hyène

Hyène
Hyène

Son rire « sardonique », son goût pour les charognes, son aspect peu engageant ont valu à l'hyène le mépris des humains. Seul mammifère capable de se nourrir en croquant des os, l'hyène tachetée est pourtant un précieux éboueur. C'est aussi un grand chasseur et un animal original par son organisation sociale, où dominent les femelles.

Introduction

L'histoire des hyènes est bien documentée par l'existence de nombreux fossiles. Elles partagent un ancêtre commun avec les mangoustes et les civettes et genettes ; la divergence entre leurs lignées se serait produite à la fin de l'oligocène, il y a 29 à 26 millions d'années. De fait, les ancêtres des hyènes ressemblaient aux civettes, petits mammifères nocturnes de la famille des viverridés, bas sur pattes, très élégants avec leurs airs de chat, leur nez pointu et leur longue queue. C'est le cas d'Ictitherium, qui vivait en Grèce il y a 26 millions d'années, ou de Plioviverrops, qui occupait l'Eurasie il y a 20 à 22 millions d'années.

Les hyénidés apparaissent il y a 18 millions d'années, au miocène inférieur ; elles se répandent rapidement en Eurasie puis font leur apparition en Afrique il y a 14 millions d'années. Aucune espèce ne dispose alors de mâchoires capables de broyer des os comme en ont les hyènes actuelles. Elles se diversifient ensuite en deux lignées, l'une conduisant au protèle (curieux cousin des hyènes se nourrissant principalement de termites), l'autre aux hyènes stricto sensu.

À la fin du miocène, il y a entre 7 et 11 millions d'années, il existait pas moins de 24 espèces de hyènes. Elles ont désormais l'allure que nous leur connaissons aujourd'hui. De cette époque date Adcrocuta eximia, une hyène robuste, la première connue à être capable de broyer des os.

Les genres actuels de hyènes, Hyaena, Parahyaena et Crocuta apparaissent en Afrique à la fin du pliocène (le plus vieux fossile connu est âgé de 3,7 millions d'années), suivi par le genre Proteles (le protèle) au début du pléistocène. Au cours du pléistocène, on connaît encore 9 espèces d'hyènes. Au pic de leur expansion, elles occupent toute l'Afrique, à l'exception des forêts denses humides, l'Europe et l'Asie. Pachycrocuta brevirostris, qui atteignait 1 mètre au garrot et avait la taille d'un lion (c'est le plus gros hyénidé connu), habitait l'Europe au pléistocène moyen, il y a environ un million d'années. Il y a quelque 120 000 ans, l'hyène des cavernes (Crocuta spelaea — ou, pour certains auteurs qui la considèrent comme une sous-espèce de l'hyène tachetée, Crocuta Crocuta spelea) est encore répandue dans une grande partie de l'Europe. Très semblable à l'hyène tachetée actuelle, elle est cependant deux fois plus grande et habite dans un environnement plus froid de prairies et de forêts.

Limitée aujourd'hui au continent africain et à une partie de l'Asie (Asie occidentale et centrale), la famille des hyénidés rassemble quatre espèces fort différentes : d'un côté, le protèle (Proteles), très amateur de termites ; de l'autre l'hyène tachetée (du genre Crocuta), et l'hyène rayée et l'hyène brune (du genre Hyaena).

Le milieu qui a véritablement favorisé le développement des hyènes est la savane. Son extension dans le courant du tertiaire s'est accompagnée de la prolifération des herbivores et de leurs prédateurs. Alors que les arbres de la forêt sont lents à pousser et ne se renouvellent que très partiellement chaque année, la savane a une productivité annuelle à l'hectare de dix à cinquante fois plus importante. L'abondance de ces pâturages est pour beaucoup dans la richesse de la faune africaine. Comme d'autres carnivores, les hyènes, et plus particulièrement les hyènes tachetées, ont bénéficié du nombre et de la diversité des proies. Leurs très grandes capacités d'adaptation, l'éclectisme de leur régime leur ont permis de se répandre sur les quatre cinquièmes de l'Afrique, du Sahel subdésertique jusqu'aux portes de la grande forêt.

La vie de l'hyène

Une mâchoire surpuissante, un estomac à toute épreuve

Rien ne rebute l'hyène tachetée. Grâce à l'extraordinaire puissance de ses mâchoires et de ses sucs digestifs, elle peut broyer et digérer même les os et la peau. Elle partage cette particularité avec le gypaète barbu, le plus grand vautour de l'Ancien Monde. Mais, alors que cet oiseau a un régime hautement spécialisé, l'hyène est beaucoup plus éclectique. Charognard capable de se repaître de l'une de ses congénères tuée par un lion, par exemple, l'hyène est aussi un redoutable chasseur.

Une chasse efficace

On a longtemps cru que les hyènes attendaient que les lions soient repus pour venir terminer leurs proies. Les premières études effectuées sur leur alimentation dans les années 1970 en Tanzanie ont montré le contraire. Plusieurs fois, le matin, des groupes d'hyènes avaient été aperçus, qui regardaient, apparemment avec fureur, des lions dévorant une proie. Suivies la nuit, il s'est avéré que les hyènes tachetées chassaient elles-mêmes. Mais, dès que le bruit signalait que leur poursuite avait été fructueuse, les lions s'approchaient pour les déloger et s'approprier leur festin. Les hyènes n'étaient donc pas ces charognards tant décriés, mais les « victimes » des lions qui les parasitaient...

