissent masqués de vertus devant la reine, qui perce les apparences. Jonson rénove le genre en y introduisant l'« antimasque », parodie du thème glorieux abordé dans le masque : le Masque de la noirceur (1603), Oberon (1611), le Masque irlandais (1613), Mercure ravi aux alchimistes (1615), l'Âge d'or restauré (1616) traduisent une exigence de pureté qui lui vaudra, dans ses années de silence (1616-1637), d'être entouré de disciples. Poète du mépris et de la pureté, frappé d'attaques de paralysie en 1626 et en 1628, il laisse inachevé un drame pastoral (le Triste Berger, 1641).