André Thevet
Moine cordelier et voyageur français (Angoulême 1503 ou 1504-Paris 1592).
Fils de paysans, André Thevet effectue ses études chez les cordeliers de l'ordre de saint François d'Assise d'abord, puis à l'université de Poitiers, et devient le secrétaire du cardinal d'Amboise, archevêque de Rouen, grâce auquel, sans doute, il effectue ses premiers voyages – en Espagne et au Portugal – au début des années 1540. On le retrouve ensuite en Italie. À Rome, il fait la connaissance de François Rabelais, avec lequel il se lie. En 1549 et 1550, il parcourt la Méditerranée, séjourne à Candie, Constantinople, Alexandrie, au Caire ; il accomplit un pèlerinage à Jérusalem et, de là, va à Damas ainsi qu'à Tripoli avant de revenir enfin à Marseille, puis à Paris. La relation de ces voyages paraît en 1554 sous le titre de Cosmographie du Levant.
En 1550-1551, il accompagne au Brésil le capitaine Guillaume Le Testu. Cette expérience lui vaut sans doute d'être désigné par Henri II, en 1555, comme aumônier de l'expédition dirigée par Nicolas Durand de Villegagnon. Chevalier de Malte et navigateur accompli, ce dernier est chargé par le roi de créer un établissement français dans la baie de Rio. L'expédition, qui comprend deux bateaux, quitte Dieppe le 14 août et arrive six mois plus tard sur la côte brésilienne. Dans l'île marécageuse de Ganabra, Villegagnon fonde la colonie de la France antarctique, dont l'existence sera éphémère.
Esprit curieux et ouvert, la plume facile, André Thevet n'arrête pas de prendre des notes ou de dessiner. Durant le voyage en mer, il observe attentivement les divers poissons ou autres animaux marins – marsouins, requins, bonites, dorades, poissons-volants – et recueille les récits des marins concernant des animaux comme le rhinocéros ou le serpentaire de l'île de Madagascar. Une fois au Brésil, il s'intéresse aussi bien aux « sauvages » qui vivent dans la région qu'à la faune et à la flore.
Il collectionne les objets rares ou curieux : les pierres, les coquillages, les squelettes, dents ou peaux d'animaux, les vêtements et chapeaux de plumes qui le fascinent, les poteries, les bijoux et autres objets confectionnés par les Amérindiens.
Lorsqu'une épidémie de peste contraint André Thevet à regagner la France en 1556, il rapporte avec lui tout ce qu'il a recueilli. Ces objets constitueront, avec d'autres cadeaux faits au roi par des voyageurs de l'époque, le « Cabinet de curiosités royal », sorte de petit musée dont il se voit confier la garde. Il rapporte également les graines d'une plante aux vertus singulières qu'il est le premier à cultiver en France : le tabac, dont Jean Nicot ne fera la promotion que plusieurs années plus tard.
Nommé cosmographe du roi avant la mort de Henri II, André Thevet écrit une Cosmographie universelle, première encyclopédie moderne dans laquelle il ajoute aux observations réunies par lui lors de ses voyages une foule de renseignements géographiques et historiques pris un peu partout et souvent quelque peu fantaisistes. Cependant, il y combat énergiquement un certain nombre de croyances héritées du Moyen Âge, dont celles touchant les animaux fabuleux : sirènes, serpents ailés, salamandres, licornes...
À partir de 1585, André Thevet travaille à un ouvrage qui ne sera jamais imprimé, le Grand Insulaire, description des îles habitées et inhabitées. Avant de s'éteindre à Paris en 1592, il écrit encore le récit de ses Deux Voyages en Terres australes et occidentales et la Description de plusieurs îles, un abrégé de l'Insulaire.
Un grand reporter
Un grand reporter
André Thevet est l'un des premiers voyageurs européens à avoir pris contact à la fois avec l'Afrique et avec l'Amérique. Dans ses récits, il se comporte en grand reporter et en observateur avisé. Il décrit avec fidélité et minutie tout ce qu'il a vu. Son ouvrage les Singularités de la France antarctique, paru en 1558, est accueilli avec enthousiasme, même si, par la suite, ses détracteurs l'accusent contre toute vraisemblance de n'avoir jamais mis les pieds en Amérique du Sud. L'ouvrage est orné de quarante et une gravures dont onze relatives à la flore et dix à la faune. Dues pour la plupart à des Flamands qui travaillent d'après les dessins de l'auteur, ce sont de véritables œuvres d'art, mais elles ont généralement un caractère trop rudimentaire pour permettre des déterminations précises d'espèces en ce qui concerne les animaux représentés. On doit pourtant à André Thevet la première description de divers animaux américains dont le tapir, l'opossum et l'aï, ou paresseux, qu'il appelle haüt. Ce dernier, qu'il a longuement observé, l'a particulièrement frappé car il ne l'a jamais vu manger, d'où sa conclusion que cette étrange bête devait se nourrir de vent.