triton alpestre

Triton
Triton

Discret, et le plus souvent immobile, le triton aime vivre caché. Les comportements de ce petit amphibien, passionnant à observer, ne semblent pas avoir changé depuis l'époque où les vertébrés commencèrent à conquérir le milieu terrestre.

Introduction

La classe des amphibiens regroupe les vertébrés partiellement terrestres qui, faute d'une peau imperméable, sont confinés aux milieux humides. Ce sont les urodèles (aujourd'hui, ordre Caudata), tels que les tritons et les salamandres, qui conservent une queue toute leur vie et se distinguent ainsi des anoures, comme les grenouilles, les crapauds et les rainettes, qui perdent la leur à la métamorphose.

Il y a 350 millions d'années, le premier vertébré terrestre connu, Ichtyostega (très ancien ancêtre des tritons), qui était sans doute issu des crossoptérigiens ou des dipneustes, ces poissons pulmonés munis de nageoires, possédait déjà des pattes marcheuses et des poumons. À l'époque de la conquête de la Terre par les premiers vertébrés, le climat était de type tropical avec une alternance de saison sèche et pluvieuse, et les poissons vivant dans des marigots qui s'asséchaient périodiquement mouraient asphyxiés. En revanche, les animaux capables de respirer dans l'air grâce à leurs poumons et à leur peau survivaient dans la vase en attendant le retour de l'eau. Les plus avantagés étaient ceux qui pouvaient se traîner sur leurs « nageoires-pattes » jusqu'à un environnement aquatique plus favorable.

Chemin faisant, ces proto-amphibiens attrapaient de nombreux insectes qui, eux aussi, commençaient à coloniser le milieu terrestre. Au cours des millions d'années qui suivirent, ils s'adaptèrent un peu plus à la vie sur terre, mais, faute de pondre des œufs à coquille imperméable, ils durent retourner à l'eau pour se reproduire.

Ces premiers amphibiens ressemblaient à des crocodiles de deux mètres de longueur. Pendant ces millions d'années, ils dominèrent les forêts de fougères avant d'être concurrencés par les reptiles. On ne sait rien des relations entre les tritons et les formes fossiles de ces tout premiers amphibiens, mais il semble que les espèces primitives de tritons soient apparues il y a une vingtaine de millions d'années. Certaines espèces actuelles se seraient formées au cours des différentes glaciations que l'Europe a connues au quaternaire, d'autres auraient une origine plus ancienne. Aujourd'hui, les tritons se rencontrent dans les eaux lentes ou stagnantes de l'hémisphère Nord. Certains, comme le triton alpestre, Mesotriton alpestris (Triturus alpestris jusque dans les années 2000), vivent même jusqu'à 2 500 m d'altitude. Ils constituent, avec les salamandres, la famille des salamandridés.

La vie du triton alpestre

Des proies terrestres ou aquatiques

Venu du milieu aquatique, le triton ne s'éloigne que rarement de l'endroit qui l'a vu naître. Mais il passe une grande partie de son existence sur terre (de 2 à 8 ans). Il demeure dans des trous humides et obscurs et n'en sort que la nuit, lorsque l'humidité est suffisante et qu'il n'y a pas de vent.

Incapable de creuser, le triton affectionne les terriers de petits rongeurs ou d'autres minuscules mammifères, dans lesquels il trouve une hygrométrie à sa convenance et, souvent, de quoi se nourrir grâce aux nombreux petits invertébrés qui y séjournent. Quand la nourriture manque à l'intérieur, il tente des sorties, toujours nocturnes, et se met à la recherche de ses repas en utilisant surtout la vue et l'odorat.

À terre, lorsqu'il se nourrit de vers de terre, le triton flaire sa proie, la saisit dans ses mâchoires et, la maintenant de ses petites dents coniques, il la frotte contre le sol pour mieux l'ingérer.

Lorsqu'il se nourrit dans l'eau, le triton alpestre adulte recherche ses proies surtout près du fond, consommant vivants les petits invertébrés qui se trouvent aspirés par la dépression qu'il crée en ouvrant brusquement la bouche.

Selon les études de l'éco-éthologiste français Pierre Joly, ces proies sont surtout des invertébrés, notamment les larves et les nymphes de chironome (ver de vase) qui constituent jusqu'à la moitié des proies ingérées. Le reste se répartit entre de minuscules crustacés comme les daphnies et de petits insectes.

Avant d'avaler un ver de vase, le triton doit recentrer sa proie dans sa bouche : en aspirant de l'eau, il déplace latéralement la tête, puis il la dresse, bouche légèrement ouverte, pour entraîner le ver vers l'arrière. Il incline alors la tête, et ses yeux se rétractent dans la cavité buccale où, le palais n'existant pas, ils font saillie. Cet enfoncement des yeux et l'oscillation du plancher buccal, en faisant entrer et sortir l'eau, aident à la progression de la proie vers l'œsophage. Le triton répète cette opération plusieurs fois pour ingérer sa proie.

