félibrige
(provençal félibrige)
École littéraire constituée en Provence, au milieu du xixe s., pour le maintien et l'épuration de la langue provençale et des autres dialectes occitans, et pour la renaissance d'une littérature du midi de la France.
Mouvement littéraire pour la renaissance de la langue d'oc, en gestation depuis le début du xixe siècle. L'impulsion décisive fut donnée par Joseph Roumanille, qui édita en 1851 le recueil collectif Li Prouvençalo, autour duquel se rassemblèrent Mistral, Aubanel, Crousillat, Mathieu, Castil-Blaze et J.-B. Gaut. Mais c'est le 21 mai 1854, au château de Fontségugne, près d'Avignon, que sept poètes provençaux (Aubanel, Roumanille, Mistral, Mathieu, Tavan, Brunet, Giéra) se réunirent et fondèrent un groupement dont les membres, à l'instigation de Mistral, prirent le nom de félibres : le terme vient d'une vieille cantilène dans laquelle la Vierge raconte qu'elle a trouvé son fils « parmi les sept félibres de la loi » (emé li sèt felibre de la lei), Mistral donnant au mot le sens de « docteur de la loi ». Le félibrige s'assignera pour buts la restauration de la langue d'oc, son utilisation dans une création littéraire originale, sa promotion et son usage dans tous les actes de la vie méridionale. Sa première publication fut l'Armana prouvençau qui vit le jour dès 1855 et se poursuivra avec des variantes jusqu'à nos jours. Les premiers statuts véritablement structurés seront adoptés en 1876. Dirigé par les Provençaux, le félibrige regroupe en « maintenances », ayant chacune à sa tête un syndic, les autres domaines occitans : Languedoc, Auvergne, Limousin, Gascogne-Béarn, Guyenne-Périgord, Roussillon. Aujourd'hui comme hier, le président du félibrige est le capoulié, élu par l'assemblée générale lors du congrès de la Sainte Estelle, qui se tient chaque année à la Pentecôte dans une ville différente. Le capoulié est assisté d'un baile (secrétaire) et d'un clavaire (trésorier) issus du consistoire, organe consultatif qui rassemble les 50 majoraux. Tous les écrivains de langue d'oc ne furent cependant pas de fervents félibres ; des dissensions d'ordre religieux, linguistique et politique, ainsi que des problèmes d'hommes, firent éclore des mouvements parallèles, voire opposés – épisode le plus connu étant en 1892 le lancement d'un mouvement fédéraliste orchestré par Frédéric Amouretti et Charles Maurras.
Ces luttes n'empêchèrent pas l'émergence, à la fin du xixe siècle et au début du xxe, d'écrivains de valeur comme Félix Gras, Achille Mir, Folco de Baroncelli, l'abbé Joseph Roux, Marius André, Arsène Vermenouze, Robert Benoit, Joseph d'Arbaud, Antonin Perbosc, Marius Jouveau, l'abbé Justin Bessou, Michel Camélat, qui conférèrent à la littérature dite provençale une aura particulière ainsi qu'une influence notable sur la littérature française (notamment à travers Maurras, Daudet, P. Arène ou J. Aicard). Mais, depuis la Seconde Guerre mondiale, le félibrige est apparu trop attaché à un rituel passéiste et à un mode de fonctionnement inadapté pour répondre pleinement aux aspirations culturelles de l'occitanisme contemporain dont il constitue tout de même un élément fondamental.