éloge
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
L'éloge, qui prit le nom de panégyrique lorsqu'il était prononcé dans une assemblée solennelle, relève de l'éloquence épidictique ou démonstrative, comme l'ode ou le blâme. Il fut, en Grèce, un genre bien défini. D'origine lyrique (Odes triomphales de Pindare), il devient chez les sophistes et dans les écoles de rhéteurs prétexte à exercices subtils sur des héros fabuleux ou des thèmes insignifiants (souris, fièvre, etc.). Il peut être un procédé didactique dans les œuvres sérieuses : éloge de l'amour dans le Banquet de Platon, de l'eau dans le traité Du baptême de Tertullien, exposés moraux ou politiques chez Isocrate. L'artifice du genre a vite suscité les parodies de l'Éloge de la mouche de Lucien à l'Éloge de la folie d'Érasme ou à l'Éloge de la goutte par Jérôme Cardan.
La forme la plus répandue de l'éloge est l'éloge funèbre. Athènes, où, depuis Marathon, un orateur était chargé chaque année de l'éloge des guerriers morts pour la patrie, n'a laissé qu'un seul exemple authentique : le discours d'Hypéride après la guerre lamiaque. Mais les éloges apocryphes ne manquent pas, prêtés à Périclès, à Lysias, à Démosthène. Isocrate, dans l'Éloge d'Évagoras, roi de Chypre, donne la première de ces oraisons de princes où s'illustreront les rhéteurs de la fin de la période hellénistique et dont le plus célèbre reste l'Éloge de l'empereur Julien par Libanios. Rome, où l'éloge faisait partie du rite des funérailles, ne nous a rien laissé de ces compositions, à l'exception d'un fragment de l'éloge de Scipion Émilien par Laelius. Avec le christianisme, l'éloge funèbre devient oraison : la glorification du mort est l'occasion de l'édification des fidèles (Oraisons funèbres de Bossuet). Si le genre – avec l'œuvre poétique de Saint-John Perse (Éloges, 1911) – a parfois retrouvé, hors de la perspective religieuse, une certaine actualité (André Malraux a voulu restituer, sans toujours éviter la grandiloquence, le sublime propre à l'évocation des vies illustres, dans ses éloges de Jean Moulin et de Le Corbusier), l'éloge subsiste surtout aujourd'hui sous sa forme académique : essai didactique au xviiie s. qui va de l'économie politique (Turgot, Éloge de Gournay) à l'esthétique littéraire (Diderot, Éloge de Richardson), le genre, illustré par Fontenelle, Condorcet, d'Alembert, reste imposé aux Académiciens français lors de leur réception.