les droits de l'animal
Les droits de l'animal
Le mouvement de protection des animaux domestiques est, au départ, assez différent dans son esprit de celui des espèces sauvages. Dans le cas des premiers, en effet, il ne s'agit pas de préserver une espèce en tant que telle. Par le fait même qu'elle est domestique, une espèce ne peut être menacée de disparition, bien que de nombreuses races domestiques le soient aujourd'hui, parce que leur élevage a été délaissé. La proximité entre l'homme et les animaux domestiques a fait que les premières sociétés de protection animale se sont d'abord fondées pour défendre les chiens, les chats et les chevaux, ces derniers étant à l'époque nombreux dans les villes. Par la suite, ce sont toutes les espèces domestiques qui ont bénéficié des lois.
Alors que la protection de la nature s'intéresse surtout aux espèces, la protection des animaux concerne essentiellement l'animal en tant qu'individu. Elle combat aussi bien les mauvais traitements et les actes de cruauté émanant d'une seule personne que ceux relevant de loisirs, de traditions ou de pratiques comme l'expérimentation animale et l'élevage en batterie.
En 1978, dans les bureaux de l'Unesco à Paris, était proclamée une Déclaration universelle des droits de l'animal. Remaniée en 1989, elle est largement inspirée de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. Ainsi, l'article premier stipule : « Tous les animaux ont des droits égaux à l'existence dans le cadre des équilibres écologiques. Cette égalité n'occulte pas la diversité des espèces et des individus. » L'article deux souligne la responsabilité de l'homme à l'égard des autres espèces animales. La déclaration condamne les mauvais traitements et, si elle n'interdit pas formellement la mise à mort des animaux, notamment ceux d'élevage destinés à l'alimentation, elle recommande de leur donner une mort sans douleur. Article III : « 1. Aucun animal ne sera soumis ni à des mauvais traitements ni à des actes cruels. 2. Si la mise à mort d'un animal est nécessaire, elle doit être instantanée, indolore et non génératrice d'angoisse. » Une Ligue internationale des droits de l'animal tente de faire passer dans les faits les 14 articles de cette constitution. Elle est relayée dans de nombreux pays par des ligues nationales. En France, la Ligue française des droits de l'animal agit parallèlement aux associations plus anciennes (Société protectrice des animaux, Assistance aux animaux) et à d'autres, plus spécialisées.
Les animaux victimes
Parmi les actes individuels dont sont victimes les animaux domestiques, le problème de l'abandon des chiens et des chats lors des départs en vacances est l'un de ceux qui ont le plus mobilisé les défenseurs des animaux. D'une façon générale, la vogue des animaux de compagnie se retourne souvent contre ceux-ci, qui sont victimes de trafics, de vols ou d'euthanasie dans les fourrières. Stérilisation et tatouage sont de plus en plus vivement conseillés pour lutter contre ces pratiques et diminuer les risques de vol ou d'abandon. Les chiens de chasse sont, dans certaines régions, particulièrement convoités et revendus ailleurs à des chasseurs peu scrupuleux.
Nombre de jeux, sports ou traditions cruels sont la cible des défenseurs des animaux. Parmi ceux qui concernent les espèces domestiques, citons le tir aux pigeons vivants (aujourd'hui interdit en France après une longue lutte), les combats de coqs ou de chiens et les courses de taureaux. Les corridas sont particulièrement réglementées et ne peuvent avoir lieu que dans les régions où elles appartiennent à des traditions ancestrales. Ces dernières sont critiquées par les partisans de la protection des animaux, même si elles ne comportent pas de mise à mort. De telles pratiques sont d'ailleurs condamnées par l'article 10 de la Déclaration des droits de l'animal.
