guerre de l'Indépendance américaine
Conflit armé qui opposa les treize colonies anglaises d'Amérique du Nord à l'Angleterre, d'avril 1775 à novembre 1782 et qui aboutit à la formation d'États unis indépendants.
1. Les treize colonies
À l'origine, la première entreprise anglaise en Amérique du Nord fut celle de Walter Raleigh, en Virginie (1585-1589) ; elle n'eut pas de résultat immédiat, et la mise en valeur de ce pays ne commença vraiment qu'à partir de 1607. Par la suite, douze autres colonies furent fondées, peuplées pour la plupart d'émigrants ayant quitté la métropole pour des raisons religieuses. En 1763, les colonies s'échelonnent le long de l'océan Atlantique, couvrant tout le territoire compris entre la côte et les Appalaches. On distingue :
– au nord, la Nouvelle-Angleterre, formée du Massachusetts, du Connecticut, du Rhode Island et du New Hampshire. Les conditions climatiques et les paysages rappellent l'Europe. De tradition puritaine, la population s'adonne à l'agriculture et à la pêche. Très actif, le commerce anime Boston, qui compte 20 000 habitants ;
– au centre, New York, New Jersey, Delaware, Pennsylvanie. Une population mêlée (Britanniques, mais aussi Suédois, Allemands et Hollandais) est à l'origine de l'essor du port de New York (16 000 habitants) et de la cosmopolite Philadelphie, la ville la plus importante avec 25 000 habitants ;
– au sud, Maryland, Virginie, Caroline du Nord, Caroline du Sud, Géorgie. Le climat, de nuance tropicale, favorise l'extension des plantations de tabac, de coton et de riz, cultivées par des esclaves noirs africains et appartenant à une aristocratie de planteurs.
Quant à l'organisation politique, chaque colonie est administrée par un gouverneur nommé par le roi d'Angleterre, à l'exception de la Pennsylvanie, du Connecticut, du Rhode Island et du Maryland ; les colonies élisent des assemblées locales et se considèrent, dans une certaine mesure, comme autonomes. La vie intellectuelle est intense, voire brillante, à en juger par le nombre des sociétés philosophiques, des loges maçonniques et des fondations universitaires : Harvard (1636) ; Yale (1716) ; Princeton (1746), entre autres.
2. Un litige fiscal à l’origine du conflit
2.1. Pas d'impôt sans représentation élue
Par le traité de Paris de 1763, qui met fin à la guerre de Sept Ans, la Grande-Bretagne s'est fait céder par la France tout le Canada, la vallée de l'Ohio et la Louisiane à l'est du Mississippi ; ce règlement avantage en principe les colons américains, qui ne rencontrent désormais plus d'obstacle dans leur poussée vers l'Ouest.
En fait, George III, souverain de Grande-Bretagne depuis 1760, entend réserver à la Couronne l'acquisition de ces nouveaux territoires et, en outre, comme le conflit a coûté cher à la Grande-Bretagne, son gouvernement redouble de sévérité dans l'application d'une législation fiscale votée à son profit par le Parlement et qui, frappant les colons, tend à leur faire payer une partie des frais de la guerre. C'est là une pratique tout à fait inusitée, les assemblées locales dans les colonies se chargeant traditionnellement de voter l'impôt.
À cette prétention les colons opposent, conformément au principe constitutionnel anglais, leur droit de ne payer que les taxes consenties par leurs propres représentants et donc de rejeter celles que veut leur imposer un Parlement où ne siègent pas leurs députés. No taxation without representation, c'est-à-dire « Pas d'impôt sans représentation élue », devient rapidement leur mot d'ordre. Le désaccord initial, qui ne comporte pas d'intention de rupture, repose tout à la fois sur une question d'intérêts et sur une question de principes.
