Anne et Patrick Poirier
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Artistes français (Anne [Marseille 1941]) et (Patrick [Nantes 1942]).
Pour Anne et Patrick Poirier, le classique voyage à Rome qui, depuis la Renaissance, a immanquablement marqué tous les créateurs, a constitué le fondement de leur œuvre sur le modèle d'une pratique archéologique. Depuis leur séjour à la villa Médicis à Rome, de 1967 à 1971, Anne et Patrick Poirier sont immergés dans la culture gréco-latine, dont ils recueillent les traces à l'aide de dessins, de textes, de photographies et de sculptures. Mais, en évoquant leur travail comme " une suite d'errances " où paysages réels et paysages oniriques se mêlent, ils le situent d'emblée dans l'ordre de la fiction. Qu'il s'agisse d'Ostia antica (1970-1972), de la Domus aurea (1975-1978), de la Villa Adriana (1977-1980), la chronologie et la topographie des lieux sont respectées et rigoureusement consignées à l'aide de notes et de croquis sur des sortes de carnets de fouilles qui ne sont pas véritablement destinés à compléter le savoir des archéologues. Si la démarche d'Anne et de Patrick Poirier vise à révéler la part de fiction que comporte toute enquête archéologique, elle suscite essentiellement l'apparition des symboles et des fantasmes que toute réminiscence de l'Antiquité fait renaître.
La dimension historique, chez les Poirier, se confond toujours avec celle du mythe. Les empereurs romains Néron et Hadrien sont des personnages légendaires à l'égal des héros et des demi-dieux. À partir de 1982, Anne et Patrick Poirier délaissent la forme des maquettes et celle des livres pour développer, à travers le thème de la gigantomachie, l'installation de pièces architecturales.
De tels projets, à l'allure de décors de théâtre, travaillés avec des matériaux nobles, la pierre et le marbre taillés, le bronze, donnent naissance à des espaces savamment scénographiés. Les artistes abordent le monumentalisme des bâtisseurs des civilisations anciennes, mayas ou indiennes. Ils créent en 1983, dans la chapelle de la Salpêtrière de Paris, un environnement " Architecture et Mythologie ", évoquant les épisodes de Jupiter contre les Géants. L'œuvre a pris des accents maniéristes. Le thème du regard et du reflet avec les figures de Méduse et de Persée, celui du songe avec la légende de Pégase, dominent les pièces récentes. Ce regard conduit le spectateur à découvrir une ville-musée-bibliothèque avec Ouranopolis, nom tiré d'une ancienne cité grecque : un immense anneau suspendu permet, à travers les œilletons, de découvrir des espaces qui tiennent à la fois des architectes visionnaires et de la science-fiction (Paris, gal. Thaddeus Ropac, 1996). Le musée de Picardie (Amiens) a présenté une exposition en 1996.