bengali

Langue indo-aryenne dérivée du sanskrit parlée par environ 180 millions de locuteurs au Bangladesh et en Inde (Bengale-Occidental).

LANGUE ET LITTÉRATURE BENGALI

Le bengali fait partie du groupe de langues – qui inclut également le bihari, l'assamais et l'oriya – le plus oriental de la sous-famille indo-aryenne de l'indo-européen. C'est un descendant de l'indo-aryen ancien (représenté dans nos documents par le sanskrit) à travers le prakrit ou le magadhi.

Les quelque 180 millions de locuteurs du bengali, qui vivent principalement dans l'État indien du Bengale-Occidental, sont répartis entre de nombreux dialectes. La langue parlée moderne courante, base de la norme littéraire moderne, est le dialecte utilisé par les classes cultivées de Calcutta. L'alphabet bengali est une variante locale de l'alphabet devanagari couramment utilisé dans toute l'Inde du Nord, mais avec des formes si divergentes qu'il doit être appris comme un système d'écriture distinct.

Les thèmes et les techniques de la littérature bengali dans sa période archaïque continuaient les traditions du sanskrit, du prakrit et d'autres langues vernaculaires indiennes dans leurs stades anciens. La poésie lyrique exprimait la dévotion envers les dieux populaires de l'hindouisme, surtout Krishna et d'autres avatars de Vishnu. Les épopées et les contes des Purana de l'Inde ancienne furent repris en vers populaires. La prose littéraire était rare, excepté dans des passages descriptifs imbriqués dans la narration en vers. De la période antérieure au xiie s., peu d'œuvres subsistent à part quelques chants appartenant au bouddhisme tantrique.

La période florissante de la littérature ancienne est marquée par des adaptations en bengali du Ramayana par Krittivasa (xive s.), du Mahabharata par Sanjaya (xive s.) et Kashiram (xviie s.), et du Bhagavata Purana par Maladhar Vasu (xve s.). Des hymnes lyriques furent composés en l'honneur de Krishna et Radha par Chandidas, de la déesse Chandi par Mukundaram (fin xvie s.), et de Durga par Ramprasad (xviiie s.). Des adeptes du grand maître spirituel vishnuite Chaitanya (1485-1533) développèrent la biographie poétique, genre assez nouveau ; nombre d'entre eux, à commencer par son disciple Govinda, relatèrent la vie du maître. Cette période ancienne traditionnelle, avec ses adaptations, sa lyrique et ses biographies poétiques dura jusqu'à la fin du xviiie s.

L'irruption de la vie et de la littérature occidentales, surtout anglaises, au xixe s. eut sur la littérature bengali une forte influence laïcisante. Cet effet fut plus précoce et plus profond au Bengale qu'ailleurs en Inde, et la littérature bengali moderne montra le chemin à toutes les autres.

Les courants de réforme sociale qui restructurèrent la vie intellectuelle bengali sont représentés avec une magnifique éloquence dans les œuvres de Ram Mohan Roy (1772-1833). Il exprima ses idées en une prose bengali découlant de la langue poétique antérieure agrémentée d'une multiplicité de mots sanskrits. Nombre d'auteurs d'essais politiques et sociaux, d'œuvres philosophiques, historiques et littéraires adoptèrent son style, qui s'imposa aussi dans le drame, revivifié et modernisé par un contenu social et satirique, jusqu'au milieu du xixe s., et gagna même les romans (à part les dialogues, exprimés de plus en plus en langue parlée).

À partir du milieu du xixe s., les auteurs importants, abandonnant peu à peu le vieux style archaïsant, employèrent en littérature la langue parlée des milieux cultivés de Calcutta. Ce style moderne ne l'a pas entièrement emporté sur son rival, mais il a gagné tous les genres de la littérature, même la poésie, et des Bengali bien informés prédisent la disparition prochaine du style traditionnel.

Parmi les grands noms de la littérature bengali récente figurent le romancier Bankim Chandra Chatterji (1838-1894), dont les romans sociaux et historiques inaugurèrent la fiction indienne moderne, Michael Madhusudan Dutt, ou Datta (1824-1873), poète et dramaturge de haut rang, à l'avant-garde de la voie nouvelle en poésie et théâtre bengali, ou l'érudit et romancier Ramesh Chandra Dutt (1848-1909).

La plus éminente figure de cette époque demeure Rabindranâth Tagore (1861-1941), qui acquit par sa poésie, ses drames et ses romans une grande renommée au Bengale puis en Occident ; la publication en traduction anglaise de son volume de poèmes Gitanjali (1910, en français l'Offrande lyrique) lui permit d'obtenir le prix Nobel de littérature en 1913. S'il s'exprima en vrai fils de l'Inde, il parla aussi pour l'humanité, et ses propres traductions anglaises de nombre de ses œuvres, même si elle ne rendent pas toujours justice à son style bengali et à son sujet, lui acquirent une audience mondiale.

Parmi les œuvres récentes les plus marquantes, citons les poèmes cosmopolites d'Abdul Ghani Hazari (né en 1925), les poèmes du courant expérimental de Shamsur Rahman (né en 1929) et les romans lyriques de Syed Waliullah (1922-1971).

À partir de 1947, les musulmans commencèrent à forger une littérature bengali distincte de celle de l'Inde. À son indépendance en 1971, le Bangladesh adopta comme hymne national le fameux chant de Rabindranâth Tagore, Sonar bangla (« Bengale d'or ») . Honorer le plus éminent poète de la littérature bengali contribua sans aucun doute à rapprocher les diverses tendances de la littérature bengali.