Des moyens de défense variés

Durant sa vie à terre, le triton est une proie facile pour de nombreux ennemis : putois, hérissons, campagnols, blaireaux ou chiens, mais aussi couleuvres et oiseaux. Pour se défendre, il adopte une posture caractéristique. Il cambre son corps et sa queue, pour exhiber la couleur orangée de son ventre, ce qui dissuade le prédateur de le manger. En effet, les glandes de la peau du triton sécrètent un venin qui irrite la gueule des animaux.

Une longue hibernation

Les tritons étant des vertébrés à sang froid, leur température suit celle du milieu extérieur. Dès que s'installe la saison froide, ils s'enfoncent progressivement dans le sol et demeurent ainsi à l'abri du gel. Cette hibernation, ou latence hivernale, peut, suivant les conditions climatiques, durer huit mois. En général, les tritons ne s'alimentent pas pendant cette période et vivent sur les réserves accumulées l'été. Cependant, des observations ont montré que, à des températures voisines de 1 ou 2 °C, certains tritons alpestres se déplacent dans les galeries et se nourrissent de vers de terre.

Une élégante danse nuptiale

Avec le retour des beaux jours, les tritons qui séjournaient à terre regagnent le milieu aquatique, même si parfois les mares vers lesquelles ils se dirigent sont encore partiellement gelées. Alors que les femelles restent moins colorées, les mâles ont acquis leur parure de noces. Ornés d'une crête dorsale et caudale, ils affichent une coloration plus vive. Durant les premiers temps de leur séjour aquatique, cette parure nuptiale s'achève et la peau se transforme : de rugueuse et presque sèche, elle devient fine et gluante, ce qui facilite la respiration.

Un contact visuel et olfactif

Depuis les années 1970, l'éthologiste britannique Tim Halliday a mis en évidence trois phases successives dans le comportement reproducteur des tritons.

Après avoir parcouru activement le fond de la mare à la recherche d'une femelle, le mâle la repère, la poursuit et se place devant elle. C'est la phase d'orientation au cours de laquelle le mâle peut détecter la femelle grâce à des molécules qu'elle émet dans l'eau, les phéromones, des sécrétions attractives.

Ainsi, le repérage se fait aussi bien de jour que de nuit ou si la visibilité est nulle dans la mare.

Toutefois, les stimulations visuelles demeurent importantes, il semble que les couleurs de la femelle jouent un rôle non négligeable dans le déclenchement du processus d'accouplement. Le zoologiste allemand Himstett a observé, en 1979, que des tritons mâles commençaient à parader en face de leurres présentant la coloration ventrale orange des femelles, alors qu'ils délaissaient le plus souvent les leurres ne possédant pas cette caractéristique. En fait, une fois que le contact visuel est établi, le triton semble vérifier par l'odorat qu'il a bien rencontré une femelle de son espèce.

Un ballet bien réglé

Au cours de la parade proprement dite, le mâle effectue alors des mouvements stéréotypés avec sa queue repliée le long du corps. Il la fait vibrer trois ou quatre fois par seconde pendant une période comprise entre une et cinq secondes, parfois plus. Cette séquence est répétée plusieurs fois. Les vibrations de la queue engendrent un flux d'eau chargé de phéromones émanant du cloaque du mâle, et qui se dirige vers le museau de la femelle.

La dernière phase commence quand le mâle stoppe les vibrations caudales et s'éloigne de la femelle en rampant. Les contacts physiques sont pratiquement inexistants entre les deux partenaires durant la parade nuptiale, excepté durant cette phase finale. La femelle suit le mâle dont elle touche la queue. Ce contact provoque le dépôt du spermatophore, sorte de capsule contenant les spermatozoïdes, sur la végétation ou le fond vaseux ; il arrive fréquemment que le mâle dépose un ou plusieurs spermatophores, même si la femelle ne l'a pas suivi.

Puis il se place perpendiculairement à la femelle qui avance et fait buter sa tête sur la queue du mâle, de nouveau repliée. À ce moment, le spermatophore se trouve au niveau du cloaque de la femelle sur lequel il se colle. Les spermatozoïdes peuvent alors remonter les voies génitales et la fécondation aura lieu.

Une activité fatigante

Les tritons consomment énormément d'énergie pendant toute cette période. Lorsqu'ils sont dans l'eau, ces animaux munis de poumons doivent remonter de temps en temps à la surface pour respirer. Mais une grande partie des échanges respiratoires se fait par la peau, les tritons prélevant ainsi l'oxygène dissous dans l'eau.

À l'époque de la reproduction, les modifications physiologiques des animaux engendrent le développement des crêtes, augmentant d'autant la surface cutanée. À cette saison, les tritons mâles peuvent donc rester plus longtemps sous l'eau.

Les larves naissent et grandissent dans l'eau

Une semaine environ après la fécondation, la femelle commence la ponte qui s'échelonne, chez le triton alpestre, pendant un mois, parfois davantage. Plus la femelle est grande et plus sa progéniture est nombreuse, mais elle pond, en moyenne, quelque 150 œufs qu'elle dépose un à un dans la végétation ou sur le fond.

