nouveau réalisme

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Depuis Marcel Duchamp, le " Ready Made " (objet manufacturé) est tombé dans le domaine public, et le concept de la création résidant dans la seule responsabilité du choix de l'artiste est entré dans les mœurs. Vers 1960, maints artistes travaillaient dans cette voie ; aussi le critique d'art Pierre Restany eut-il l'idée de les réunir et de publier le premier Manifeste du Nouveau Réalisme, le 14 avril 1960, à Milan. Le groupe est officiellement constitué le 27 octobre de la même année. Il comprend Arman, Dufrêne, Hains, Villeglé, Klein, Raysse, Spoerri, Tinguely, Rotella et César. Les deux premières manifestations collectives eurent lieu en novembre-décembre 1960 au Festival d'avant-garde de Paris, et, en mai 1961, à la gal. J. sous le titre " Quarante Degrés au-dessus de Dada ". Les nouveaux réalistes se sont manifestés, par la suite et à plusieurs reprises, en juin 1961 à Stockholm, en juillet 1961 à Nice. À Paris, ils participent en 1961 et 1962 au Salon Comparaisons, qui leur réserve une salle spéciale, ainsi qu'aux expositions Paris-New York (juill. 1961, gal. Rive droite) et Donner à voir I (juin 1962, gal. Creuze). Plusieurs artistes se sont ultérieurement joints au groupe : Niki de Saint-Phalle, Deschamps, enfin Christo. À l'instant même où il accorde une valeur esthétique au simple choix, le Nouveau Réalisme refuse toute transposition, toute adaptation à un langage, tout style.

Le style est dans la réalité brute, dans la rue. Le Nouveau Réalisme est en effet un art de citadin. C'est l'omniprésence de certains éléments de la vie urbaine — affiches, palissades, terrains vagues, détritus, voitures, sigles de la circulation — qui a déterminé ce que Restany a baptisé " la poésie d'une civilisation urbaine ".

Cette attitude interfère naturellement avec celle du pop art américain, qui, lui aussi, est né de la concentration urbaine. Ayant acquis une incontestable autorité et attiré adhésions multiples autant que critiques acerbes, le Nouveau Réalisme, grâce à l'autorité de Pierre Restany, qui en codifia le caractère spécifique par des textes d'une grande lucidité et d'une passion convaincante, fut accueilli dans plusieurs musées d'art moderne : La Haye, Vienne, Berlin, Bruxelles. Son existence effective s'est amenuisée au fur et à mesure que certains de ses membres acquéraient une notoriété personnelle : César, Arman, Christo et Raysse en particulier.

La mort d'Yves Klein en 1962 ébranla sérieusement l'autonomie d'un groupe qui fut, très vite, absorbé par la mode. Le mouvement fut dissous en 1970 à Milan (lieu de sa création en 1960). S'il apporta une certaine " hygiène de la vision ", pour reprendre un terme adopté par Martial Raysse, il fut, également, l'un des ferments les plus corrosifs de l'art de cette époque.