Malgré leur drôle d'allure, avec leur arrière-train surbaissé qui leur donne l'air de boiter, les hyènes sont rapides et endurantes. Elles peuvent maintenir une allure de 40 à 50 km/h pendant une quinzaine de minutes avec des pointes à 60 km/h.

Une hyène seule arrive à capturer un gnou de 170 kg. À dix ou quinze, elles terrassent un zèbre, le harcelant puis se jetant toutes ensemble sur lui. Mordu au ventre, au cou, aux pattes et partout à la fois, l'animal s'écroule en quelques minutes. Quand il tombe, il est déjà très blessé. Une fois la proie à terre, tout le clan se joint aux chasseurs et partage le festin avec voracité.

Un tiers des chasses entreprises par l'hyène tachetée est fructueux ; une hyène en appétit peut avaler jusqu'à 14 kg de viande en un repas, mais elle se contente d'environ 1,5 à 1,8 kg par jour. Lion, buffle et éléphant trop vieux, malade ou blessé, gnou ou gazelle, ou même petits rongeurs ou encore poissons desséchés, l'hyène mange tout ce qui passe à sa portée. Elle ne laisse que les cornes, les sabots et les poils ou les recrache par la bouche sous forme d'une pelote, sorte de boule dans laquelle sont accumulés ces rares éléments non digestibles par son estomac.

Impitoyable rival, le lion

Impitoyable rival, le lion



Lequel de l'hyène ou du lion est le plus chasseur ? Des études ont montré que, dans le Serengeti (en Tanzanie), 53 % des proies sont tuées par les hyènes et 33 % par les lions. Mais, dans le cratère du Ngorongoro, les hyènes tuent 84 % et les lions seulement 6 % des proies qu'ils consomment. Selon une autre étude, les lions s'approprieraient 20 % des chasses des hyènes, tuant celles-ci chaque fois qu'ils le peuvent : 60 % des décès d'hyènes dans le cratère leur sont imputables.

Les mâles du clan se soumettent aux femelles

Quand deux hyènes tachetées de sexe opposé se retrouvent ensemble, le mâle cède toujours le pas devant sa congénère. S'il n'y a qu'un morceau de viande, il le lui laisse. La femelle domine. Elle est d'ailleurs plus lourde que le mâle, de 6,6 kg en moyenne. Mieux, ses organes génitaux externes imitent à s'y méprendre ceux de son partenaire. Très difficile de faire la différence ! Les hyènes s'y retrouvent sans doute davantage lorsqu'en se croisant elles se flairent et se lèchent les parties génitales en signe de salut, chacune relevant une patte postérieure ; mais, pour marquer sa soumission, le mâle doit s'y prêter en premier. Évidente dans les relations interindividuelles, la domination des femelles est moins marquée au niveau du clan. Ce sont souvent elles qui mènent la chasse, mais, au moment de la capture de la proie, il n'y a généralement plus guère de différence dans le comportement des deux sexes.

Pour chasser avec efficacité et défendre leur territoire, les hyènes sont souvent organisées en clans dont la taille varie selon l'environnement. Selon une étude menée au Transvaal, dans un milieu boisé, 60 % des hyènes rencontrées étaient seules et 27 % allaient par deux. Dans les savanes de l'Afrique orientale, les clans peuvent compter de 30 à 80 sujets sur une surface de 10 à 40 km2. Soit une densité de 0,12 hyène par kilomètre carré dans la plaine du Serengeti et de 0,16 à 0,24 dans le cratère du Ngorongoro (deux réserves naturelles de Tanzanie).

Apparemment peu structuré, le clan compte un nombre équivalent de mâles et de femelles, sans véritable chef. Chacun se connaît et sait identifier, par les cris ou les odeurs, les membres de son clan. Les personnalités dominantes sont vite repérées et les contestations peu fréquentes. Inversement, tout animal d'un autre clan déclenche une vive réaction de peur et d'agressivité.

Tous les adultes du clan, mâles et femelles, marquent le territoire grâce à leurs deux glandes anales qui s'ouvrent dans le rectum et sortent à l'extérieur quand l'animal est excité. Après avoir reniflé les marques en place pour vérifier qu'elles proviennent bien des membres de son clan, l'hyène dépose sur les herbes une pâte visqueuse et odorante. En même temps, elle gratte vigoureusement le sol pour imprégner la terre d'une autre sécrétion odorante issue des glandes qu'elle a entre les doigts. Ce double marquage se fait partout sur le territoire, mais il est nettement plus fréquent en lisière. Certaines populations d'hyènes ajoutent, en outre, un marquage odorant et visuel en déféquant toutes aux mêmes endroits le long des frontières.

Quand une bande d'hyènes, entraînée par sa proie, tue celle-ci en dehors de son territoire, elle la cède au clan adverse si celui-ci est plus nombreux. À 1 km de chez elles, les hyènes perdent leur assurance. Les combats entre clans ont souvent lieu sur les zones frontalières larges de 100 à 200 mètres. C'est là qu'on a pu voir une proie au centre d'une mêlée de 43 hyènes (26 d'un clan contre 17 d'un autre) changer douze fois de « propriétaire » en 25 minutes. Lorsqu'il n'est plus rien resté de la carcasse, chaque groupe est reparti, plus calmement, à l'intérieur de son domaine.