Au moment de la ponte, la femelle sélectionne avec son museau (odorat) la plante sur laquelle elle déposera l'œuf. Elle adopte ensuite une posture plus ou moins verticale en s'agrippant par ses pattes antérieures à la feuille choisie. Avec des mouvements de ses pattes postérieures, elle plie la feuille qui est alors en contact avec son cloaque. Elle demeure parfaitement immobile pendant toute la descente de l'œuf dans l'oviducte, et, quand il arrive entre les bords repliés de la feuille, elle maintient le tout jusqu'à ce que la substance gélatineuse entourant l'œuf colle les deux bords. Après chaque opération, elle remonte respirer à la surface. La ponte dure de quatre à cinq minutes et demande un effort considérable à la femelle.

La vitesse de développement de l'embryon varie selon la température ambiante. À 22 °C, trois cents heures suffisent à l'embryon pour devenir larve, alors qu'à 10 °C de trois à cinq semaines sont nécessaires jusqu'à l'éclosion.

Plusieurs stades de développement larvaire

À l'éclosion, la larve ne possède ni membres ni tête bien différenciés. La couleur générale du corps est crème avec des rangées de pigments qui se répartissent sur le corps au cours du développement. Seuls les ébauches des branchies (trois paires) pour la respiration et les balanciers sont visibles. La jeune larve vit quelque temps sur ses réserves puis se nourrit de microscopiques organismes unicellulaires (infusoires). Elle recherche ensuite des animaux plus gros (petits crustacés, vers de vase). Si les vivres viennent à manquer, les plus grandes larves dévoreront les petites. Ce cannibalisme est fréquent lorsqu'il y a surpopulation.

Durant la phase de développement, progressivement, la tête s'individualise, les branchies deviennent filamenteuses, les pattes antérieures apparaissent. Puis de fines crêtes caudales transforment la queue en nageoire, et les pattes postérieures se développent. La larve possède alors sa morphologie définitive.

De la larve au triton adulte

À partir de ce stade, la larve entre dans sa phase de croissance, qui s'étale sur trois ou quatre mois en moyenne et se termine par la métamorphose. La larve devient alors un jeune triton de 35 à 45 mm de long, dont le mode de vie est terrestre.

Devenir adulte avec ou sans métamorphose

Après une période de vie larvaire aquatique, le jeune triton, pour devenir adulte, et terrestre, doit subir une métamorphose. Toutes les étapes de la croissance de l'animal sont étroitement liées aux conditions climatiques. Les températures basses et le manque de nourriture ont généralement pour conséquence une prolongation de l'état larvaire, appelée « néoténie partielle ».

Ainsi, en altitude, où la ponte débute très tard, parfois en août, et où le climat est rude et la nourriture peu abondante, le développement des œufs et des larves est fortement ralenti ; la taille atteinte au début de l'hiver est alors insuffisante pour la métamorphose. Les larves, obligées d'hiberner dans l'eau, ne pourront se métamorphoser qu'à la saison suivante, voire celle d'après. Ce phénomène est relativement fréquent dans toutes les régions montagneuses. Il est assez complexe puisque, dans certaines conditions, la prolongation de l'état larvaire s'accompagne de la reproduction.

Des tritons d'un type particulier

Dans le sud de l'Europe se rencontrent des populations de tritons alpestres dites « néoténiques », qui se composent de tritons adultes métamorphosés, de larves immatures et surtout de tritons néoténiques, reconnaissables aisément, car ces animaux adultes, sans s'être métamorphosés, ont conservé leurs branchies. La proportion de sujets néoténiques dans ces populations atteint, dans certains cas, plus de 90 %.

Ces tritons néoténiques vivent un peu comme les larves et se nourrissent en pleine eau, mais l'absence de métamorphose ne leur donne pas la possibilité d'aller séjourner à terre longtemps, et ils sont condamnés à passer leur vie entière en milieu aquatique.

Pour certains chercheurs, la néoténie serait le résultat de conditions écologiques particulières ; pour d'autres, il s'agirait d'un caractère héréditaire que les conditions du milieu environnant développeraient ou non.

Ainsi, certains tritons, à la suite de mutations, perdent la possibilité de se métamorphoser.

On a alors longtemps pensé que cette vie permanente en milieu aquatique pouvait être considérée comme une adaptation par voie de sélection naturelle des populations de tritons lorsque le milieu terrestre engendrait une forte mortalité parmi les animaux adultes. Mais, selon le biologiste français Michel Breuil, qui a étudié de nombreuses populations néoténiques depuis 1980 dans toute l'Europe, ces animaux vivant dans des eaux froides et profondes bénéficieraient de tous les niveaux de ces lacs pour se nourrir, ce que ne peuvent faire les tritons adultes métamorphosés, qui s'alimentent principalement sur le fond. En 1990, le zoologiste italien Franco Andreone a suggéré que cette vie aquatique permanente favoriserait une croissance rapide et l'acquisition d'une maturité sexuelle plus précoce.

