Sur la nécessaire réduction du déficit public (6,5 % du PIB en 1996), R. Prodi est pris entre les propositions de son ministre de l'Économie, M. Ciampi (baisse des dépenses de santé et de retraites ainsi que baisse des transferts aux collectivités locales) et l'opposition de gauche à toute atteinte à l'État social, le leader de Rifondazione comunista, Fausto Bertinotti, menaçant de voter contre le gouvernement si ses exigences ne sont pas prises en compte.

Le projet de loi approuvé par le Conseil des ministres du 27 septembre est le résultat d'un compromis. M. Bertinotti obtient que les restrictions budgétaires de 50 000 milliards de lires ne touchent ni les retraites ni le secteur sanitaire. En échange, il accepte un impôt extraordinaire, progressif, une taxe européenne de 12 000 milliards de lires, des économies supplémentaires se fondant sur la réduction des gaspillages publics et des déductions fiscales, sur la diminution du budget des chemins de fer, des autoroutes et des subventions aux collectivités locales, ainsi que sur une répression plus sévère de la fraude fiscale. Le projet soulève de nombreuses critiques de la part des économistes, M. Dini lui-même ayant exprimé son scepticisme sur les résultats d'une loi de finances qui ne touche pas aux principaux responsables du déficit. Ces doutes sont, semble-t-il, partagés à l'étranger, comme le montrent les réflexions de Jacques Chirac sur les faibles chances italiennes de rejoindre la monnaie unique en 1999.

Quel avenir pour l'Ulivo ?

L'opposition ne manque pas, à la suite de cet accord, de présenter M. Prodi comme l'otage des communistes. Il semble bien que des motifs plus politiques qu'économiques aient dicté le choix du chef du gouvernement, qui n'a pas souhaité compenser la défection de certaines factions de sa majorité par l'apport de voix de l'opposition (les catholiques du CCD-CDU, par exemple). En trouvant un compromis avec Rifondazione comunista, il a voulu montrer la cohésion des forces qui le soutiennent, au risque de renforcer une extrême gauche qui pourra désormais se présenter comme le meilleur défenseur des retraités et des assurés sociaux.

La loi de finances est, à cet égard, un catalyseur des problèmes internes de l'Ulivo, tiraillé entre trois options différentes. Pour M. Prodi et Walter Veltroni (no 2 du gouvernement), la coalition devrait se transformer en une sorte de Parti démocrate à l'américaine. Selon Massimo D'Alema (PDS), il s'agit, pour l'ensemble des héritiers de la gauche historique italienne, de constituer une force sociale-démocrate ; d'où son rapprochement avec des personnalités socialistes comme Giuliano Amato ou l'adoucissement de ses jugements sur Bettino Craxi lui-même (l'ancien président du Conseil vit en exil pour échapper à la prison). Enfin, les centristes de l'Ulivo et du Pôle de la liberté continuent de rêver de la reconstitution en Italie, sinon de la Démocratie chrétienne, du moins d'un grand parti du centre dans lequel se reconnaîtrait, selon eux, la majorité des Italiens. Cette dernière hypothèse va à l'encontre de l'évolution du pays depuis 1992 et semble difficilement compatible avec le scrutin majoritaire.

Chrono. : 11/01, 16/02, 21/04, 12/05, 16/05, 20/05, 1/08, 15/09, 1/10, 14/11.

Geneviève Bibes