Prague

en tchèque Praha

Prague
Prague

Capitale de la République tchèque, en Bohême, sur la Vltava.

  • Population : 1 241 664 hab. (recensement de 2012)
  • Nom des habitants : Pragois

GÉOGRAPHIE

Prague est renommée pour la beauté de sa ville ancienne, sur les deux rives de la Vltava, avec les quartiers aristocratiques dominés par la colline de Hradčany, sur la rive gauche, Staré Město (la « Vieille Ville ») et Nové Město (la « Nouvelle Ville »), reliés par la place Venceslas, sur la rive droite. Prague est une traditionnelle métropole politique, commerciale et culturelle, mais l'industrie a aussi contribué à l'essor urbain. La métallurgie et les constructions mécaniques dominent (véhicules automobiles, matériel de chemin de fer, équipement minier, électrique, hydraulique, machines-outils, etc.), devant l'alimentation, le textile, la chimie, mais le secteur des services domine maintenant largement. Le tourisme, appuyé sur la renommée de la ville ancienne et du pont Charles, y est devenu très important.

PRAGUE VILLE HISTORIQUE

1. Origines

Prague se développe sur les deux rives de la Vltava, autour des deux châteaux des Přemyslides (→  le Hradčany et Vyšehrad), fixant près des passages guéables nombre de marchands et d'artisans (juifs, italiens et français, mais surtout allemands).

Ceux-ci, dès le xe siècle, font prospérer la ville, qui, érigée en évêché (973), devient la résidence des ducs de Bohême (1061-1140). Ces marchands jouissent d'une relative autonomie dès la seconde moitié du xie siècle, mais n'obtiennent l'admission de leur ville au rang de cité que grâce à Venceslas Ier, qui leur accorde le droit de Nuremberg (1232-1235). Cette « Vieille Ville » (Staré Město) fusionne avec une agglomération nouvelle créée par Eberhard, chancelier de Venceslas Ier, et est enceinte de murs (1253).

En 1257, pour éviter des conflits constants avec les habitants de la Vieille Ville, une nouvelle agglomération, Malá Strana ou « Petit Côté », est fondée par Přemysl Otakar II exclusivement pour les colons allemands, qui reçoivent le droit de Magdebourg et obtiennent le pouvoir de se constituer en commune autonome (1338).

2. Capitale d'empire

Très prospère au xive siècle, Prague est érigée en capitale d'Empire avec Charles IV (1346-1378), qui l'orne de nombreux édifices, y établit un archevêché (1344) et la dote d'une université (1348), foyer actif du nationalisme tchèque, renforcé d'ailleurs par la création d'une troisième ville neuve (Nové Město), peuplée de Tchèques grâce à la fusion des villages autour de Vyšehrad (1348).

Les conflits de nationalité, exacerbés pendant la guerre hussite, qui amène un moment la domination exclusive des Tchèques, reprennent sous Georges de Poděbrady. Cependant, la ville perd avec les Habsbourg son importance, après la révolte contre Ferdinand Ier (1547), qui transporte sa capitale à Vienne. La faveur de l'empereur Rodolphe II, qui réside à Prague (1583-1610), lui rend un moment son rôle international, mais détermine une nouvelle germanisation, qui provoque une rébellion ouverte (→ défenestration de Prague 23 mai 1618). La violente répression qui suit la bataille de la Montagne Blanche (1620) ramène la cité à un rang provincial.

3. xviie-xixe siècles

Mais, à la fin du xviie et au xviiie siècle, sous l'influence de la Contre-Réforme, Prague devient le grand centre de l'art baroque. Hradčany, ville royale depuis 1598, est érigée en quatrième cité, pourvue des mêmes droits que les trois premières (1756). Mais Joseph II unifie les quatre agglomérations en une seule commune (1784). Au xixe siècle, l'industrialisation entraîne un afflux de la population tchèque qui, à partir de 1861, domine la vie municipale.

