Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Finlande (suite)

La faiblesse de la Suède est responsable de la défection d’une partie de la noblesse finlandaise, qui songe à s’entendre avec la Russie. En 1788, imprudemment, Gustave III déclare la guerre à Catherine II. Il est battu, mais les paysans finlandais, outrés de la trahison des nobles, refusent une indépendance qui ne serait qu’une soumission déguisée à la Russie et manifestent leur loyalisme à l’égard de la Suède.


L’union avec la Russie (1809-1917)

Prise entre les exigences de la France et de l’Angleterre, la Suède déclare la guerre à Napoléon en 1805. En novembre 1807, le tsar Alexandre rompt avec l’Angleterre et propose à la Suède de s’allier à lui. Considérant que l’Angleterre reste son meilleur client, Gustave IV Adolphe (1792-1809) refuse la proposition russe, mais laisse sa frontière sans défense. Si bien qu’en février 1808 les troupes du tsar franchissent la frontière. Le pays est mal défendu par le général W. Mauritz Klingspor (1744-1814), qui abandonne la frontière sud ; malgré la résistance des paysans, les Russes envahissent tout le pays, occupent Åbo, la capitale, et s’emparent même des îles d’Åland. Un traître, Carl Olof Cronstedt, livre la forteresse de Sveaborg. Après la défaite suédoise d’Oravainen, le sort de la Finlande est réglé. Par le traité de Hamina (en suéd. Fredrikshamn), la Finlande et les îles d’Åland deviennent russes (17 sept. 1809).

La Finlande devient alors un grand-duché avec une certaine autonomie : Alexandre Ier réunit la diète finlandaise à Porvoo et lui communique un « acte d’assurance » ; tout en prenant le titre de grand-duc, le tsar reconnaît les privilèges de la Finlande, dont l’administration est confiée à un Sénat contrôlé par un Comité mixte des affaires finlandaises, qui garde l’usage du finnois et du suédois. En 1811, Alexandre redonne au grand-duché ses provinces orientales, dont la Russie s’est emparée au xviiie s., puis la capitale est transférée à Helsinki (siège du Sénat en 1812, capitale en 1829), plus proche des frontières de la Russie.

Après la mort d’Alexandre, en 1825, les difficultés de l’Union se font jour. La Finlande, comme le reste de l’Europe, est travaillée par le nationalisme. Le finnois s’impose de plus en plus aux dépens du suédois. Un érudit, Elias Lönnrot, recueille tout un ensemble de contes populaires transmis par tradition orale et les publie sous la forme d’un poème épique, le Kalevala, à partir de 1835.

Le pays se divise alors en fennomanes — dont le chef de file est le philosophe J. V. Snellman (1806-1881) — et en suédomanes. Contrairement à ce qui se passe en Pologne, le joug russe est relativement léger en Finlande, où est décrétée l’égalité des deux langues officielles, suédoise et finnoise ; de 1860 à 1877 est élaboré un système monétaire national, et l’armée finlandaise, qui s’était constituée en 1870, est officiellement reconnue par une loi de 1878. En même temps, l’industrie se développe, principalement celles du bois, du papier et du textile.

Pourtant, à partir du règne d’Alexandre III (1881-1894), la russification s’intensifie et, en 1891, le russe devient obligatoire dans la correspondance officielle. Nicolas II (1894-1917) fait mieux encore : il livre la Finlande au gouvernement arbitraire et dictatorial du général Nikolaï Ivanovitch Bobrikov ; l’armée finlandaise est absorbée, et le russe devient la seule langue administrative. Le pays n’est plus qu’une province de l’Empire russe. Mais favorisés par un bel essor économique, par un haut niveau de vie acquis au cours du xixe s., les Finlandais s’emploient à susciter un mouvement de résistance.

Bobrikov est assassiné en 1904, et le gouvernement tsariste, occupé par les troubles révolutionnaires dans son pays, est obligé de reculer. En 1906, le tsar octroie une nouvelle constitution avec un Parlement à chambre unique élue au suffrage universel ; les socialistes, cependant, ayant triomphé aux élections de 1907, le tsar revient bientôt à une politique d’oppression. C’est de nouveau le règne de l’arbitraire : dissolution de la Chambre, déportations en Sibérie, contraintes policières, langue russe obligatoire. Ces mesures renforcent la volonté de résistance, et, dès la déclaration de guerre en 1914, des corps de volontaires se forment en Allemagne.


L’indépendance et les guerres du xxe siècle

La révolution de 1917 favorise le retour des déportés finlandais de Sibérie. La Finlande redevient autonome, mais le pays se divise entre socialistes, qui forment la « garde rouge » et sont partisans de l’incorporation du pays à l’Union soviétique, et conservateurs, partisans de l’indépendance et qui constituent des gardes civiques.

Le président de la Chambre, Pehr Evind Svinhufvud (1861-1944), proclame alors l’indépendance (6 déc. 1917) ; Trotski la reconnaît en janvier 1918, mais il continue de fournir des armes à la garde rouge et aux bolchevistes, qui fomentent la révolution du 27 janvier 1918, tentant de donner au pays un régime soviétique. Alors, le gouvernement, réfugié à Vaasa, confie la garde civique à Carl Gustaf Emil Mannerheim*, qui, avec l’appui d’un corps expéditionnaire allemand de 13 000 hommes commandés par le général Rüdiger von der Goltz, reprend Helsinki et l’emporte au bout de cinq mois d’une lutte acharnée (fin mai - début avr. 1918). L’Allemagne tente alors de remplacer la Russie : la Chambre, conservatrice, offre même la couronne à un fils de Guillaume II, puis à son beau-frère, un prince de Hesse.

Cependant, après la défaite allemande, elle vote en juin 1919 une constitution républicaine : le suffrage universel des deux sexes et la représentation proportionnelle sont institués. Le président de la République est élu par le peuple, mais au suffrage indirect. Par le traité de Dorpat (auj. Tartou) [14 oct. 1920], les Soviétiques reconnaissent la nouvelle République. L’U. R. S. S. conserve la Carélie orientale, cédant toutefois un territoire arctique, Petsamo.

Le parti agrarien gouverne jusqu’en 1926, mais la lutte entre « blancs » et « rouges » se poursuit. La politique agraire favorise cependant les paysans : grâce à l’aide de l’État et aux lois d’octobre 1918 et de novembre 1922, une centaine de milliers d’entre eux deviennent propriétaires ; l’agriculture progresse, et la Finlande subvient presque entièrement à ses besoins alimentaires. C’est à cette époque également que s’implantent les fabriques de papier et de pâtes de bois les plus puissantes du monde. Elles assurent 20 p. 100 de la production mondiale de bois. Cette expansion industrielle est remarquable, puisque la production augmente de 160 p. 100 et le nombre d’ouvriers de 50 p. 100.