Moses Van Wttenbroeck ou Moses Van Uttenbroeck ou Moses Van Uyttenbroeck

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Peintre néerlandais (La Haye [ ?] v.  1600  – id. [ ?] av.  1647).

" Le petit Moïse ", comme on l'appelle souvent dans les textes anciens, entra en 1620 à la gilde de La Haye et en devint doyen en 1627, puis de nouveau membre en 1638. Ses œuvres s'échelonnent entre 1615 (date d'une très malhabile gravure) et 1644 (Deux Nymphes, jadis chez un marchand de Düsseldorf). Il est possible, mais non certain, qu'il ait fait le voyage en Italie, sa connaissance de l'œuvre d'Elsheimer pouvant aussi bien reposer sur le truchement de Goudt que sur une fréquentation personnelle du milieu romain. Il exécuta quelques grandes décorations mythologiques commandées par Frederik-Hendrik, notamment pour le château d'Honsholredijck (commandes payées en 1638, d'autres de 1641 à 1646), mais elles sont pour la plupart perdues depuis la destruction du château en 1815 (il en subsiste au moins un exemple au pavillon de chasse de Grünewald, près de Berlin, daté de 1642). Son œuvre se compose essentiellement de tableaux de cabinet à sujets mythologiques — quelques-uns tirés aussi de l'Ancien Testament — avec un important élément de paysage arcadien ; ainsi, Wttenbroeck ressortit autant à la peinture d'histoire de Lastman, Moyaert et Pynas — il montre la même vigueur dramatique, un peu vulgaire et typiquement septentrionale — qu'au paysage " idéal " et arcadien cher aux italianisants comme Poelenburgh ou Breenbergh. Dans le choix de ses sujets, il affiche une caractéristique prédilection pour les Métamorphoses d'Ovide et les thèmes bacchiques ; d'ailleurs, chez lui, la mythologie garde une singulière présence et n'est pas exempte d'accents moralisateurs et volontiers ironiques. On notera en particulier chez ses personnages une insistance à regarder le spectateur en face et à le prendre à témoin pour accentuer encore l'effet d'immédiateté recherché par l'artiste, mais aussi un côté étrange qui nous pique très vivement à l'heure actuelle. Dans la facture précise et appuyée — notamment le rendu quasi métallique et découpé du feuillé et la graphie capricieuse des troncs d'arbres (Mercure, Argus et Io, Paris, Inst. néerlandais) —, dans le choix de sites accidentés aux rochers escarpés, dans le coloris où l'emportent des verts durs et des bruns sombres et fermes, dans la netteté de l'organisation du tableau aux masses fortement accentuées et clairement séparées et balancées, dans le dessin tranché des silhouettes nues et claires sur un fond sombre, se retrouverait la même insistance un peu pesante mais efficace et témoignant d'une forte originalité, authentiquement nationale. Au cours de ses dernières années, cependant, Wttenbroeck assouplit un peu ses effets et se rapproche plus nettement du monde délicatement poétique de Poelenburgh. Bien représenté dans les musées allemands (Augsbourg, Juno, Argus et Io [1625] ; Brunswick, Triomphe de Bacchus [1627], Thésée chez Acheloüs ; Düsseldorf, Bergers [2 pendants] ; Kassel, Triomphe de Bacchus, Jugement de Pâris ; Nuremberg, Mercure, Argus et Io ; Osnabrück, Nymphes [2 pendants]), collectionné en France (le président de Robien possédait une œuvre de lui), il figure encore, avec de bons exemplaires, au Rijksmuseum (Nymphe et faune), au Mauritshuis (Scène biblique [ ?], 1625), au musée de Rennes (un beau Paysage de 1629 ou 1639 [ ?]), à Utrecht (université : Salmacis et Hermaphrodite, 1627) ainsi qu'à l'Ermitage (Mort d'Eurydice, Triomphe de Bacchus [1625], Silène sur un âne).

Wttenbroeck fut également un graveur très original : plus de 60 pièces qui représentent, soit des paysages avec des allusions bibliques, rejoignant l'inspiration de Hercules Pietersz Seghers et de Willem Qietersz Buytewech, soit des sujets bibliques, traités d'une manière forte, presque agressive, qui rappelle curieusement la façon de Titien (Agar et l'Ange, Marie-Madeleine).