le Cabinet du docteur Caligari

Das Kabinett des Doktor Caligary

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des films ».

Film fantastique de Robert Wiene, avec Werner Krauss (Dr Caligari), Conrad Veidt (Cesare), Friedrich Feher (Franz), Lil Dagover (Jane), Hans H. von Twardowski, Rudolf Lettinger.

  • Scénario : Carl Mayer, Hans Janowitz
  • Photographie : Willy Hameister
  • Décor : Hermann Warm, Walter Röhrig, Walter Reinmann
  • Costumes : Walter Reinmann
  • Musique : Peter Schirman (version 1932)
  • Production : Erich Pommer (Decla)
  • Pays : Allemagne
  • Date de sortie : 1920
  • Son : noir et blanc
  • Durée : 1 420 m (environ 1 h 18)

Résumé

Franz raconte son histoire. Dans une petite ville au nord de l'Allemagne, lui et son ami Alan se rendent à la foire. Le secrétaire de mairie refuse de louer une baraque foraine au Dr Caligari. Le lendemain, on le retrouve assassiné.

Franz et Alan assistent au spectacle du Dr Caligari qui présente Cesare, son somnambule. Cesare prédit à Alan qu'il mourra avant l'aube et, effectivement, son cadavre est découvert quelques heures plus tard. Franz suspecte Caligari et demande à un médecin, le père de Jane, sa fiancée, d'examiner le somnambule. Sans résultat. Franz ne s'aperçoit pas que Caligari a remplacé Cesare, dans son cercueil de foire, par un mannequin. Caligari envoie Cesare tuer Jane, mais il ne fait que l'enlever, et va mourir d'épuisement après une longue poursuite. Caligari parvient à s'échapper ; Franz le retrouve dans un asile dont il est le directeur. Dans la chambre de celui-ci, on découvre un livre du xviiie siècle sur un forain italien, Caligari. Le directeur est enfermé.

Ayant terminé son récit, Franz regagne l'asile dont il est pensionnaire avec Jane et Cesare. Il se jette sur le directeur : celui-ci comprend que Franz le prend pour Caligari et promet de le guérir de sa folie.

Commentaire

L'expression idéale d'une certaine Allemagne

Dans l'Écran démoniaque, Lotte H. Eisner écrit : « Le penchant aux contrastes violents, que la littérature a transposé en formules taillées à coups de hache, de même que la nostalgie du clair-obscur et des ombres, nostalgie innée chez les Allemands, ont évidemment trouvé dans l'art cinématographique un mode d'expression idéal. Les visions nourries par un état d'âme vague et troublé ne pouvaient trouver un mode d'évocation plus adéquat, à la fois concret et irréel ». Les décors peints sur toile du Cabinet du Dr Caligari, en perspectives faussées, déformées à l'excès, où dominent angles, cubes, lignes obliques s'entrecoupant, contribuent, tout autant que l'interprétation, stylisée, concentrée, abstraite et toujours d'une extrême intensité, à donner au film son atmosphère oppressante, trouble, qui inquiète et terrorise le spectateur.

Caligari est un film expressionniste, le modèle du courant expressionniste allemand. Par la forme, incontestablement. Mais les thèmes du destin, de la folie, de la mort, de l'oppression sociale le rattachent à la tradition romantique allemande. Comme l'affirme Siegfried Kracauer dans De Caligari à Hitler, il est (comme de nombreux films de cette époque) le reflet direct de la mentalité populaire – de cette période de dépression de la république de Weimar – et annonce la prise de pouvoir par les nazis.

Robert Wiene a signé avec Caligari son seul film important. Mais il s'agit bien d'un chef d'œuvre de l'art expressionniste, autant que d'une certaine forme cinématographique, qui a influencé de nombreux films d'épouvante allemands, mais aussi, quelques années plus tard, hollywoodiens.