Les hyènes sont très bruyantes

Les hyènes sont très bruyantes



Le cri le plus typique de l'hyène est une sorte de rire fou. Il correspond à un état d'excitation de l'animal quand il chasse, quand il attaque ou se trouve attaqué. C'est à lui que l'hyène tachetée doit son surnom d'hyène rieuse. Mais l'appel le plus fréquent de l'espèce n'est pas ce rire, c'est la huée.

La tête basse, près du sol, l'hyène commence par produire un son grave et peu puissant, qui s'amplifie peu à peu et se répète de plus en plus fréquemment pour se terminer par une sorte de plainte. Les autres membres du clan répondent à ce cri portant à plus de 1 km. Chaque animal a une voix qui lui est propre et que reconnaissent ses congénères. Le cri d'une hyène étrangère au clan entraîne une vive réaction de la part des membres de ce clan qui se dirigent tous immédiatement vers cet appel.

Lorsque des hyènes capturent une proie, elles poussent une série de grognements et de grondements qui attirent tout le clan et souvent aussi un lion, qui s'en retourne parfois dépité, car ces cris sont les mêmes lorsque les mâles se disputent une femelle en chaleur.

Les hyènes émettent en outre des ultrasons non perceptibles par l'oreille humaine. Quant aux jeunes, leurs cris ressemblent à des gémissements.

L'allaitement des petits dure plusieurs mois

La notion de couple n'existe pas chez l'hyène. La femelle a, toute l'année, des cycles œstraux réguliers de quatorze jours. Pendant les quelques heures où elle est réceptive, différents mâles peuvent la couvrir une ou plusieurs fois de suite. Une femelle peut ainsi attirer jusqu'à une quinzaine de mâles qui se disputent, avec force bruit et en montrant les dents, la priorité pour s'accoupler avec elle. Une fois remportée la compétition, le ou les mâles qui se sont imposés doivent ensuite se faire accepter par la femelle. Ils ne l'approchent qu'avec de grandes précautions, en respectant tous les signes de soumission, la tête basse, la queue entre les jambes, sans quoi ils risqueraient de se faire brutalement renvoyer à coups de dents.

Des petits précoces mais tard sevrés

La gestation dure 110 jours chez l'hyène tachetée qui porte, en moyenne, deux petits (de 1 à 3). À leur venue au monde, ils pèsent environ 1,5 kg. Ils ont les yeux ouverts, le pelage uni brun foncé et sont relativement développés. Pour la mise-bas, les femelles utilisent des terriers qu'elles creusent elles-mêmes ou qu'elles aménagent à partir de galeries initialement percées par d'autres espèces (phacochère, oryctérope). Plusieurs nouveau-nés de différentes femelles sont parfois groupés dans un même terrier, mais chacun d'eux ne sort qu'à l'appel de sa propre mère, dont il reconnaît parfaitement la voix. Vers un mois et demi, les premières taches apparaissent sur le pelage qui, progressivement, s'éclaircit. À 4 mois, les petits ont le même pelage tacheté que les adultes, excepté le bas de leurs pattes qui reste plus sombre quelque temps.

L'allaitement dure assez longtemps (de 12 à, parfois, 16 mois) et chaque femelle, qui dispose de quatre mamelles, nourrit exclusivement ses petits. À la différence des chiens, des lycaons et des loups, les hyènes ne régurgitent jamais de nourriture pour leurs petits. Leur seule alimentation est le lait auquel s'ajoutent progressivement des morceaux de carcasse que les hyènes rapportent autour du terrier. Le sevrage a lieu lorsque les jeunes ont pratiquement atteint leur taille adulte. Mais il faut encore attendre plusieurs mois avant la maturité sexuelle (vers 2 ans pour un mâle et 3 ans pour une femelle).

Bien qu'il n'existe aucun animal spécifiquement prédateur des hyènes, on constate 30 % de mortalité la première année. Pourtant, durant les premières semaines, les femelles veillent attentivement sur leurs nouveau-nés. Elles ne laissent aucun autre adulte les approcher, surtout pas les mâles qui, comme dans d'autres espèces, risquent de les tuer. Mais les jeunes sont précoces et sont capables de creuser eux-mêmes de nouvelles galeries dans leurs terriers pour se mettre à l'abri des adultes ou des maraudeurs.

Pour tout savoir sur l'hyène

Hyène tachetée (Crocuta crocuta)

Avec la tête et l'avant du corps puissants, le dos fuyant et le pelage souvent ébouriffé, l'hyène a une silhouette facilement identifiable. Le bout du museau est foncé et la fourrure présente des marques noires sur son poil brun-jaune.

Sa mâchoire est étonnamment puissante. Aucun autre animal ne peut infliger de pareilles morsures. Sur les 34 dents que possède l'hyène (par demi-mâchoire : incisives : 3/3 ; canines : 1/1 ; prémolaires 4/3 ; molaires : 1/1), les carnassières, c'est-à-dire la dernière prémolaire supérieure et la molaire inférieure, sont particulièrement développées. Sur la prémolaire, la pression atteint 800 kg, ce qui revient à 3 tonnes par cm2 ! Aucun os, même le plus dur, ne peut résister à une telle force.