2.2. Le massacre de Boston
Le conflit prend d'abord une tournure juridique lorsque la Grande-Bretagne décide, en 1765, de créer un impôt du timbre (institué par le Stamp Act) qui frappe toute espèce de publication ou de document à caractère juridique ou commercial. Devant le refus des colons de l'acquitter, elle décide de l'abolir en 1766. Mais elle revient à la charge l'année suivante avec de nouvelles taxes, notamment sur le thé. En même temps, elle renforce ses troupes en garnison dans les colonies. La tension devient telle qu'elle dégénère en incidents, dont le plus violent oppose soldats britanniques et colons dans les rues de Boston, faisant, le 5 mars 1770, cinq morts parmi ces derniers.
2.3. Boston Tea Party
Après une accalmie de trois ans, le conflit reprend brusquement lorsque le gouvernement britannique décide, pour sauver la Compagnie des Indes orientales de la banqueroute, de détaxer le thé qu'elle vend. Devant cette concurrence déloyale, cinquante patriotes déguisés en Indiens occupent, le 16 décembre 1773, un navire de la Compagnie, amarré dans le port de Boston, et jettent par-dessus bord les ballots de thé qu'il transporte. La « partie de thé de Boston » – Boston Tea Party – provoque une très vive réaction du gouvernement de Londres, qui renforçe son dispositif militaire au Massachusetts, où les colons commencent de lever des milices et font appel aux autres colonies.
3. La Déclaration d’indépendance et la guerre
3.1. Le premier Congrès continental (septembre-octobre 1774)
Dès que ces dernières ont connaissance des événements, elles décident d'envoyer leurs représentants – 51 au total – à un premier Congrès continental, qui s'ouvre à Philadelphie, le 5 septembre 1774. Pendant le Congrès, malgré les divergences d'intérêts et les particularismes, on expose les doléances en faisant appel à l'esprit de justice des Anglais. Le boycott est instauré en même temps, à la fois contre les Anglais et contre ceux qui n'acceptent pas les principes révolutionnaires du gouvernement de fait qui s'est établi auprès du Congrès, l'Association continentale ; cette dernière est chargée d'organiser les comités de surveillance ainsi que le boycott des produits britanniques jusqu'à l'abrogation des Intolerable Acts.
3.2. La déclaration d'indépendance
Un second Congrès tenu à Philadelphie, en 1775, succédant à l'accrochage de Lexington (19 avril 1775) entre miliciens et Anglais, reste sur la défensive, mais ses initiatives politiques et administratives amènent Londres à déclarer la guerre économique et à chercher à obtenir une soumission prompte.
La Virginie chasse alors son gouverneur anglais, et Ethan Allen s'empare de Ticonderoga (10 mai 1775). Le 15 juin, un planteur de Virginie, George Washington, devient commandant en chef et met le siège devant Boston, qui capitule (mars 1776). Tout espoir de conciliation avec la Grande-Bretagne semble s'éloigner un peu plus chaque jour et, malgré l'existence d'une minorité loyaliste à l'égard de la métropole et de George III, l'idée d'indépendance fait son chemin.
Le pas décisif est franchi le 4 juillet 1776, lorsque le Congrès adopte la célèbre Déclaration d'indépendance rédigée par Thomas Jefferson, qui peut être considérée comme l'acte constitutif des États-Unis. Texte de circonstance à bien des égards – mais promis à un succès durable par l'affirmation d'un certain nombre d'idées neuves – ce document consacre la rupture définitive avec la Grande-Bretagne.
3.3. La guerre
Des Anglais plus nombreux…
Cependant, la balance des forces n'est pas favorable aux Américains : aux troupes aguerries des Anglais, les Insurgents opposent une milice saisonnière, disposant de peu de munitions. La guerre de l'Indépendance américaine n'a de toute façon jamais mis en jeu d'importants effectifs. En raison de l'éloignement du théâtre des opérations, la Grande-Bretagne s'est trouvée dans l'impossibilité d'aligner plus de 40 000 hommes en même temps, parmi lesquels un fort contingent de mercenaires originaires de Hesse, expérimentés certes, mais brutaux. Ce qui ne manque pas de provoquer l'exaspération des Insurgents, trouvant là un motif supplémentaire de résister.
… face à des insurgés plus enthousiastes
Quant à ces derniers, la crise de leurs effectifs tient à d'autres raisons : partagés entre leur devoir militaire et leurs occupations quotidiennes, peu enclins à se laisser embrigader, hostiles enfin à l'idée même d'une armée permanente, les soldats de Washington n'ont jamais été plus de 20 000 et leur nombre s'est même parfois réduit jusqu'à 3 000 hommes en état de combattre.