4. Capitale fédérale

Après la proclamation de l'indépendance de la Tchécoslovaquie, le 28 octobre 1918, Prague devient la capitale du nouvel État. Occupée par les troupes allemandes le 15 mars 1939, la ville n'est libérée qu'en mai 1945. La fédéralisation de 1968 lui laisse le rôle de capitale fédérale (jusqu'à la partition de la Tchécoslovaquie en 1993).

Pour en savoir plus, voir les articles République tchèque : histoire, Tchécoslovaquie

PRAGUE VILLE D'ART

Prague était, dès le début du Moyen Âge, réputée comme une des plus belles villes d'Europe. Enrichie à l'époque baroque, elle reste aujourd'hui une cité d'un exceptionnel intérêt architectural.

Du Moyen Âge subsistent d'importants vestiges : maisons, fortifications, églises. Le sanctuaire le plus ancien est aujourd'hui englobé par l'ensemble du Hradčany, ville et château royal au sommet d'une colline qui domine la rive ouest de la rivière : c'est la basilique Saint-Georges, sévère construction romane en pierre, couverte d'un plafond et terminée par une abside en hémicycle encadrée de deux tours. Au centre du Hradčany se dresse le plus vaste édifice gothique de la ville, la cathédrale Saint-Guy, qui a succédé à une basilique du xiie s. Charles IV fonda la nouvelle cathédrale en faisant venir d'Avignon l'architecte Mathieu d'Arras (mort à Prague en 1352). Seul le chœur fut alors édifié. Les troubles que connut la Bohême entravèrent sans cesse la poursuite des travaux. Le célèbre architecte Peter Parler de Gmünd (1330-1399) y laissa sa marque, mais c'est surtout à la fin du Moyen Âge que l'église prit forme, en style flamboyant, pour n'être achevée qu'au xxe s. Elle contient de nombreuses œuvres d'art et abrite les mausolées royaux. L'art flamboyant déploie les audacieux dessins de ses branches d'ogives dans d'autres parties du château, telle la salle Ladislav.

Dans la vieille ville (Staré Město), sur la rive opposée, Notre-Dame de Týn (xive-xvie s. dresse les curieuses flèches très pointues de ses tours ; c'était jadis le principal sanctuaire des hussites. Non loin de là, sur une place bordée de maisons anciennes, s'élève l'hôtel de ville, à la riche décoration sculptée, célèbre par son horloge et sa fenêtre en encorbellement. Méritent aussi l'attention le cloître du monastère d'Emmaüs, décoré de peintures murales, le Carolinum, cœur de la vénérable université Charles, la tour Poudrière, qui faisait partie de l'enceinte fortifiée. Œuvre de Peter Parler, le pont Charles est le plus ancien de Prague. Sa longueur, plus de 500 m, la puissance et la beauté de ses arches lui ont vite assuré une renommée que la parure des grandes statues baroques dressées sur ses piles n'a fait qu'accroître.

La Renaissance a relativement peu contribué à l'embellissement de Prague, si ce n'est par la décoration des façades. La salle du Parlement de Bohême lui doit son aspect. Le Belvédère (au nord du Palais royal), casino de fête, atteste les progrès de l'italianisme avec son élégant portique à arcades ; cependant, la pente incurvée de son énorme toit lui donne une silhouette très originale. De la Renaissance date aussi la magnifique décoration à graffiti du palais Schwarzenberg, sur la place du Hradčany.