Les sens de l'hyène sont bien aiguisés, en particulier son odorat et son ouïe. Ses grandes oreilles externes captent une large fréquence sonore, puisqu'elles sont sensibles à certains ultrasons.

Peu élégant dans sa démarche et dans son galop du fait que son arrière-train est plus bas que son train de devant, l'animal est cependant rapide et endurant. Il peut atteindre de 50 à 60 km/h et trotter sur de longues distances sans fatigue apparente.

La queue de l'hyène n'est pas très longue, mais elle forme une vraie touffe et sert de signal d'avertissement : dressée et ébouriffée, elle trahit l'état d'excitation de l'animal, prêt à attaquer ; ébouriffée et rabattue sur le bas du dos, elle indique un intérêt évident pour un congénère ; placée entre les jambes, elle signifie la soumission ou le désir de fuir.

Outre l'appareil génital externe de la femelle qui est très particulier et ressemble étrangement à celui du mâle, l'appareil digestif de l'hyène tachetée est caractéristique de l'espèce. La puissance de ses sucs gastriques d'abord, puis les facultés d'absorption de sa muqueuse intestinale lui permettent de récupérer des substances assimilables, non seulement dans les os mais aussi dans les fèces d'autres carnivores. En outre, si la nourriture est abondante, son estomac l'autorise à en ingérer des quantités considérables en un seul repas. Une telle faculté d'adaptation alimentaire est exceptionnelle et permet à l'hyène de vivre dans des milieux très différents et de survivre dans les conditions les plus défavorables, là où aucune autre espèce ne réussirait.

Les deux glandes anales de l'hyène ouvrent dans le rectum et servent au marquage. Ces glandes sécrètent une matière odorante caractéristique de chaque individu. Après avoir reniflé un brin d'herbe, l'animal le fait glisser sous son ventre, sans doute pour exciter la glande anale, puis le dirige jusqu'à celle-ci qui sort alors vers l'extérieur du rectum pour le marquage. Chez l'hyène brune, la sécrétion est double : l'animal dépose sur la tige une matière blanche au-dessous d'une matière noire.

          

HYÈNE TACHETÉE

Nom (genre, espèce) :

Crocuta crocuta

Famille :

Hyénidés

Ordre :

Carnivores

Classe :

Mammifères

Identification :

Pelage fauve tacheté ; tête massive ; mâchoire puissante ; train de devant développé ; ligne du dos descendante ; queue touffue ; rire « sardonique » caractéristique

Taille :

Tête et corps : de 95 à 165 cm ; queue : de 25,5 à 36 cm ; garrot : de 70 à 91,5 cm

Poids :

De 40 à 86 kg. Femelles plus grandes que les mâles

Répartition :

Afrique, au sud du Sahara, sauf la grande forêt

Habitat :

Savanes et lisière de forêt

Régime alimentaire :

Carnivore ; chasseur et charognard

Structure sociale :

Très souple ; en clans où les femelles dominent

Maturité sexuelle :

2-3 ans

Saison de reproduction :

Toute l'année ; pic à l'époque des pluies

Durée de gestation :

110 jours

Nombre de jeunes par portée :

De 1 à 3 ; 1 portée par an

Poids à la naissance :

1,5 kg

Longévité :

Une vingtaine d'années dans la nature. Record en captivité : 41 ans et 1 mois

Effectifs, statut :

Le grand prédateur le plus répandu en Afrique ; effectifs inconnus ; statut donné par l'U.I.C.N. (Union internationale pour la conservation de la nature) : faible risque

 

Signes particuliers

Appareil génital

Il est pratiquement impossible de distinguer les hyènes tachetées femelles des mâles. Les organes génitaux externes des femelles imitent en effet ceux des mâles. Leur clitoris est dit péniforme, car il ressemble à s'y méprendre à un pénis. De plus, elles ont une paire de petits sacs remplis d'un tissu fibreux non fonctionnel, là où se trouve le scrotum chez le mâle, et appelée faux-scrotum. L'ouverture du vagin ne devient visible qu'au cours de la phase d'activité sexuelle (œstrus). Les mâles sont plus petits que les femelles, ce qui est probablement lié au fait que les secondes dominent les premiers. C'est en flairant leurs parties génitales respectives que ces animaux se saluent. Et pour faire preuve de soumission, le mâle doit être le premier à s'y prêter en levant la patte postérieure.

Oreilles

Les oreilles de l'hyène tachetée sont grandes, arrondies et souvent bordées de déchirures naturelles qui n'affectent en rien l'audition de l'animal. Certains chercheurs ont ainsi eu l'idée de marquer les animaux qu'ils voulaient observer en encochant légèrement le bord externe de leurs pavillons auditifs. En combinant le nombre et l'emplacement des encoches, ils ont pu coder différents individus, mâles, femelles et jeunes. Ensuite, à l'aide de jumelles, il était facile de suivre leur action.

Tête

La forme de la tête s'explique par l'extraordinaire mâchoire aux dents résistantes et par la puissante musculature de la mandibule inférieure qui rend accessibles à l'hyène les morceaux les plus coriaces. Ses yeux voient dans la pénombre et lui permettent de chasser la nuit. Son flair l'aide à retrouver les charognes, mêmes anciennes, dont l'odeur nauséabonde ne la rebute absolument pas.

