courants radical et populiste

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Le courant radical en Russie tire son origine de la pensée « occidentaliste » et se réclame de Herzen et, surtout, de Nikolaï Tchernychevski (1828-1889) : continuateur de Bielinski, celui-ci pose les fondements d'un art utilitaire, dont il donne lui-même un exemple dans un roman à thèse (Que faire ? 1863), qui sera la bible de la jeunesse révolutionnaire. C'est Nikolaï Dobrolioubov (1836-1865) qui tire les conséquences littéraires de ces théories : ses articles de critique sont autant de prétextes à l'évocation de problèmes sociaux. Dmitri Pissarev (1840-1868) va encore plus loin puisqu'il préconise la destruction de l'esthétique. Sa cible favorite est Pouchkine, type même du styliste qui prépare « une génération de parasites ». Lorsque la génération des années 1860, celle des « nihilistes », cède la place à celle des années 1880, celle des populistes, le chef de file de cette littérature engagée devient le critique Nikolaï Mikhaïlovski (1842-1904), qui fait de la littérature un instrument de propagande auprès des paysans ; les romanciers populistes ont une mission sociale et doivent élever leur art et leur pensée au niveau des besoins du peuple. G. Ouspenski est un des écrivains les plus représentatifs de ce courant, mais on peut citer aussi Nikolaï Zlatovratski (1845-1911), qui loue les vertus collectives de la communauté paysanne contre les intérêts capitalistes (les Jours du village, 1879), Alexandre Ertel (1855-1908), qui peint la vie rurale et citadine de la Russie et évoque la démocratisation de l'intelligentsia (les Gardénine, 1889 ; la Relève, 1891). Les genres de prédilection de ce courant sont le roman journalistique, les esquisses ethnographiques ou sociologiques, les scènes de la vie populaire construites autour d'un conflit social et non psychologique. La littérature populiste a aussi influencé des écrivains qui ne se rattachent pas directement à ce courant, comme Dmitri Mamine-Sibiriak (1852-1912), auteur de romans sur la vie misérable des mineurs de l'Oural ou des « bourlaki », les haleurs de bateau de la Volga.