guerre de Sécession ou guerre civile américaine
(en anglais Civil War)
Conflit intérieur des États-Unis d'Amérique, qui, à propos de la question noire, opposa, de 1861 à 1865, une confédération d'États du Sud aux États du Nord et qui se termina par la victoire de ces derniers.
1. Origines et causes de la sécession
Depuis le début du siècle, une rivalité très nette avait opposé les États du Nord-Est, en voie d'industrialisation et protectionnistes, aux États du Sud, esclavagistes et libre-échangistes. Après des épisodes divers marqués par des raidissements et par des compromis qui sauvèrent l'unité des États-Unis, le conflit dégénéra en une véritable guerre civile qui se développa durant deux ans dans l'État du Kansas (1854-1856). Son résultat le plus net fut la création, face aux démocrates, particulièrement influents dans le Sud, d'un parti républicain résolument antiesclavagiste. Son chef, Abraham Lincoln, est un avocat obscur, mais ayant la parole facile et des idées très nettes. Comme une crise financière assez grave vient en plus jeter le désaccord parmi les démocrates, l'élection du président en 1860 amène au pouvoir le chef des républicains, avec seulement 38 % des voix.
2. Les États confédérés d'Amérique
Aussitôt (20 décembre 1860), la Caroline du Sud fait « sécession », bientôt suivie (janvier 1861) par le Mississippi, la Floride, l'Alabama, la Géorgie, le Texas et la Louisiane. S'organisant en États confédérés d'Amérique (Confederate States of America ou Confederacy), ces sept États sudistes – que rejoindront la Virginie, l'Arkansas, la Caroline du Nord et le Tennessee – élisent Jefferson Davis (1808-1899) comme président (9 février 1861) et installent leur capitale à Richmond, en Virginie, à 160 km au sud de Washington. Les États confédérés (au nombre de 11 sur les 34 que forment les États-Unis) n'ont que 9 millions d'habitants, dont 4 millions de Noirs, contre les 23 millions d'Américains des États du Nord, mais ils sont déterminés à éviter la ruine qu'entraînerait l'abolition de l'esclavage et paraissent sûrs de la victoire.
3. Préparatifs de guerre
La situation militaire des États-Unis est alors très différente de celle des pays européens. Leur armée – qui, à part l'expédition du Mexique (1846-1847), n'a eu affaire qu'aux Indiens – ne comprend que 18 000 hommes, dont 1 100 officiers. Le recrutement par État ne favorise guère son unité, et son rôle de pionnier ne la prédispose pas à des opérations d'envergure.
De part et d'autre, des armées sont improvisées. 2 millions d'hommes sont mobilisés en quatre ans par les nordistes, qui, à partir de 1863, auront constamment 900 000 hommes en campagne. Les sudistes compensent la faiblesse relative de leurs effectifs (850 000 hommes) par la qualité de leurs troupes. Des chefs de haute valeur (→ McClellan, Grant, Sherman chez les fédéraux ; Lee, Beauregard, Bragg, Forrest, Joseph Johnston et Jackson chez les sudistes) vont se révéler au cours de près de 2 000 combats.
4. Les opérations militaires
4.1. L'entrée en guerre
Les hostilités sont ouvertes par les sudistes, en avril 1861, à Fort Sumter qui couvre le port de Charleston (Caroline du Sud). Puis les forces du Sud, aux ordres des généraux P. G. Beauregard et J. E. Johnston, empruntant les voies ferrées assez nombreuses entre le Mississippi et la côte Est (55 000 km), se portent en direction de Washington. Le 21 juillet, à Bull Run, elles infligent une défaite aux fédéraux commandés par le général Irvin McDowell (1818-1885), qui est révoqué. Washington menacé, est mis aussitôt en état de défense ; les sudistes ne peuvent approcher, mais leur situation apparaîtrait pourtant assez favorable si le manque de marine ne constituait pas pour eux un grave handicap. La flotte nordiste, en effet, beaucoup plus puissante que celle du Sud, commence dès l'été 1861 un blocus des côtes sudistes dont l'effet s'accentuera d'année en année. Il interdira notamment tout approvisionnement en matériel de guerre à partir des pays étrangers, alors que les États du Nord peuvent acheter ce qu'ils veuvent où ils veulent. En outre, il leur sera possible de débarquer où bon leur semblera, et cette possibilité de manœuvre aura une influence déterminante sur la suite des opérations : ainsi, le débarquement effectué le 17 août 1861 près de La Nouvelle-Orléans constitue-t-il l'amorce de l'encerclement ultérieur des forces sudistes.
4.2. L'année 1862
Les opérations les plus importantes se déroulent autour des deux capitales, Washington et Richmond. Cette fois, ce sont les nordistes qui les déclenchent : G. B. McClellan, commandant de l'armée du Potomac, s'avance sur Richmond en traversant la baie de Chesapeake avec 80 000 hommes portés par des centaines de bâtiments qui les débarquent à Yorktown. Tandis que « Stonewall » Jackson (1824-1863), avec 15 000 confédérés, pousse sur Washington pour faire diversion, le général Robert E. Lee, au cours d'une bataille dite « des Sept Jours » (Steven Days Battles) livrée aux environs de Richmond (5 juin-1er juillet), contraint les forces de McClellan à se replier vers le nord. Avec 40 000 hommes, Lee pénètre ensuite dans le Maryland, mais est battu le 17 septembre à Antietam, à 70 km au nord de Washington, par les nordistes à Fredericksburg le 13 décembre.