Les autres hyènes

Malgré leur aspect extérieur qui rappelle celui des chiens, les hyénidés sont plus proches des félidés que des canidés. Outre l'hyène tachetée, trois autres espèces composent la famille des hyénidés : l'hyène rayée, qui a la plus vaste répartition géographique, et l'hyène brune, qui est limitée à l'Afrique australe, appartiennent au genre Hyaena ; enfin le protèle, qui constitue à lui seul le genre Proteles et se nourrit exclusivement de termites.

Les deux espèces du genre Hyaena ont de puissantes mâchoires, comme l'hyène tachetée, mais, à la différence de celle-ci, elles se contentent de petites proies et consomment des fruits et des insectes. Leur régime très éclectique leur a permis de coloniser de nombreux milieux, des savanes aux déserts. Elles sont plus petites que l'hyène tachetée, mais leurs oreilles sont plus grandes. Les crânes se distinguent essentiellement au niveau des dents : la première molaire supérieure est très développée chez l'hyène brune et l'hyène rayée (son diamètre est double de celui de la première prémolaire). Elle est au contraire beaucoup plus petite, voire absente, chez l'hyène tachetée. Le protèle a quant à lui un museau fin et des mâchoires étroites, adaptés à son régime essentiellement insectivore.

Hyène rayée (Hyaena hyaena)

Plus petite que l'hyène tachetée : de 30 à 40 kg. Mâle plus lourd que la femelle.

Identification : tête plus fine que celle de l'hyène tachetée ; mâchoire et dents également puissantes. Oreilles très pointues. Pelage gris, zébré de noir sur les côtés de la tête, le dos et les flancs. Bout du museau, gorge et bas des pattes noirs. Des poils plus longs autour du cou et sur l'échine lui font une sorte de crinière.

Répartition : de la Mauritanie à l'Inde et de l'Asie centrale à l'Afrique orientale (ne dépasse pas la Tanzanie vers le sud). Contrairement à l'hyène tachetée, l'hyène rayée est moins dépendante de l'eau, ce qui lui permet de coloniser des régions arides comme la bordure nord du Sahara, le Moyen-Orient et la péninsule arabique. Elle y habite les zones rocheuses qui lui fournissent de nombreux abris.

Alimentation : nettement plus omnivore que l'espèce tachetée, elle consomme des mammifères, des fruits, des insectes et des reptiles. Elle chasse les petites proies et mange les espèces de plus grande taille sous forme de charognes.

Comportement : l'hyène rayée vit essentiellement en solitaire ou en famille (couple et jeunes). Dans ce dernier cas, les femelles n'ont pas un rôle dominant vis-à-vis des mâles et les deux sexes sont parfaitement différenciés.

De mœurs nocturnes, l'hyène rayée parcourt chaque nuit des kilomètres (beaucoup plus que l'hyène tachetée) pour trouver sa nourriture. Ce faisant, elle rencontre de nombreux individus de son espèce qu'elle salue en laissant renifler ses glandes anales par son congénère. Sans défendre véritablement un territoire, les animaux ont tendance à effectuer un marquage autour des lieux où ils se rencontrent.

Les hyènes rayées sont peu bruyantes dans les régions où elles cohabitent avec les hyènes tachetées, mais elles le sont bien davantage quand elles sont seules, comme au Moyen-Orient ou en Inde. La mise-bas a lieu dans un terrier après seulement 90 jours de gestation. Peu précoces, les nouveau-nés sont sourds et aveugles pendant les premiers jours, mais leur pelage et leur coloration sont déjà identiques à ceux de l'adulte. La femelle est dotée de six mamelles pour nourrir les 1 à 6 jeunes de chaque portée. Très vite, le père, la mère ou les jeunes d'une portée précédente apportent de la nourriture au terrier. Le sevrage a lieu vers 3 ou 4 mois.

Hyène brune (Hyaena brunnea)

Un peu plus grande que l'hyène tachetée, elle donne davantage une impression de puissance : de 35 à 50 kg. Mâle légèrement plus lourd que la femelle.

Identification : pelage brun foncé avec de longs poils sur le dos et les flancs et une collerette claire en arrière de la tête.

Répartition : remplace l'hyène rayée en Afrique australe. On la rencontre essentiellement autour des déserts de Namibie et du Kalahari ainsi que dans les zones subdésertiques voisines.

Alimentation : l'hyène brune mange un peu de tout, mais semble mal adaptée à la chasse. Ses tentatives de capture de springbok, cette petite antilope d'Afrique australe, sont le plus souvent vaines, même s'il s'agit d'un faon. Aussi préfère-t-elle parcourir les grèves et les plages de Namibie à la recherche de cadavres rejetés par la mer : poissons, oiseaux, cétacés ou otaries. Elle fait également son affaire des charognes qu'elle trouve à l'intérieur des terres et même des ordures ménagères de certaines villes comme Johannesburg ou Pretoria. Elle se repaît aussi de petites proies (rongeurs, lézards, insectes) et de fruits, comme les coloquintes, qui lui apportent de l'eau.