Cependant, c'est le baroque qui donne à Prague sa parure la plus originale et la plus grandiose, dans un xviie s. historiquement assez douloureux pour la Bohême assujettie. L'Empereur considère la ville comme sa seconde capitale, et le palais royal, sur le Hradčany, prend alors son aspect de ville haute. À ses pieds s'étend jusqu'à la rivière le fameux Malá Strana, où se dressent demeures princières et églises. Grand capitaine au service de l'Empire, Wallenstein se fait construire un véritable palais (Valdśtrejnský) avec un admirable jardin intérieur décoré de statues et un pavillon à arcades d'allure encore maniériste, la « sala terrena » à l'italienne. Dans tout le quartier se pressent de fastueuses résidences qui témoignent de la vigueur du génie baroque tout au long de deux siècles. Citons entre autres les palais Morzini, Thun, Fürstenberg, le palais des Prieurs, la maison Smiřický. Près du Hradčany, le palais de l'Archevêque, le Palais Toscan et le palais Sternberg (aujourd'hui galerie nationale) forment avec le palais Schwarzenberg, déjà cité, un ensemble grandiose, qui se prolonge par l'étonnant palais Černin, entrepris de 1668 à 1677 par Francesco Caratti, l'un des architectes d'origine italienne les plus actifs en Bohême à cette époque. L'immense façade à trente-neuf travées dresse sur un socle rustique un ordre colossal de colonnes engagées, symbole de la démesure et de l'italianisme du propriétaire, qui défiait ainsi l'Empereur lui-même. La façade postérieure présente des arcades ouvertes à la manière de la Villa Médicis à Rome. Au xviiie s., les grands maîtres viennois contribuèrent largement à cette parure de belles résidences : dans la vieille ville, c'est à Johann Bernhard Fischer von Erlach qu'est dû le palais Clam-Gallas, dont les escaliers s'envolent avec une virtuosité étourdissante. Le superbe palais Kinský est dû à la collaboration de Kilian Ignaz Dientzenhofer et d'Anselmo Lurago. Avec son corps central elliptique et ses ailes incurvées, le palais Lobkovic, au milieu de ses merveilleux jardins, offre la quintessence du baroque.

Dans le domaine de l'architecture religieuse, un architecte d'origine française, Jean-Baptiste Mathey, tenta, au xviie s., de contrecarrer l'hégémonie italienne. Son œuvre la plus significative à Prague (avec Saint-Joseph dans Malá Strana), l'église des Croisés, près du pont Charles, présente une coupole elliptique et une façade assez sobre. Le rôle principal, au xviiie s., fut dévolu aux Dientzenhofer, dont le père, Christoph, édifia pour les Jésuites une des églises baroques les plus originales de son temps, Saint-Nicolas (Svatý Mikuláš) dans Malá Strana. Tout est tension et mouvement dans les lignes et les espaces courbes, qui se combinent et se contrarient dans une luxuriance décorative à laquelle contribuèrent les meilleurs artistes d'alors. Fils de Christoph, Kilian Ignaz y ajouta la fière coupole qui domine tout le quartier. C'est la synthèse de l'art des grands maîtres viennois et de Guarino Guarini : celui-ci avait fait des projets pour la Bohême, que les Dientzenhofer développèrent avec brio. Kilian dota la pittoresque église du couvent Notre-Dame-de-Lorette d'une façade contrastée qui fait face au palais Černin et érigea dans la vieille ville une autre église Saint-Nicolas. Le nombre des églises, souvent petites, sièges de confréries ou de communautés, est considérable, comme la variété des plans et la recherche de la décoration, grâce à une pléiade d'artistes, peintres comme Karel Škréta (1610-1674) et Jan Kupecký (1667-1740), sculpteurs comme Mathias Braun (1684-1738) et les Brokoff (Jan [1652-1718] et Ferdinand Maximilián [1688-1731]), dont les grands groupes spectaculaires complètent la beauté du pont Charles et de tant de jardins qui entourent et relient les édifices, volontiers disposés en terrasses et créant des perspectives souvent grandioses ou féeriques.

Les siècles suivants n'ont rien donné de notable à la capitale bohémienne, ne l'ont pas défigurée non plus. Même dans les constructions bourgeoises du xixe s. se devine la tenace emprise du baroque malgré une offensive du néogothique romantique. Prague conserve fièrement les témoignages de son illustre passé, de son rang de capitale impériale et s'affirme comme le chef-d'œuvre de l'urbanisme baroque. Il faut enfin évoquer son pittoresque ghetto, avec ses synagogues et le curieux fouillis de tombes de son célèbre cimetière, ainsi que, dans la périphérie, l'église du monastère de Břevnov (C. Dientzenhofer) et le château de Troja (J.-B. Mathey), avec son escalier de façade peuplé de statues.