Tandis que ces combats de fixation se livrent près des capitales débute dans l'Ouest une manœuvre de beaucoup plus grande envergure. Elle vise le Mississippi et ses affluents, qui étaient encore les grandes voies de pénétration vers l'ouest et où de nombreux bateaux entretenaient une intense activité économique. Aussi le 1er mai 1862, la prise de La Nouvelle-Orléans, verrou du fleuve vers la mer, par la flotte fédérale de l'amiral Farragut, suivie le 5 août par celle de Baton Rouge à 100 km au nord-ouest, amorce-t-elle l'encerclement des confédérés puisque, en même temps, plus au nord dans le Tennessee, le général nordiste Ulysses S. Grant bat leurs troupes près de Corinth le 29 mai. Le 6 juin, il s'empare de Memphis sur le Mississippi et avant la fin de l'année descend le fleuve jusqu'aux environs de Vicksburg, tandis que plusieurs débarquements nordistes sont effectués sur les côtes de Floride et de Géorgie.
À la fin de 1862, les progrès réalisés aussi bien dans l'armement que dans la tactique changent le visage de ce conflit. Le télégraphe comme les chemins de fer y sont pour la première fois largement employés. La troupe commence à être dotée de la carabine rayée (équipée d'un chargeur de 7 cartouches logées dans la crosse) et de la mitrailleuse, inventée par R. J. Gatling à Chicago. C'est cependant dans la marine que sont réalisés les progrès les plus spectaculaires : les bateaux, surtout ceux du Mississippi, sont bardés de plaques de fer. Cette guerre voit le premier combat singulier, qui oppose le 9 mars 1862 le cuirassé sudiste Merrimack à son homologue nordiste Monitor, exploit renouvelé deux ans plus tard par le supermonitor Manhattan, qui coulera le supermerrimack Tennessee le 5 août 1864.
4.3. En 1863
Pendant cette année, la guerre se déroulera sur deux fronts. Au nord-est, le général Lee, après sa victoire sur les nordistes à Chancellorsville le 4 mai, est battu par eux les 1er et 3 juillet à la très dure bataille de Gettysburg. C'est toutefois à l'ouest que se dessine la décision, sur les rives du Mississippi : après la chute de Vicksburg (4 juillet), les nordistes de Grant et ceux de l'amiral Farragut opèrent leur jonction à Port Hudson. Le contrôle du fleuve permet alors à Grant de revenir dans le Tennessee et de remporter le 25 novembre à Chattanooga une importante victoire sur les confédérés. C'est à ce moment que les États hésitants de l'Ouest, le Texas et la Louisiane, abandonnent la confédération.
4.4. 1864-1865 : la décision
À partir de 1864, la supériorité des forces fédérales, dont le général Grant est nommé commandant en chef, devient incontestable. Si les combats continuent dans les environs des deux capitales, c'est à l'ouest que la décision se précise. Elle est marquée d'abord par la capture de la flotte sudiste à Mobile le 5 août 1864 et surtout le fameux raid qu'effectue le général William T. Sherman, chargé par Grant de la conduite des opérations à l'ouest. Parti de Chattanooga au début de mai 1864, il arrive après quatre mois de marche et de combats à Atlanta, capitale de la Géorgie, où il livre le 2 septembre une très dure bataille aux sudistes. Vainqueur, il brûle la ville, puis, par une marche devenue célèbre (la « campagne de Savannah »), atteint l'Atlantique à 500 km de là, près de Savannah, le 22 décembre. Désormais, les États du Sud sont coupés en deux, et les possibiltés de résistance diminuent de jour en jour. Les généraux sudistes conservent toutefois un moral à toute épreuve, et Sherman est obligé de continuer la lutte. Il repart en janvier 1865 pour donner la main au général Grant, qui continue d'exercer une forte pression sur Lee dans le nord de la Virginie. Après s'être emparé de Columbia le 17 février et profitant de la chute de Charleston le 18, Sherman est vainqueur du général sudiste Johnston à Bentonville le 25 mars. Peu après, le général Grant battait Lee à Petersburg, près de Richmond, le 2 avril. Épuisés, encerclés, n'ayant plus aucun espoir d'un quelconque secours, les deux généraux sudistes sont contraints de capituler : Lee se rend à Appomattox Court House le 9 avril, Johnston le 26 à Durham.
5. Un combat moderne
La guerre, qui avait duré quatre ans, avait coûté 617 000 morts aux États-Unis, soit nettement plus que les deux guerres mondiales réunies. Elle avait, en outre, causé des dégâts considérables qui nécessitèrent une « reconstruction » longue et onéreuse. Dès 1865, toutefois, l'esclavage est officiellement aboli dans les États du Sud par un simple amendement de la Constitution.
Du point de vue militaire, cette guerre avait marqué un tournant important. Elle fut en effet menée par des masses d'homme qui firent leur instruction sur le terrain et non dans les casernes, ce qui les affranchira d'idées préconçues. En revanche, la volonté de vaincre porta le commandement à profiter très pragmatiquement de l'essor industriel et scientifique de cette époque (chemins de fer, télégraphe, cuirassés, torpilles, mines). Aussi ce combat qui avait commencé avec un armement et des principes de combat périmés, fera-t-il bientôt figure de campagne moderne. Conduite sur des théâtres d'opérations aux dimensions continentales, la guerre de Sécession sera considérée comme le premier conflit de l'ère industrielle.
Pour en savoir plus, voir l'article États-Unis : histoire.