La métamorphose

La métamorphose



La métamorphose est déclenchée par l'augmentation dans le sang d'une hormone : la thyroxine. Sa sécrétion est freinée par le froid et l'obscurité (néoténie). Chez le triton, la métamorphose correspond à un changement du milieu de vie, la larve aquatique devient un jeune terrestre. Elle perd alors ses branchies, l'ouverture buccale s'élargit, les yeux deviennent saillants. Les crêtes caudales disparaissent, la peau s'épaissit et devient un peu plus imperméable à l'eau. La coloration définitive apparaît. La respiration s'effectue par les poumons et par la peau.

Pour tout savoir sur le triton alpestre

Triton alpestre

(Mesotriton alpestris) auparavant Triturus alpestris,

Malgré un comportement discret, le triton alpestre est un animal aux couleurs plutôt contrastées. Son ventre est rouge-orangé et sa gorge peut être tachetée de noir. Le dos présente une coloration plus diversifiée qui varie, chez la femelle, du brun uniforme au bleu ou au vert marbré de brun avec, séparant le dos du ventre, une bande bleue parsemée quelquefois de petites taches. Chez le mâle, une bande bleu ciel et une bande blanche maculée de brun délimitent les bleus plus ou moins soutenus du dos. Ces couleurs deviennent plus ternes durant la phase terrestre.

Le triton alpestre naît dans l'eau mais vit également à terre. Ses adaptations au milieu terrestre ne lui permettent toutefois pas de vivre dans un environnement déshydratant, car sa peau sans écailles est fine et peu kératinisée ; elle contient des glandes à mucus qui l'humidifient et favorisent ainsi la respiration cutanée. Elle produit également un venin qui rend l'animal immangeable pour certains prédateurs. Lors de son arrivée à terre, cette peau s'épaissit et devient un peu imperméable.

Le triton alpestre est de taille moyenne : sa longueur n'excède pas 10 cm pour les mâles et 12 cm pour les femelles. Sa tête est aplatie avec des yeux en position très latérale. La langue est protractile.

Un triton, à l'inverse des mammifères, grandit toute sa vie. Sa croissance est très rapide au début puis se ralentit. Comme tous les urodèles, il conserve sa queue après la métamorphose. La maturité sexuelle dépend étroitement des conditions climatiques et de la quantité de nourriture disponible ; elle peut survenir au cours du troisième printemps, mais, à plus de 2 000 m d'altitude, elle a lieu la cinquième ou la sixième année.

Les mues sont régulières. Pour se débarrasser de son ancienne peau formée des cellules mortes, le triton frotte sa tête sur des aspérités du milieu. La peau se détache au niveau des commissures de la bouche et, progressivement, elle est retournée comme un doigt de gant puis repoussée vers l'arrière. Passé les pattes postérieures, lorsqu'elle se trouve au niveau de la queue, le triton la saisit avec sa mâchoire et tire dessus. Il finit le plus souvent par l'avaler.

Le mécanisme de la respiration chez le triton est assez particulier, car la prise d'oxygène s'effectue à plusieurs niveaux. Le triton respire par ses branchies durant la vie larvaire. Dans l'eau ou à terre, les échanges respiratoires par la peau sont très importants ; il utilise aussi ses poumons : le plancher buccal s'abaisse et l'air, aspiré par la dépression, entre par les narines qui s'ouvrent en avant de la bouche (sans palais). Après quelques cycles de ce type de respiration dite « buccopharyngée », les narines se ferment et la glotte s'ouvre ; l'air est alors chassé par la remontée du plancher buccal vers les poumons et oxygène le sang ; celui-ci est propulsé par un cœur à deux oreillettes et un ventricule. Le sang oxygéné se mélange dans le ventricule au sang partiellement oxygéné et riche en dioxyde de carbone. Cette circulation amène un rendement énergétique faible.

Ne pouvant conserver le peu de chaleur produite, le triton est conditionné par la température extérieure. En dessous de 0 °C, il gèle et meurt si le froid persiste. En montagne, il se montre encore actif dans l'eau vers 0 °C.

Dix sous-espèces

Mesotriton  alpestris alpestris, dans le nord de la France, en Allemagne, au Benelux, en Pologne, Autriche, Suisse, Hongrie, République tchèque et péninsule balkanique ;

M. alpestris cyreni, dans les monts cantabriques en Espagne ;

M. alpestris apuanus, en Italie du Nord et dans les monts Apennins; et M. alpestris inexpectatus, en Calabre ;

M. alpestris veluchiensis, en Grèce centrale ;

M. alpestris reiseri, en Bosnie-Herzégovine, souvent néoténique et M. alpestris lacusnigri, en Slovénie, sont très typées ;

M. alpestris piperianus, M. alpestris sedardus (néoténique) et M. alpestris montenegrinus (néoténique) au Monténégro.

          

TRITON ALPESTRE

Nom (genre, espèce) :

Mesotriton alpestris

Famille :

Salamandridés

Ordre :

Caudata (ou Urodèles)

Classe :

Amphibiens

Identification :

Face ventrale orange ; face dorsale bleue, marron, verdâtre et plus ou moins marbrée

Taille :

De 7 à 10 cm (mâle) ; de 7,5 à 12 cm (femelle). Les tritons d'altitude sont plus grands que les tritons de plaine

Répartition :