L'expérimentation animale
Bien qu'elle ait été pratiquée depuis l'Antiquité, l'expérimentation animale a seulement pris de l'importance au xixe siècle. D'abord limitée aux domaines scientifique et médical, elle s'est étendue, au xxe siècle, à beaucoup d'autres secteurs. Ainsi, l'efficacité ou la toxicité de nombreux produits (cosmétiques, teintures, pesticides, peintures, armes) sont testés sur les animaux.
On avance le chiffre de plusieurs centaines de millions d'animaux sacrifiés annuellement dans le monde, la plupart étant utilisés à des fins commerciales (pour tester des produits autres que des médicaments). Le terme d'« expérimentation animale » est aujourd'hui préféré à celui de « vivisection » (dissection ou opération réalisée sur un animal vivant non anesthésié dans un but expérimental) : l'emploi de ce dernier, à forte portée émotionnelle, n'est plus justifié car les opérations (du moins celles concernant les vertébrés) sont aujourd'hui réalisées sous anesthésie.
La liste des expérimentations effectuées est très importante et recouvre pratiquement tous les domaines de la biologie, de la médecine et des sciences du comportement. Pourtant, durant longtemps, la plupart des associations de protection animale restèrent assez modérées en face de ce problème, considéré comme un mal nécessaire.
Si la contestation des expérimentations commerciales est moralement assez facile, elle est peut-être plus délicate sur un plan économique, sauf à retirer du marché un grand nombre de produits (dentifrices, crèmes, etc.), ou à faire de l'homme lui-même un consommateur cobaye.
La contestation des expériences à but scientifique et médical (recherche sur le cancer, l'épilepsie, le sida, etc.) se heurte à des difficultés bien plus grandes. Certes, l'extrapolation de certains résultats (ceux des tests de toxicité, par exemple) de l'animal à l'homme est loin d'être toujours valable. Mais les solutions proposées ne permettent nullement de répondre à toutes les questions posées, quand elles ne sont pas totalement inadaptées. Peu à peu, cependant, les méthodes de substitution à l'expérimentation animale gagnent du terrain, qu'il s'agisse des cultures de cellules, des simulations par ordinateurs, des modèles mathématiques et de bien d'autres techniques. Beaucoup de chercheurs eux-mêmes sont désormais les premiers à les promouvoir et à les utiliser.
Les animaux d'élevage
Autre domaine ayant pris une très grande importance au xxe siècle, l'élevage en batterie, ou élevage industriel, est également devenu une préoccupation majeure des défenseurs des animaux. Apparu vers 1950, il était un résultat de l'essor démographique et des besoins alimentaires des pays occidentaux et aussi de la réduction de l'espace disponible pour l'élevage traditionnel.
Dans certains de ces élevages, les veaux sont enfermés dans des boxes où ils ne peuvent pas bouger. Au bout de trois mois d'une telle détention, le veau est complètement déformé, et il doit être traîné à l'abattoir. Quant aux poules, elles sont entassées au sol ou sur des treillis métalliques à raison de 20 ou 25 au mètre carré. Les pondeuses sont enfermées, sur plusieurs étages, par 4 ou 5 par cage de 40 x 40 cm. Le plancher de ces cages descend vers une gouttière dans laquelle roulent les œufs.
Ces élevages sont un champ d'expériences pour de multiples techniques nouvelles, qui, toutes, rabaissent l'animal au rang d'objet. Ainsi, des porcelets, délivrés par césarienne, sont enfermés dans des bulles de plastique qui les isoleront du monde pendant un mois. Ce sont des animaux IOPS, c'est-à-dire « indemnes d'organismes pathogènes spécifiques ».
Depuis quelques années, sous la pression des consommateurs, mais aussi pour créer de nouveaux débouchés commerciaux, un élevage traditionnel amorce un retour timide. Les conditions d'abattage ont, de même, été réglementées, la mise à mort en pleine conscience étant interdite (ce qui ne veut pas dire que la loi soit toujours respectée). De même le gavage des oies pour obtenir le foie gras a fait l'objet de vigoureuses campagnes de contestation.