Lambert Sustris
dit Lambert d'Amsterdam
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre néerlandais (Amsterdam 1515/1520 – Venise 1568).
Formé à Utrecht ou à Haarlem dans l'entourage de Van Scorel ou de Maerten Van Heemskerck, il partit très tôt, mais à une date indéterminée, pour l'Italie. Il est possible qu'il faille l'identifier avec le Lam. Amster dont le nom apparaît gravé à côté de ceux de Heermskerck et de Postma à la grotta nera de la Domus Aurea, mais le séjour romain que cette identification supposerait demeure hypothétique. Il dut gagner Venise dès avant 1540 et y fréquenta immédiatement l'atelier de Titien. On a proposé de reconnaître son intervention dans le paysage de la Présentation au Temple de ce maître (v. 1538, Venise, Accademia). L'influence de la Vénus d'Urbin (Offices) de Titien est flagrante dans sa Vénus couchée (v. 1538-1543, Amsterdam, Rijksmuseum). Entre 1543 et 1548, Lambert Sustris apparaît dans plusieurs documents padouans. Vasari fait état du décor de la villa Pellegrini, entre Chioggia et Monselice, où Sustris aurait collaboré avec Gualtieri et Schiavone ; et on a récemment reconnu sa main dans les fresques de la villa Vescovile de Lurigliano di Torreglia, près de Padoue, où sa conception du décor, mêlant de vastes paysages à des architectures peintes, anticipent sur les créations de Véronèse vers 1560. De cette période padouane date aussi la Vierge en trône avec saint Jérôme et saint Antoine (Padoue, S. M. in Vanzo) qui s'inspire de la Pala de Pesano de Titien. En 1548, Sustris accompagne Titien à la diète d'Augsbourg ; il y peint, sur le modèle de Charles Quint assis de son maître, le Portrait de Wilhem IV von Waldburg-Trauchburg (Munich, Bayerische Staatsgemäldesammlung) ; en 1552, ; il retourne à Augsbourg et multiplie les portraits : Erhard II Vöhlin von Frickenhausen (1552, Cologne, WRM), Hans Christoff et Veronika Vöhlin (1552, Munich, Alte Pin.). Il noue des relations avec des mécènes germaniques dont les armoiries se retrouvent sur plusieurs compositions religieuses peintes soit à Augsbourg même, soit dès le retour à Venise : pour Otto Truchsess von Waldburg, dont il fait le portrait (1553, château de Zeil), il peint le Baptême du Christ (musée de Caen) ; pour le Freiherr Fugger von Kirchberg, un Noli me tangere (musée de Lille). Ces œuvres témoignent clairement de la séduction exercée sur Sustris par Titien comme de son inclination à peindre de vastes paysages traités librement dans une palette claire. L'évolution stylistique de Sustris est difficile à dégager faute d'œuvres précisément datées. À son vénétianisme fondamental s'est mêlée une importante influence du Maniérisme émilien (Parmesan, Niccolo dell' Abate) qui marque, probablement assez tôt le Paysage avec Jupiter et Io (Ermitage) longtemps attribué à Andrea Schiavone, et qui n'a cessé de s'affirmer en même temps que l'exemple de Tintoret a pris le pas sur celui de Titien : le Bain de Vénus (Vienne, K. M.), Vénus et l'Amour attendant Mars (Louvre), Vénus et Vulcain (Munich, Alte Pin.), Diane et Actéon (Oxford, Christ Church College) témoignent de ce maniérisme raffiné et composite où la tradition septentrionale s'efface au profit d'un italianisme radical et maîtrisé. On ignore à quelle date mourut Sustris et son activité tardive est par conséquent sujette à caution. Son identification probable avec " Alberto de Ollanda " (mentionné dans les archives vénitiennes entre 1572 et 1591), sur la foi de signature " Alberto " portée sur la Montée au calvaire (Milan, Brera), impliquerait qu'il peignit à la fin de sa vie de nombreux portraits de notables vénitiens, dans un style nettement dépendant de la manière de Tintoret (Giac. Foscarini, Venise, musée de l'Arsenal ; Giac. Emo, Venise, palais Ducal).
Il forma son fils Friedrich (Padoue [ ?] v. 1540 – Munich 1599) , qui fut aussi graveur et architecte. De 1563 à 1567, celui-ci vit en Italie, notamment à Florence, où il est l'élève et le collaborateur de Vasari (1564). Appelé à Augsbourg par le banquier Hans Függer, il y reste de 1565 à 1569. Il entre en 1573 au service du duc Guillaume V et s'installe en 1580 à Munich, où il est nommé architecte en chef de la Cour. Il jouera, jusqu'à sa mort, un rôle de premier plan auprès de Guillaume V. On lui attribue quelques peintures, comme la Chambre d'une accouchée (Florence, Pitti), les deux tableaux de l'Histoire de Darius (Munich, château de Schleissheim) ou bien l'Adoration des bergers (château de Compiègne), dont le style se rapproche de celui de Hans von Aachen.