Europe centrale et méridionale : du Danemark (Jutland) jusqu'en Grèce ; grande partie de la France excepté sud-ouest et sud ; nord-ouest de l'Espagne et Italie du nord

Habitat :

Grande diversité d'eaux douces stagnantes, du lac de montagne à l'ornière forestière, depuis le niveau de la mer jusqu'à 2 500 m d'altitude

Régime alimentaire :

Invertébrés. À terre : vers ; dans l'eau : crustacés, vers de vase, mollusques, insectes

Structure sociale :

Solitaire

Maturité sexuelle :

À partir de 3 ans, parfois à 6 ans

Saison de ponte :

À partir de mars en plaine ; jusqu'à la fin août en altitude

Nombre d'œufs par ponte :

De 40 à 150 œufs, selon la taille de la femelle ; larve de 8 à 10 mm à l'éclosion (de 10 j à 1 mois après la ponte)

Longévité :

10 ans dans la nature, 15 ans en captivité

Effectifs :

En régression à la suite de la destruction des milieux aquatiques et de l'alevinage des lacs de montagne

Statut :

Espèce protégée par les législations nationales, inscrite à l'annexe III de la Convention de Berne comme tous les amphibiens. Menacée au Danemark, en Autriche, au Benelux et en Grèce. Devenue rare en Hongrie et en Bulgarie. La sous-espèce espagnole M.a. cyreni est vulnérable

 

Signes particuliers

Yeux

Le triton détecte ses proies uniquement lorsqu'elles se déplacent ; il n'a pas une vision binoculaire. Ses yeux, globuleux, ont une pupille circulaire et sont munis de paupières. Leur accommodation se fait par une déformation du cristallin et un déplacement du globe oculaire dans l'orbite grâce à des muscles spécialisés. Lorsque les yeux sont fermés, ils rentrent dans la tête et font saillie dans la bouche, aucune paroi osseuse ne protégeant celle-ci. Les yeux aident ainsi à la déglutition.

Narines

Situées en avant de la bouche, elles permettent à l'eau et à l'air d'entrer. Les narines internes, ou choanes, sont tapissées d'un épithélium olfactif qui analyse les odeurs.

Peau

Les glandes de la peau du triton excrètent un venin composé d'une molécule très proche de la tétraodotoxine. Ces sécrétions cutanées toxiques que l'animal libère lorsqu'il est avalé par un prédateur - mammifère ou oiseau - engendrent une irritation de la gueule de ce dernier. Par ailleurs, la peau nue du triton paraît rugueuse à l'air, mais plus fine et plus lisse en phase aquatique.

Crête

Semblable à un simple bourrelet dorsal durant l'année, la crête dorsale n'existe pas chez la femelle. Elle est le signe distinctif du mâle en période de reproduction. De 1 à 2 mm de haut, elle est de couleur blanc jaunâtre maculé de noir et commence en arrière de la tête pour se prolonger sur toute la longueur du dos jusqu'à la queue. La crête jouerait un rôle durant la parade nuptiale.

Dents

Petites, pointues, courbées vers l'arrière, les dents du triton sont soudées aux os et se renouvellent régulièrement au cours de la vie de l'animal. Elles garnissent les mâchoires inférieure et supérieure mais aussi certains os formant le plafond de la cavité buccale : ces dernières dents, dites « dents voméro-palatines », forment deux arcs.

Pattes

Les pattes postérieures sont munies de cinq orteils et les pattes antérieures ne possèdent que 4 doigts. Elles soutiennent le corps de l'animal lors des déplacements à terre mais sont étalées de chaque côté du corps quand le triton repose sur le ventre.

Les autres tritons

Les tritons appartiennent, avec les salamandres, à l'une des dix familles composant l'ordre Caudata ou des urodèles, la famille des salamandridés. Celle-ci comportait traditionnellement une quinzaine de genres mais des études moléculaires ont entraîné des reclassements et elle en contient désormais vingt dont quatre genres de  « vraies salamandres » (Chioglossa, Lyciasalamandra, Mertensiella et Salamandra) 1 genre à la position phylogénétique incertaine (Salamandrina) et quinze genres de tritons : Calotriton (deux espèces) ; Cynops (huit espèces asiatiques, en Chine et au Japon, pour la plupart) ; Echinotriton (deux espèces japonaise et chinoise de « tritons crocodiles » ) ; Euproctus (deux espèces : l'Euprocte sarde et l'Euprocte corse) ; Neurergus (quatre espèces asiatiques, en Turquie, Iran, Irak, au Kurdistan) ; Notophthalmus (trois espèces d'Amérique du Nord, États-Unis surtout) ; Pachytriton (deux espèces chinoises) ; Paramesotriton (sept espèces asiatiques en Chine et en Asie du Sud-est) ; Pleurodeles (trois espèces de pleurodèles en Espagne et en Afrique du Nord) ; Taricha (quatre espèces aux États-Unis) ; Tylototriton (huit espèces asiatiques en Chine et en Asie du Sud-est). Enfin, le genre Triturus comptait traditionnellement  treize espèces pour la plupart européennes. Des études génétiques récentes (2006) ont montré que le groupe n'était pas homogène. Il comprend depuis les genres Triturus stricto sensu (six espèces de grande taille), Lissotriton (cinq espèces de petite taille), Mesotriton (une espèce : le triton alpestre, Mesotriton alpestris) et Ommatotriton (deux espèces : O.vittatus et O.ophryticus). Tous les tritons ont des larves aquatiques et certains (Pachytriton) sont strictement aquatiques, même à l'âge adulte. Les autres genres sont largement terrestres à l'état adulte, mais tous doivent regagner l'eau pour se reproduire. Les tritons des genres Cynops, Neurergus, Paramesotriton, Pachytriton et Triturus se différencient des autres genres de salamandridés par l'absence d'accouplement. Outre le triton alpestre, les principales espèces européennes sont les suivantes.

