cinéroman

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Genre très en vogue dans l'entre-deux-guerres, le cinéroman consiste dans l'adaptation romanesque d'un film, illustrée de ses photos. Un auteur de mélodrames, Pierre Decourcelle, crée en 1915 le premier cinéroman (ou roman-cinéma) : les Mystères de New York, adapté du film de L. Gasnier. Son texte paraît en feuilleton dans le quotidien le Matin. Cette parution précède, puis accompagne, la projection des épisodes du film dans les salles. L'auteur donne des titres racoleurs à ses chapitres : Le portrait qui tue, Sang pour Sang, le Baiser mortel... Ce succès incite les grands quotidiens à imiter le Matin, puis à publier des feuilletons originaux (Belphégor...) ou des adaptations de chefs-d'œuvre de la littérature populaire portés à l'écran (Roger-la-Honte, la Pocharde...) et oblige presque tous les éditeurs à créer des collections. Gallimard lance son luxueux Cinéma romanesque auquel collaborent des célébrités. La prestigieuse revue l'Illustration a sa collection dont les photos, déjà en héliogravure, sont excellentes. La plupart des publications sont plus modestes et pauvrement illustrées : leur format moyen n'excède pas 18 נ27 cm pour 16 pages vendues à prix modique.

Né du cinéma, le cinéroman a largement contribué à l'essor du 7e art. Tourné à partir d'un texte de Pierre Decourcelle, Gigolette sort dans six cents salles et l'Empereur des pauvres vaudra à F. Champsaur le titre flatteur de « nouveau Zola ». Des critiques saluent un genre qui a su exprimer « le fantastique du réel » ou « la poésie de la quotidienneté », quand d'autres lui reprochent son sentimentalisme exacerbé (le cinéroman est d'ailleurs à l'origine du roman-photo), son populisme, ses objectifs trop commerciaux, et n'y voient qu'une frénésie éditoriale sans aucun chef-d'œuvre : plus de 10 000 titres publiés durant l'entre-deux-guerres. L'Occupation entraîne le déclin du cinéroman. Le dernier roman-cinéma à succès pourrait bien être le Troisième Homme (1951), d'après l'œuvre de Graham Greene et le film de Carol Reed.