Comportement : les hyènes brunes vivent solitaires dans le cadre de petits groupes familiaux occupant des territoires de 200 à 600 km2. Les groupes sont composés de 4 à 6 adultes et, selon les saisons, d'un nombre variable de jeunes. L'espèce est franchement nocturne, parcourant près de 30 km par nuit à la recherche de nourriture. Les comportements rituels de prise de contact (érection de la crête dorsale, reniflement de la tête et des glandes anales, mordillements...) sont très variables selon le sexe, le clan ou la personnalité des individus qui se rencontrent. Les séquences de marquage sont très développées. La poche anale de l'hyène brune forme un sillon dans lequel la tige de graminée glisse et reçoit deux gouttes de substance pâteuse. La première goutte est blanche et la seconde, placée juste au-dessus de la première, est noire. L'animal effectue en moyenne deux ou trois marquages par kilomètre et davantage en périphérie du territoire.

La reproduction de l'hyène brune ressemble à celle de l'hyène rayée, mais la femelle n'a que quatre mamelles.

Protèle (Proteles cristatus)

Espèce la plus originale de la famille, le protèle ressemble à une petite hyène en nettement plus léger : de 8 à 12 kg.

Identification : silhouette fine, museau pointu et délicat. Pelage jaune clair à roux ; longs poils sur le dos et les flancs, crinière sur l'encolure. La mâchoire, très différente de celle des autres hyénidés, n'a parfois que 24 dents : les canines ressemblent à des crocs, mais les molaires et les prémolaires sont minuscules et coniformes. Non fonctionnelles, elles peuvent même manquer totalement chez certains animaux.

Répartition : Est et Sud de l'Afrique, avec entre les deux une zone de 1 500 km d'où les protèles sont absents. Le climat actuel doit y être trop humide pour eux.

Alimentation : se nourrissant essentiellement de termites, le protèle capture ses proies en léchant le sol à brefs coups de langue. Même s'il avale en même temps beaucoup de terre, sa salive est suffisamment collante pour bien attraper les insectes. Certaines espèces ont sa préférence. En été, en Afrique australe, il chasse la nuit les Trinervitermes qui se déplacent en colonies à la surface du sol. En une nuit, un protèle peut consommer 200 000 termites. En hiver, il chasse de jour les Hodotermes, seules proies alors disponibles.

Comportement : comme les colonies de termites sont dispersées, chaque protèle parcourt seul son domaine à la recherche de sa nourriture. En même temps, il le marque régulièrement comme le font les autres hyénidés. On compte 120 marques déposées en 2 heures en zone frontalière contre seulement 1 marquage toutes les 20 minutes en région plus sûre. En cas de disette, les animaux peuvent se regrouper et se nourrir ensemble, ce qui évite les dépenses d'énergie inutiles liées aux conflits et augmente les chances de succès. Les affrontements territoriaux reprennent à l'époque de la reproduction. Les mâles parcourent alors de grandes distances à la recherche de femelles en chaleur qui, elles, restent sur leur territoire.

Les jeunes viennent au monde nus et sans défense après 3 mois de gestation. Ils restent un mois et demi à 2 mois dans le terrier avant de sortir. Un mâle participe souvent à leur élevage, les gardant quand la femelle part se nourrir. Il s'agit habituellement d'un animal vivant sur le territoire voisin et qui n'est pas forcément le père. Les jeunes commencent à goûter aux termites vers 3 ou 4 mois et sont indépendants à la saison des amours suivante.

Milieu naturel et écologie

L'hyène tachetée est le plus gros des charognards. En mangeant les dépouilles des animaux morts, elle assure un fabuleux nettoyage et évite la propagation de multiples maladies. Son extraordinaire capacité à se nourrir d'os, de fèces, de peau en fait l'un des plus grands recycleurs de matière organique. C'est dire l'importance de son rôle dans l'écologie. Mais ce n'est qu'un aspect. L'hyène tachetée est aussi l'un des plus gros carnivores, en tout cas le plus répandu. Dans les savanes africaines qui ont assuré la prolifération des herbivores et, corrélativement, l'épanouissement de leurs prédateurs, les hyènes tachetées sont plus nombreuses que les lycaons, les guépards, les panthères et les lions. Leur impact est considérable et leurs relations avec les autres espèces souvent complexes.

Leur seul vrai rival est le lion. Alors qu'hyènes et lions cohabitent fréquemment, les relations restent apparemment tendues entre les deux espèces. Mais leurs rapports varient selon leurs effectifs respectifs et selon les régions, comme on a pu l'observer dans deux réserves naturelles de Tanzanie, la plaine du Serengeti et le cratère du Ngorongoro.

Dans le Serengeti, les hyènes tachetées profitent souvent des restes des repas des lions. À l'inverse, dans le Ngorongoro, les lions, relativement peu nombreux, dépossèdent souvent les hyènes des proies qu'elles ont capturées. Mais une bande d'hyènes décidées peut parfaitement faire reculer une lionne isolée. Tandis que deux grands mâles à crinière pourront en toute impunité voler leur proie à un groupe d'hyènes tachetées. Qui plus est, les lions tuent les hyènes qu'ils peuvent saisir chaque fois que l'occasion s'en présente. Le cadavre abandonné sur la prairie est ensuite mangé par d'autres hyènes, par des chacals ou des vautours. Cette agressivité des lions à l'encontre des hyènes explique la méfiance qu'ont ces dernières vis-à-vis du roi des animaux. Mais, dès qu'un lion est blessé, malade ou, surtout, isolé, il risque de finir sous la dent de son ennemi héréditaire.