Triton commun (Lissotriton vulgaris)

Identification : 11 cm de long ; mâle plus grand que la femelle ; dos brunâtre, ventre orange plus ou moins foncé avec des taches. En période de noces, crête dorso-caudale de taille et de forme variées. Orteils garnis de franges.

Répartition : eaux ensoleillées riches en végétation, en milieux ouverts. Eurasie, depuis l'Oural et le centre de la Scandinavie ; plaines d'Europe centrale, jusqu'à 2 000 m dans le Sud. C'est la seule espèce de triton présente en Irlande.

Comportement : tendance à la néoténie dans la péninsule des Balkans.

Triton italien (Lissotriton italicus)

Identification : taille inférieure à 7,5 cm ; pas de crête dorsale ni de franges aux orteils chez le mâle.

Répartition : il fréquente les eaux calmes, du niveau de la mer jusqu'à 1 700 m d'altitude ; sud de l'Italie. Seul triton rencontré de 0 à 600 m en Calabre, peut-être en raison d'une meilleure résistance à la sécheresse.

Triton de Bosca (Lissotriton boscai)

Identification : taille moyenne (10 cm) ; dos brun jaunâtre ; ventre parcouru par une bande médiane tachetée allant du jaune au rouge.

Répartition : eaux claires ; moitié ouest de la péninsule Ibérique.

Comportement : phase terrestre assez courte, voire inexistante.

Triton de Montandon (Lissotriton montandoni)

Identification : taille moyenne (10 cm) ; dos brun plus ou moins olivâtre ; ventre uni, jaune à orangé. La femelle ressemble un peu à celle du triton alpestre. En période de rut, le mâle ne possède pas de crête dorsale.

Répartition : eaux limpides et froides, en moyenne altitude (de 500 à 1 990 m). Présent dans les Tatras, les Carpates et les Alpes de Transylvanie.

Triton palmé (Lissotriton helveticus)

Identification : de petite taille, mais le triton d'altitude est plus grand que celui de plaine ; dos brun-beige, ventre jaune. Femelle très semblable à celle du triton commun. En période de reproduction, le mâle possède des pattes postérieures palmées, des bourrelets dorso-latéraux et un filament caudal pouvant atteindre 10 mm.

Répartition : espèce subatlantique, milieux aquatiques très divers d'Europe occidentale, de la tourbière acide de plaine au lac oligotrophe, entourés plutôt par des zones forestières ; jusqu'à 2 250 m.

Comportement : la néoténie est fréquente sur le causse du Larzac.

Tritons crêtés

Triton crêté septentrional ou Grand triton crêté (Triturus cristatus)

Triton crêté italien (Triturus carnifex)

Triton crêté du Danube (Triturus dobrogicus)

Triton crêté méridional ou des Balkans (Triturus karelinii)

Identification : grande taille ; femelle jusqu'à 20 cm. Chez le mâle en période de rut, crête dorso-caudale en dents de scie de 1,5 cm de hauteur, voire davantage. Queue marquée d'une bande latérale blanc argenté ; dos de brunâtre à grisâtre avec des taches foncées de dimension variable ; ventre jaune-orangé avec des taches noires plus ou moins étendues.

Répartition : étendues d'eau ensoleillées, riches en végétation, de profondeur variable mais d'assez grande dimension et situées sur un substrat argileux. Toujours en milieux ouverts. Ensemble de l'Europe, jusqu'à plus de 1 800 m dans le Sud. Péninsule des Balkans, Italie.

Statut : Triturus dobrogicus (Autriche, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Hongrie, Moldavie, Roumanie, République tchèque, Serbie, Slovaquie et Ukraine) a été classé par l'UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) dans la catégorie « quasi menacé » en 2006.

Tritons marbrés

Triton marbré (Triturus marmoratus)

Triton marbré pygmée (Triturus pygmaeus)

Identification :  peut dépasser 17 cm ; dos vert marbré de brun ; ventre gris plus ou moins foncé moucheté de blanc. Chez la femelle et les jeunes, ligne vertébrale orange. En période de rut, crête blanc jaunâtre rayée de brun, de 1,5 cm de haut chez le mâle.

Répartition et statut : forêts, mares et tourbières jusqu'à 1 950 m d'altitude. Ouest de la France jusque dans le nord de l'Espagne ; plus au sud, en Espagne et au Portugal, Triturus marmoratus est remplacé par Triturus pygmaeus qui a été classé par l'UICN dans la catégorie « quasi menacé » en 2006. En Espagne, dans des milieux plus ouverts.

