Henri Fouques-Duparc, dit Henri Duparc
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».
Compositeur français (Paris 1848 – Mont-de-Marsan 1933).
Il fit ses études au collège des jésuites de Vaugirard où César Franck enseignait la musique. Ses premières œuvres demeurèrent inédites (sonate pour violoncelle, quelques mélodies), mais, dès 1870, il écrivit l'Invitation au voyage, chef-d'œuvre qui inaugurait l'ère parnassienne de la mélodie française. Une période de douze ans s'ouvre alors pendant laquelle il participa à la vie artistique militante. C'est chez lui notamment que Saint-Saëns et Romain Bussine fondèrent la Société nationale, dont il fut longtemps secrétaire. Jusqu'en 1884, il poursuivit régulièrement, mais très lentement, son œuvre, faite de mélodies et d'incursions dans le domaine orchestral, parmi lesquelles Lénore (1875), qui consacra son nom dans la vie musicale officielle. Une maladie nerveuse l'obligea alors à quitter Paris et le priva de son activité créatrice. Pendant les cinquante années qui lui restaient à vivre, il assista, en pleine lucidité, à la paralysie de son talent.
Musicien cultivé, grand admirateur de Wagner et du romantisme germanique, Duparc n'a jamais réalisé l'œuvre dont il rêvait et dont les formes idéales auraient été la grande pièce symphonique et le drame lyrique. Aux étoiles et Lénore ne se dégagent qu'imparfaitement des influences consenties et le projet d'une Roussalka (d'après Pouchkine), auquel il travailla pendant plus de dix ans, n'aboutit qu'à la destruction des esquisses. En revanche, son mince recueil de mélodies contient quelques-unes des plus précieuses réussites de la musique française. Synthèse de la romance et du lied, le poème lyrique qui naît ainsi, et spécialement en marge de textes de qualité (Baudelaire, Leconte de Lisle, Th. Gautier, Jean Lahor), marque un moment décisif de l'évolution du genre, entre Gounod, Fauré (contemporain de Duparc) et Debussy. Dès la Chanson triste (1868) et surtout l'Invitation au voyage (1870), la fidélité à la forme strophique va de pair avec la franchise des modulations et le raffinement qui s'exerce à prolonger les images du verbe. Extase, plus ou moins volontairement écrite « en style de Tristan », emploie en même temps des enchaînements typiquement franckistes. Pour la première fois, cette œuvre assigne à la couleur harmonique une équivalence sonore avec l'image poétique, alors que Sérénade florentine sollicite du mode hypophrygien (mi plagal) une fluidité que le rythme syncopé ponctue avec une extrême douceur. Phidylé (1882) et la Vie antérieure (1884), sa dernière mélodie, attestent enfin l'expression définitive et originale du poème chanté capable de traduire musicalement la pensée et le sens du texte. Les accompagnements pour piano, souvent conçus en des phrases très larges et toujours très travaillés, présentent de grandes difficultés d'exécution. La plupart d'entre eux ont été orchestrés par le compositeur.
Si Duparc, par le climat douloureux ou violent dans lequel il se complaît, se rattache au second romantisme propre aux disciples de César Franck, il dépasse tous ceux-ci par la noblesse de sa pensée, la profondeur de son inspiration, sa puissance évocatrice. Sans qu'on puisse vraiment discerner une influence directe, il est certain que sa conception de la mélodie a été, pour Gabriel Fauré, un exemple précieux.