réel, symbolique, imaginaire

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».

Psychanalyse

Ternaire lacanien qui définit les moments de l'ontogenèse du psychisme humain, les rapports prévalents au monde qu'ils déterminent et les liens, inextricablement noués comme les trois anneaux du nœud borroméen, qui se tissent entre eux.

La fascination de l'infans pour / par son reflet dans le miroir(1) – sous le regard de la mère – est le prototype de la relation imaginaire. L'image au miroir, ou celle de tout autre – alter ego – en qui il se reconnaît, à qui il s'identifie, offre au nourrisson l'image-mirage, jubilatoire, d'une coordination et d'une autonomie qui lui font défaut (prématuration). Ce leurre, narcissique, est « formateur de la fonction du je », définie comme méconnaissance et aliénation. Cette image statufiée que j'aime, ce n'est pas moi, je la hais : la relation imaginaire, spéculaire et duelle, est ambivalente, agressive-érotique.

L'intrusion d'un tiers – le père, le langage, la Loi – défait cette relation, préœdipienne, à la mère. Le père, semper incertus, en est le garant en tant qu'il n'est rien, si ce n'est une fonction instituée par la loi et le contrat, un nom – le Nom-du-Père, métaphore paternelle et signifiant de la Loi(2). L'avènement de l'ordre symbolique, postœdipien, se confond avec l'instauration du langage qui, comme structure, préexiste à la venue du sujet. Le langage est meurtrier de la chose : l'élaboration de l'ambivalence est rendue possible, l'existence du temps et son irréversibilité sont reconnues, la voie du désir, qui ne se soutient que du manque, s'ouvre.

Quand la réalité n'est qu'une construction fantasmatique, imaginaire, « le réel, c'est l'impossible » – l'indicible, l'inarticulable –, ce qui ne se laisse saisir ni dans les lacets de la parole, ni dans les rets du regard. L'hallucination du doigt coupé par l'homme aux loups en est un exemple, et le modèle de la forclusion (Verwerfung, « rejet »), qui est une « abolition symbolique »(3). Ce qui n'a pu être élaboré dans, et par, le langage revient du dehors, comme hallucination : ce qui est forclos du symbolique fait retour dans le réel.

La tripartition lacanienne, structurale et pédagogique, méconnaît la référence centrale chez Freud, par-delà le langage sur lequel Lacan insiste, au corps et au biologique, indispensable tant à la notion de pulsion qu'au point de vue dynamique – qui intéressent peu Lacan et sa réduction idéaliste de la psychanalyse.

Christian Michel

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Lacan, J., « Le stade du miroir comme formateur de la fonction du je », in Écrits, Seuil, Paris, 1966, pp. 93-100.
  • 2 ↑ Lacan, J., « D'une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », ibid., pp. 555-556.
  • 3 ↑ Lacan, J., « Réponse au commentaire de Jean Hyppolite sur la “Verneinung” de Freud », ibid., p. 386.

→ forclusion, identification, moi, névrose, psychose et perversion, rejet