Louis-René Des Forêts

Écrivain français (Paris 1918-Paris 2000).

Dès ses premiers romans (les Mendiants, 1943 ; le Bavard, 1946), qui lui vaudront l'intérêt de Georges Bataille et de Maurice Blanchot, il s'accorde à cette frange secrète et vive de l'écrit où s'éprouve un rapport fasciné au langage, s'exaltent ses pouvoirs (« Le récit, chez Des Forêts, se présente d'abord comme une manifestation d'éloquence », B. Pingaud), où l'immersion passionnelle et angoissée dans ses ruses, ses ratés et ses manques est le véritable point de la fiction, jouant dramatiquement avec son impossibilité. Il s'enfonce ensuite dans un mutisme qui est presque un abandon d'écrire : ne viennent en effet le briser qu'un recueil de récits (la Chambre des enfants, 1960) et un bref volume (les Mégères de la mer, 1967) qui renoue, sur le terrain poétique, avec le lyrisme du premier roman, et qui, exposant une métrique virtuose, souligne le lien décisif que son auteur entretient avec la musique. Comme chez Gerard Manley Hopkins, dont il a partiellement traduit la correspondance (1976), l'alliance de l'« extraordinaire profusion lyrique » et de la « plus subtile concision » fonde prioritairement la beauté (« pouvoir exprimer par une concentration de plus en plus grande des éléments rythmiques la scansion de l'être »). À ce degré d'intensité, la beauté fait plus que toucher aux rives du silence : elle y trouve son paramètre essentiel. Prise par le rêve de tout saisir du langage (de tout « ramasser » en lui), l'œuvre en arrive à considérer la rétention du langage comme le vrai visage de la maîtrise (Ostinato, 1977).