Guépard et panthère, essentiellement solitaires, à la différence du lion, seraient incapables de faire face à une meute de hyènes. Pour protéger sa proie de leur voracité, le guépard se dépêche de la consommer avant que ces dernières ne l'aient repérée. De plus, il chasse souvent de jour, avant la phase d'activité des autres grands carnivores. La panthère, quant à elle, s'empresse de hisser l'animal capturé en haut d'un arbre pour le manger en toute tranquillité.

Reste la concurrence des lycaons, ces chiens sauvages africains extrêmement sociaux, qui chassent en groupes très organisés des proies comparables à celles que poursuivent les hyènes : gazelles, gnous, zèbres. Les hyènes se méfient d'eux, car ils ont un sens de la coopération et de la solidarité encore plus poussé que les loups. Agissant de concert, ils sont toujours plus efficaces que les hyènes, qui, même en meute, conservent des réactions individualistes. Malheureusement, ce superbe chien des savanes et des pré-déserts d'Afrique ne les menace plus guère, car il est en train de disparaître de tout le continent sans qu'on sache très bien pourquoi.

Les petits carnivores interfèrent moins avec les hyènes, d'autant qu'ils évitent de les approcher. Néanmoins, les chacals se sentent suffisamment vifs et agiles pour venir grappiller des morceaux sur une carcasse. Il faut dire qu'à ce moment-là les hyènes sont totalement absorbées par le souci d'avaler le plus de viande possible. À entendre les cris, les grognements et les grondements, on pourrait croire à des conflits, mais, en fait, chaque animal ne pense qu'à engouffrer la nourriture avec voracité.

Proies favorites : gnous et jeunes gazelles

Tous les ongulés représentent pour les hyènes une proie potentielle. Les antilopes savent reconnaître l'allure du prédateur au repos de celle du chasseur à l'affût. Tout au plus peut-on remarquer que, dans un troupeau, si une femelle se trouve avec son jeune du côté des hyènes, elle passera avec lui de l'autre côté du troupeau pour se protéger. Le fait est que, malgré leurs cornes, les gnous sont vraiment mal armés pour se défendre. On a vu des femelles charger une hyène venue capturer leur nouveau-né et ne pas réussir à l'en empêcher. Pour ce type d'espèce, la meilleure réponse à la menace des prédateurs est la multiplication des naissances à la même saison. Même si alors un nombre important de jeunes disparaissent sous la dent des carnivores, les pertes sont relativement faibles en pourcentage. Quelques jours plus tard, les jeunes gnous sont capables de courir assez vite pour rester au sein du troupeau. Au contraire, les animaux nés avant ou après le pic saisonnier des naissances sont rapidement décimés par les prédateurs.

Chez les gazelles de Thomson, les petits restent cachés à terre, couchés entre les herbes, les premiers jours de leur vie. Les hyènes le savent et, à la bonne saison, elles sillonnent la savane à la recherche de ces proies faciles. Mais comme les nouveau-nés, soigneusement nettoyés par leur mère, n'ont pratiquement pas d'odeur et que les femelles se tiennent toujours à l'écart pour ne pas les faire repérer, les prédateurs ne peuvent les découvrir que par hasard. Devenues adultes, les gazelles de Thomson sont généralement trop rapides pour être inquiétées par les hyènes, mais elles sont plus vulnérables quand la nuit est très noire ou en cas de forte averse tropicale.

Pour les gnous du cratère, la mort vient des hyènes

Pour les gnous du cratère, la mort vient des hyènes



Des observations faites dans deux réserves naturelles de Tanzanie montrent que les hyènes y ont un impact différent sur les populations d'ongulés. Dans la plaine du Serengeti, ces études ont mis en évidence que les hyènes capturent de 2 à 3 % de la population de gnous, contre 11 % dans le cratère du Ngorongoro. Un taux proche de celui du renouvellement des gnous. Pour les zèbres, les chiffres sont respectivement de l'ordre de 2 % dans le Serengeti contre 9 % dans le Ngorongoro. Pour les gazelles de Thomson, de 2 à 6 % dans la plaine contre 3 % dans le cratère... L'impact des hyènes est donc beaucoup pus important dans le cratère, où elles représentent le facteur essentiel de mortalité des gnous. En revanche, dans le Serengeti, elles passent nettement après les lions.

L'hyène et l'homme

Un animal qui suscite crainte et méfiance

Nocturne et charognarde, l'hyène a éveillé les peurs et les fantasmes. L'homme l'a associée aux forces du mal, aux démons de l'obscurité. Il lui a aussi attribué des pouvoirs magiques. Les recherches scientifiques permettent d'apprécier la véritable nature de cet animal complexe.