Comportement : l'espèce est plutôt terrestre, vivant en forêt et se reproduisant dans les mares et les tourbières souvent en compagnie du triton palmé.

L'espèce peut s'hybrider avec le triton crêté et donner un hybride viable, le triton de Blasius, car les tritons marbré et crêté dérivent d'une souche commune.

Tritons à bandes

Triton à bandes méridional (Ommatotriton vittatus)

Triton à bandes septentrional (Ommatotriton ophryticus)

Identification : de 10 à 16 cm ; dos du vert olive au bronze, avec des taches ; ventre orangé à rouge. Chez le mâle en rut, bande latérale blanche délimitée par deux bandelettes noires et une crête élevée et dentée.

Répartition : en plaine jusqu'à 800 m (Proche-Orient) ; mares temporaires riches en crustacés et ruisseaux lents, jusqu'à 2 700 m d'altitude (Caucase). Nord de la Turquie, Caucase et Proche-Orient.

Milieu naturel et écologie

Le triton alpestre est une espèce européenne qui partage son existence entre le milieu aquatique et le milieu terrestre. Sa grande tolérance écologique rend compte de sa large distribution géographique. L'espèce n'est pas inféodée à la seule chaîne alpine mais se trouve dans quasiment toute l'Europe, du niveau de la mer jusqu'à 2 500 m d'altitude parfois.

Le triton alpestre est assez indifférent à la nature du milieu aquatique où il se reproduit : en plaine, il fréquente aussi bien les mares, forestières ou non, que les abreuvoirs ou les ornières.

En plaine, la métamorphose s'achève l'année de la ponte et le jeune quitte l'eau pour le milieu terrestre où il effectue sa croissance. Il y demeurera jusqu'à sa maturité sexuelle, vers l'âge de 3 ou 4 ans. Les adultes, quant à eux, rejoignent la terre après la reproduction, à partir de juin, pour ne retourner à l'eau que vers le mois de mars.

Très répandu dans les régions de collines, le triton alpestre se rencontre aussi en Europe centrale, dans des étendues d'eau situées au-dessus de la limite des arbres. Dans le sud de l'Europe, c'est surtout une espèce de montagne qui se trouve rarement en dessous de 1 000 m d'altitude. Lorsqu'il colonise le milieu montagnard, le triton alpestre se reproduit aussi bien dans des retenues d'eau temporaires de quelques mètres carrés que dans des lacs riches en oxygène et pauvres en matières organiques (oligotrophes), de 1 km2 de surface et de 20 m de profondeur.

Lorsque les mares gèlent entièrement, l'hibernation des adultes se fait à terre, en compagnie des jeunes. Dès le dégel, entre la fin des mois de juin et de juillet, les adultes repartent vers l'élément liquide jusqu'en août-septembre. Lorsque le milieu aquatique est un lac oligotrophe profond qui ne risque pas de geler sur toute sa profondeur, les adultes hibernent dans l'eau et se reproduisent dès le dégel. Les températures en montagne, avec des gelées qui peuvent durer huit mois, provoquent un ralentissement du développement des larves ; leur hibernation est donc un phénomène classique.

Dans les milieux de montagne, le développement des larves peut être interrompu par une hibernation aquatique (néoténie partielle). À la métamorphose, les jeunes sont ainsi plus grands que ceux des plaines, ce qui augmente leurs chances de survie en milieu terrestre. Dans certains lacs froids de la péninsule des Balkans et du sud des Alpes, la métamorphose est parfois complètement supprimée et les tritons se reproduisent en conservant leurs branchies. Ils se nourrissent alors à tous les niveaux de la colonne d'eau.

Un développement lié aux conditions climatiques

La vie à terre n'est pas une période facile pour les tritons. Mal armés contre la déshydratation et le gel, ils se réfugient dans les cavités du sol et y trouvent leur nourriture. Incapables de creuser un sol compact, ils sont tributaires des abris existants et, faute de s'être bien isolés du froid, ils sont parfois victimes du gel.

En étudiant les tritons alpestres du parc national des Écrins, de 1983 à 1986, Michel Breuil a montré que leur biologie était très influencée par les conditions ambiantes. Ainsi, dans les milieux aquatiques instables de moyenne altitude, la maturité sexuelle est acquise environ deux ans plus tôt que dans les lacs oligotrophes situés à plus de 2 000 m. En revanche, l'espérance de vie est de deux à trois ans inférieure à celle, estimée, des tritons d'altitude, qui atteignent une taille nettement supérieure. Cependant il semblerait que, dans les Alpes, certains tritons alpestres adultes ne se reproduisent qu'une année sur deux.

Ce cycle biennal est peut-être dû à la lenteur de la croissance des animaux en montagne où la nourriture est parfois trop peu abondante en milieu terrestre pour permettre la production des gamètes dans l'année. Dans ces milieux où les proies sont rares, les tritons alpestres montrent un comportement alimentaire particulier que l'on n'observe pas à basse altitude : ils capturent les différents invertébrés terrestres tombés dans l'eau alors qu'habituellement ils se nourrissent sur le fond. Une telle activité à basse altitude, comme le fait remarquer l'éco-éthologiste français Pierre Joly, les exposerait à certains prédateurs, notamment les oiseaux.

