emblème
(latin emblema, -atis, du grec emblêma, -atos, ornement en relief)
Signe conventionnel à valeur symbolique, parfois accompagné d'une légende en forme de sentence.
Les emblèmes sont des sortes d'idéogrammes permettant d'exprimer par le dessin une idée abstraite, généralement celle d'appartenance à une caste ou à un groupe, à une idéologie religieuse ou politique, à un métier. Le caducée, attribut d'Hermès, est devenu l'emblème du commerce. (Il est aussi celui de la médecine, en souvenir du serpent d'Épidaure.) Les corporations, dès l'Antiquité, ont eu leurs emblèmes (mosaïques de l'ancien port d'Ostie). Les grands personnages eurent aussi les leurs : Louis XII le porc-épic, François Ier la salamandre, Louis XIV le soleil.
Au xvie s., l'emblématique devient une véritable science, comme le prouvent les Emblemata d'Alciat (1531). Au siècle suivant, l'emblématique est un talent de société, une sorte de jeu de portraits auquel excellait le jésuite C. F. Menestrier, auteur de l'Art des emblèmes (1662). La Révolution et l'Empire ont eu recours à des emblèmes généralement empruntés à l'histoire antique : par exemple faisceaux et aigles rappelant la République puis l'Empire romains.
L'industrie a elle aussi adopté des emblèmes (dont certains prennent le nom de logotypes), multipliés par les moyens publicitaires : marques d'automobiles, emblèmes de banques ou de sociétés commerciales. Certains services publics (postes) font de même, ainsi que les partis ou mouvements politiques.
Les emblèmes en littérature
Née en Italie dans la seconde moitié du xve s. d'une interrogation sur les figures qui ornaient les médailles romaines et sur les hiéroglyphes égyptiens des obélisques de Rome, la vogue des emblèmes gagna, au xvie s., l'Europe entière. L'emblème était calqué sur la structure présumée de l'hiéroglyphe. Il comprenait trois éléments : une image (le « corps » de l'emblème), un intitulé (sentence ou simple titre qualifiant l'image) et un texte plus développé qui explicitait la portée didactique ou morale de l'image (ces deux derniers composants formant l'« âme » de l'emblème). Les recueils d'emblèmes furent très nombreux dans l'Europe de la Renaissance. Le premier fut les Emblemata de l'Italien Alciat, dont l'édition française parut en 1534 ; en France, les plus fameux furent le Théâtre des bons engins de G. de La Perrière (1539) et l'Hécatomgraphie de G. Corrozet (1540). La vogue des emblèmes fut telle que la plupart des imprimeurs européens adoptèrent l'emblème comme marque de fabrique ; l'un des plus célèbres fut celui que choisit l'imprimeur vénitien Alde Manuce : un dauphin enlaçant une ancre. Beaucoup de ces emblèmes étaient fondés sur un jeu sur le propre nom de l'imprimeur : ainsi É. Dolet choisit-il comme emblème la doloire (la hache), G. Corrozet une main étendue tenant un cœur qui entourait une rose (cor-rozé).