La monture de prédilection des sorciers africains

Partout en Afrique, on a connu des hyènes parfaitement apprivoisées, mais l'animal reste associé aux forces obscures, aux pouvoirs magiques. Aussi l'hyène est-elle l'animal favori des sorciers. Dans de nombreuses cultures africaines, l'hyène, qu'elle soit sauvage ou apprivoisée, est censée posséder des forces surnaturelles. Prétendre les maîtriser est une manière d'affirmer ses pouvoirs. En Afrique orientale, l'hyène est l'animal que les sorciers chevauchent la nuit pour se rendre à leurs rendez-vous magiques avec les esprits. L'animal apprivoisé, que tout le monde connaît le jour, devient monstrueux avec la nuit et ne répond plus qu'à la volonté du sorcier. Pour certaines ethnies, c'est toujours une hyène qui emmène le sorcier vers le village où risque de survenir la mort d'un homme.

Les hyènes ne servent pas seulement de monture, les sorciers utilisent aussi certaines parties de leur anatomie pour préparer leurs potions. Dans son roman, fondé sur des faits historiques, Djebel Amour (1978), le Français Roger Frison-Roche raconte comment une vieille femme prépare un mélange abortif à base de plusieurs ingrédients parmi lesquels l'hyène entre pour une part importante. Comme le djebel Amour se trouve au nord du Sahara, en bordure des hauts plateaux algériens, il s'agit dans ce cas de l'hyène rayée. Ailleurs, en Afrique noire, le nez de l'hyène tachetée jouit d'une grande réputation auprès des aveugles. Les guérisseurs utilisent la truffe de l'animal dans les potions magiques qui aident les non-voyants à mieux trouver leur chemin. Par extension, l'homme qui consomme ce morceau de choix accède à la sagesse et à la connaissance qui lui permettent de mieux discerner les bons chemins dans l'existence. Les sourcils de l'hyène font dormir quand on les brûle. Les poils et la peau servent d'émétiques dans certaines pharmacopées traditionnelles. Quant au contenu des glandes anales, il est utilisé dans la sorcellerie zouloue, au sud de l'Afrique. Ailleurs encore, les fèces d'hyènes sont brûlées pour calmer les esprits (amayembe). Ainsi, il est intéressant de constater le rôle important que joue l'hyène dans les pratiques magiques et les médecines traditionnelles d'Afrique, même si celles-ci surprennent les Européens.

Crainte et dénigrée

Après avoir transpercé une hyène rayée de son sabre, un officier en poste en Afrique entend son guide indigène lui dire : « Remercie le ciel qui m'a fait rester en arrière avec ton fusil, ne te sers plus jamais de ton sabre à la guerre parce qu'il te trahirait. » Et, selon Jules Gérard, dans son livre la Chasse au lion écrit en 1869 et dont l'action se déroule dans l'est de l'Algérie : « L'hyène est un animal lâche et immonde, la seule mort qu'elle mérite est d'être lapidée par les femmes et les enfants du douar. » Ces propos sont typiques d'une tradition de méfiance à l'encontre des hyènes, colportée par des hommes qui connaissaient peu l'animal.

Un animal qui passionne les chercheurs

L'image de l'hyène a beaucoup évolué depuis que des chercheurs ont réellement suivi l'animal à la trace. Le premier a été, dans les années 1970, le Hollandais Hans Kruuk dans le cratère du Ngorongoro (Tanzanie). Sacrifiant, avec son épouse, ses nuits à l'observation des hyènes tachetées, il a pu constater que celles-ci n'étaient pas seulement des charognards comme le voulait leur réputation, mais aussi d'habiles chasseurs qui savaient montrer leur irritation lorsque les lions leur avaient dérobé leur proie et qu'elles assistaient, impuissantes, au festin de ceux-ci.

Après avoir capturé avec un projectile anesthésique une cinquantaine de hyènes tachetées sur les 400 qui habitaient le cratère, Kruuk les a marquées à l'oreille afin de pouvoir les reconnaître de loin avec des jumelles. C'est ainsi qu'il a pu établir les premières observations sur l'organisation sociale de l'espèce. Depuis, les études se sont succédé et se sont encore affinées, grâce aux colliers émetteurs que l'on met sur les animaux pour les suivre nuit et jour. L'hyène a perdu son image ambiguë pour susciter un nouvel intérêt par la richesse de ses possibilités adaptatives, l'originalité de son organisation sociale, son importance comme maillon dans la chaîne écologique.

Les autres espèces de hyénidés ont également été étudiées.

Hyènes mangeuses d'hommes

On a dit des hyènes qu'elles déterraient les cadavres et tuaient les vivants endormis. Si la deuxième partie de l'affirmation relève du fantasme, la première a quelque fondement. Dans les régions où les morts sont mis en terre dans un simple linceul, il arrive effectivement que les hyènes déterrent les cadavres pour s'en nourrir. Certaines ethnies ont même pour coutume de donner elles-mêmes leurs morts aux charognards, admettant implicitement le recyclage de la matière organique.

On dispose aussi de rares exemples, dans l'histoire des relations hyènes-hommes, où les premières s'en sont prises aux seconds. Au tout début du xxe siècle, entre 1908 et 1909, lors d'une importante épidémie de trypanosomiase (la maladie du sommeil), les personnes atteintes avaient été regroupées en camps pour être soignées. Mais l'état de faiblesse des malades les laissait complètement démunis face aux hyènes et il avait fallu mettre des gardiens pour les protéger. Une telle situation s'est reproduite lors d'une nouvelle épidémie de la maladie en 1950-1951.