Du moins ont-ils pallié leur insuffisance numérique par leur enthousiasme patriotique et par leur meilleure connaissance du pays, ce qui leur permit de pratiquer de véritables actions de guérilla contre les troupes britanniques, surtout rompues à la tactique et à la stratégie des conflits européens et commandées par des officiers médiocres, incapables de s'adapter à ces nouvelles méthodes de combat.
Les années 1776 et 1777 sont difficiles pour les Américains : incapables d'empêcher Howe de s'emparer de New York, ils prennent leur revanche à Trenton, le 25 décembre 1776, et à Princeton, quelques jours plus tard ; mais les Britanniques reprennent bientôt l'avantage et s'emparent de Philadelphie le 26 septembre 1777. En fait, en faisant porter son effort sur la capitale du Congrès, Howe laisse son collègue Burgoyne, qui vient du Canada à la tête d'une colonne de 8 000 hommes, dangereusement isolé dans la région de l'Hudson. Saisissant l'occasion, les Insurgents l'encerclent et l'obligent à capituler à Saratoga, le 17 octobre 1777. Succès décisif qui, en décourageant les derniers loyalistes, fait basculer la quasi-totalité des Américains dans la révolte, d'une part, et qui leur vaut l'alliance de la France, d'autre part.
4. La France au secours des insurgés
En effet, le gouvernement français suit avec intérêt et sympathie les efforts des Insurgents et il voit bientôt dans le conflit l'occasion de prendre sur la Grande-Bretagne la revanche du désastre qu'elle lui avait infligé en 1763. Commencée par des livraisons d'armes, l'intervention française prend une forme directe après la signature du traité de Paris, le 6 février 1778 ; résultat des efforts conjugués du comte de Vergennes et de Benjamin Franklin, l'accord conclu entre la France et les États-Unis consistait en un traité de commerce et d'amitié, rendu public, et en un traité d'alliance militaire, qui devait rester secret jusqu'à la rupture entre la France et la Grande-Bretagne. Outre l'aide navale et militaire, les Insurgents sont assurés de recevoir les fonds nécessaires à leur effort de guerre.
Le 18 juin 1778, les Anglais évacuent Philadelphie. Convaincus qu'ils ne parviendront pas à tenir le nord et le centre des États-Unis, ils décident de porter la guerre dans les États du Sud et y remportent d'indiscutables succès.
La convention d'Aranjuez, entre l'Espagne et la France, assure l'appui – coûteux et limité – de l'Espagne (1779). En 1780, le comte de Rochambeau débarque avec 6 000 volontaires français. Les neutres manifestent leur bienveillance (Catherine II, les Provinces-Unies), et les flottes françaises acquièrent la maîtrise de l'Atlantique grâce à l'aide des flottes d'Estaing et du comte de Grasse).
L'Amérique, prise entre les offensives anglaises de Clinton et de Cornwallis, auxquels s'est joint le général traître Benedict Arnold, réussit à reprendre l'offensive grâce à l'effort conjugué de George Washington et de Rochambeau. Cornwallis capitule à Yorktown en Virginie (19 octobre 1781).
C'est pratiquement la fin des hostilités sur le continent américain : lassée de cette interminable guerre – car on est bien loin des opérations de police des débuts – l'opinion anglaise souhaite en finir et retrouver des conditions plus favorables aux affaires ; Londres accepte de négocier.
Après de laborieuses discussions, la paix est signée à Versailles le 3 septembre 1783 : la Grande-Bretagne reconnaît l'indépendance des États-Unis et leur cède les territoires qu'elle possède à l'est du Mississippi, mais elle conserve l'ancienne colonie française du Canada et rétrocède la Floride à l'Espagne. Un nouvel État est né : il se donne une Constitution en 1787 et celle-ci entre en vigueur en 1789 par l'élection de George Washington à la présidence.
Pour en savoir plus, voir l'article États-Unis : histoire.