De nombreux prédateurs

En règle générale, le triton alpestre est consommé par des couleuvres, des oiseaux aquatiques tels que les échassiers et les canards, et des poissons, truites, saumons, brochets, mais aussi par des carpes, des tanches et des épinoches.

Victime également des insectes carnassiers comme les coléoptères (dytiques), le triton doit éviter aussi ses congénères, car le cannibalisme est courant chez l'espèce, surtout parmi les larves.

Le triton et l'homme

Un animal « protégé » qui disparaît peu à peu

Les activités humaines sont aujourd'hui une des causes principales de la disparition du triton. Le saccage de son environnement, la pollution, l'alevinage sont catastrophiques pour cet animal qui, bien qu'il soit totalement protégé dans la plupart des pays européens, risque bientôt de ne peupler que... nos légendes !

Un animal discret dans les légendes

À l'opposé de la salamandre, qui s'est retrouvée immortalisée dans les armoiries de François Ier, les tritons n'ont pas donné naissance à un grand nombre de légendes et de fables. Autrefois, on prêtait à la salamandre la capacité de nourrir et d'éteindre le feu. Cette croyance pourrait s'expliquer par le fait que ces animaux se cachent parfois dans les arbres humides et creux ; une bûche provenant de ce type d'arbre pouvait, en effet, entraîner la mort du feu... On lui attribuait aussi le pouvoir de brûler les yeux à distance, ce que contesta la science moderne jusqu'en 1989, année où des naturalistes américains photographièrent une salamandre noir et jaune qui éjectait son venin cutané.

L'aspect particulier des tritons néoténiques est sans doute à l'origine du rapprochement de l'animal avec les dragons dans les légendes grecques et balkaniques. Ainsi, en Grèce, deux lacs, qui abritent des populations de tritons alpestres néoténiques, s'appellent Dracolimni, lac des Dragons. Au Monténégro, une sorte de monstre à deux têtes du folklore local, le bukumir, a donné son nom à un lac où vivent des tritons alpestres néoténiques qui peuvent se transformer en tritons métamorphosés et présenter ainsi deux têtes successives.

Enfin, Triton, fils de Poséidon, le dieu grec des Océans, et d'Amphitrite, est souvent représenté avec une queue de poisson mais ornée d'une crête comme celle des tritons. Ses descendants, les Tritons, formaient avec les Néréides le cortège de Poséidon. Le palais de ce dieu vénéré des marins fut situé du côté de la Libye, dans le lac Tritonis...

D'innombrables facteurs de destruction

La destruction par l'homme de son environnement, aussi bien aquatique que terrestre, est la principale cause de disparition du triton. Le naturaliste belge G.H. Parent a établi une liste des facteurs de la raréfaction du triton alpestre : assèchement des points d'eau (mares, tourbières, marais, ornières, carrières...) pour des besoins agricoles ou pollution de ceux-ci par des dépôts sauvages d'immondices ou de polluants divers ; « aménagement » de certains points d'eau en zone de loisirs avec des cimentages de berges, l'introduction de canards, de cygnes, de poissons. L'apport de poissons est toujours nuisible aux tritons. La carpe, en broutant la végétation aquatique, détruit les œufs. Les épinoches, en avalant les larves, empêchent le renouvellement de l'espèce. En montagne, truites et saumons de fontaine se nourrissent de tritons de toute taille. Ces introductions, d'une pratique courante dans la péninsule des Balkans, ont provoqué la disparition de populations particulièrement originales de tritons alpestres néoténiques. La situation est identique dans toute l'Europe et en France, où des alevinages sauvages et destructeurs sont encouragés par les pêcheurs. Dans certains pays d'Europe centrale, le triton alpestre constitue même un excellent vif pour la pêche. Dans les stations de sports d'hiver, les sources alimentant les mares sont captées afin de fournir de l'eau aux canons à neige.

Avec le surpâturage qui provoque une dégradation du sol aux alentours des points d'eau, l'érosion entraîne les mottes de terre vers le bas de la pente et le niveau d'eau diminue. Cet assèchement précoce est incompatible avec la durée de la vie larvaire des tritons, qui se déroule dans l'eau.

Autre facteur de destruction, le ramassage de spécimens par les terrariophiles et les collectionneurs dont les prélèvements ont fragilisé certaines populations particulièrement remarquables des Balkans, d'Italie et d'Espagne.

Pourtant, tous les tritons sont intégralement protégés dans la plupart des pays d'Europe. En France, il est interdit de les toucher, de les ramasser, de les transporter et de les détenir chez soi sans autorisation du ministère de l'Environnement. Les euproctes et six espèces de tritons des genres Triturus, Lissotritonet Calotriton sont inscrits à l'annexe II de la Convention de Berne (espèces strictement protégées), les autres de même que tous les amphibiens figurant à l'annexe III.