musique feinte

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

1. Traduction littérale du latin musica ficta (« musique imaginée »), ainsi nommée du fait que les altérations écrites n'y correspondent pas obligatoirement à celles qui devaient être exécutées, et qui devaient être « imaginées » en fonction d'un code compliqué. La musica ficta découle du fait que la solmisation, forme ancienne du solfège, avait été conçue au xie siècle pour résoudre les problèmes d'altération posés par la mobilité du si (→ BÉCARRE) dans une musique qui ne connaissait pas d'autre altération que le si bémol. Lorsque intervinrent d'autres altérations (du fa dièse, xiiie s., à la totalité, fin xvie s.), on ne sut pas adapter le système aux nouvelles nécessités, et l'on s'appliqua à tout ramener aux données initiales devenues inadaptées, moyennant des règles de plus en plus complexes que les musicologues modernes ne sont pas encore parvenus à traduire avec clarté. Il semble du reste acquis que, même pour les contemporains, ces règles étaient loin d'être toujours nettes et laissaient souvent place à des divergences d'interprétation. C'est pourquoi, jusqu'à l'abolition de la musique feinte (dont il subsiste des vestiges jusqu'à la fin du xviie siècle), la lecture des altérations dans l'écriture sur portées comporte toujours une part variable d'incertitude, qu'ignore par contre la notation par tablature. Nous pratiquons encore nous-mêmes inconsciemment le principe de la musique feinte lorsque, contre toute logique, nous solfions une note altérée en énonçant le seul nom de la note naturelle et en sous-entendant (« imaginant ») l'altération non énoncée.

2. Nom jadis donné aux touches noires (autrefois blanches) du clavier d'orgue ou de clavecin.