parfums et cosmétiques

Parfum, essence naturelle et de synthèse
Parfum, essence naturelle et de synthèse

Le parfum fut d'abord une offrande, et son usage était sacré. Aujourd'hui, les produits destinés à l'hygiène, à la protection ou à la parure du corps se sont beaucoup répandus et diversifiés, tant depuis les développements de la chimie organique et de la biologie que sous l'effet des bouleversements de la vie sociale. La parfumerie représente l'aile la plus prestigieuse, quasi artistique, de cette sorte de produits.

Références historiques

Les découvertes archéologiques montrent que les hommes préhistoriques savaient trouver et préparer des pigments, d'origine minérale, et, après les avoir incorporés à des corps gras, les utiliser pour peindre les parois des grottes et décorer leur corps. Le fait de peindre son corps visait à la fois l'ornement et la protection magique. Sur certains sites paléolithiques, on a retrouvé ces mélanges, prêts à l'emploi, dans des récipients d'os ou d'ardoise, avec des palettes et des pilons. Une pâte faite de couleurs et de graisse était parfois enterrée avec les morts.

L'Antiquité

Les vestiges laissés au Moyen-Orient par les civilisations de l'Antiquité indiquent un usage constant des cosmétiques. Les Sumériens, les Babyloniens, les Hébreux et les Égyptiens les employaient à des fins magiques et rituelles (embaumement des cadavres), médicales, ou encore comme parure, en tout cas dans les catégories les plus élevées de la hiérarchie sociale. Il n'est pas rare que les recettes de fabrication aient été gravées dans la pierre. On a trouvé des peintures pour le visage et pour le corps, ainsi que des huiles et des onguents, dans des pots et des jarres ou sous forme de bâtons et de crayons, dont certains datent du IVe millénaire avant J.-C. Les civilisations antiques du Moyen-Orient semblent avoir prêté une grande attention aux yeux : les cosmétiques utilisés protégeaient ceux-ci des mouches et du soleil éblouissant. Les cils, les paupières et les sourcils étaient peints en noir avec du khôl, une pâte à base de suie et d'antimoine ou de galène (une forme de minerai de plomb). Les Égyptiens bordaient la partie inférieure de l'œil avec une pâte verte contenant principalement de la malachite pulvérisée et soulignaient le contour de l'œil avec un mélange préparé à partir d'œufs de fourmis écrasés.

Le henné (poudre tirée des feuilles séchées de l'arbuste du même nom) a été utilisé pour teindre les cheveux, les ongles, la paume des mains et la plante des pieds. Les parfums et les onguents, d'abord réservés aux rites de la momification, prirent une grande place dans les exportations égyptiennes. Les extraits bruts étaient amenés de tout le Bassin méditerranéen pour être traités en Égypte et vendus sous forme de parfums, de crèmes et de lotions. Les fards, les poudres pour éclaircir le teint, les poudres abrasives pour blanchir les dents, les huiles de bain et les rouges à lèvres étaient utilisés tous les jours par les hommes et les femmes des classes aisées. L'huile d'amande douce, l'huile d'olive et l'huile de sésame, le thym et l'origan, l'encens et la myrrhe, le nard, le safran, l'eau de rose et le chypre constituaient la base de préparations qui furent par la suite adoptées dans le monde entier.

En Inde

Moyens d'honorer le corps, les cosmétiques et les parfums étaient très importants pour la femme indienne, qui se devait d'être séduisante pour son amant. Dans le fameux traité d'amour indien, le Kamasutra (écrit entre 100 et 600 apr. J.–C.), il est conseillé aux femmes d'apprendre l'art du tatouage et celui de « se colorer les dents, les vêtements, les cheveux, les ongles et le corps ». Les cosmétiques étaient aussi l'emblème d'une classe ; sur le visage, l'emplacement des ornements était un moyen de distinguer les castes les unes des autres. Beaucoup de femmes indiennes utilisent encore les cosmétiques à cet effet ; les paupières sont colorées avec une teinture à base d'antimoine, le visage et les bras le sont en jaune, avec une poudre de safran, et la plante des pieds est rougie au henné.

En Grèce et à Rome

Contrairement aux civilisations de l'Afrique du Nord et de l'Anatolie, les Grecs anciens ne faisaient pas un usage courant des cosmétiques ; pourtant, les courtisanes grecques usaient de parfums importés, de dépilatoires, de fards à joues, et de fards pour les yeux à base de khôl. Les femmes grecques avaient coutume de teindre leurs cheveux pendant le deuil, et les éclaircissaient parfois avec des pommades ou des poudres colorées. Les premiers Romains méprisaient les cosmétiques, qu'ils considéraient comme « dépassés ». Sous l'Empire, cependant, le luxe des peuples orientaux conquis était devenu non seulement désirable, mais une marque de richesse. On importa les parfums égyptiens ; on utilisa le henné pour teinter les mains et les pieds ; les fards à joues, les rouges, les teintures et les décolorants pour les cheveux étaient autant employés par les hommes que par les femmes. Plusieurs de ces cosmétiques très populaires étaient extrêmement toxiques, en particulier la cérusite, utilisée pour poudrer le visage. Théophraste, dans les Recherches sur les plantes, au ive s. av. J.–C., et Pline l'Ancien, dans son Histoire naturelle, au Ier s. apr. J.–C., ont fait le point des connaissances en la matière.

L'Europe médiévale

Lorsque l'influence de Rome en Europe s'estompa, les notions romaines de propreté corporelle et de parure disparurent également. L'histoire du cosmétique est alors surtout arabe. Ce n'est qu'avec le retour d'Orient des croisés et des pèlerins, et les débuts de la Renaissance, que l'art cosmétique ancien fut réintroduit et remis en faveur en Europe, d'abord dans les cours puis, bien plus tard, chez les gens du peuple.

Bien que désapprouvés par l'Église, les fards pour le visage redevinrent à la mode dans la noblesse ; leur utilisation fut tout d'abord réservée aux hommes de certaines cours, aux dames de haut rang et aux courtisanes. En Occident, un des critères contemporains de maquillage du visage provient probablement en droite ligne de l'idéal médiéval de beauté féminine, qui voulait la peau d'une femme blanche comme le lys et ses joues rouges comme une rose. Les produits permettant d'atteindre cet idéal étaient à la portée des riches ; les gens du peuple devaient se contenter de farine de blé et de jus de betterave. La découverte, à la fin du Moyen Âge, des techniques d'obtention de l'alcool éthylique et d'extraction d'huiles essentielles (liquides volatils contenant la substance odorante d'un végétal) va lentement permettre le développement de la parfumerie alcoolique.

Les Temps modernes

Si le siècle de Louis XIV consomma beaucoup de parfums (souvent pour pallier le manque d'hygiène), la célèbre eau de Cologne n'apparaît pas avant la fin du xviie s. (à Milan, puis à Cologne et à Paris). Bientôt, la France devint un phare dans l'art du maquillage ; les hommes et les femmes de haut rang poudraient leur visage et mettaient de la poudre de safran et du pollen de fleurs sur leurs cheveux ; ils utilisaient des lotions pour la peau. Si la France continua d'être considérée comme le pays du génie cosmétique, vers le xvie s., les Italiens, et en particulier les Vénitiens, étaient devenus les principaux producteurs et fournisseurs de « produits de beauté ». Le blanc de céruse vénitien, qui permettait de blanchir la peau, était considéré comme supérieur à tout autre, et la demande en était forte, bien que l'on n'ignorât pas que le plomb qu'il contenait pouvait ruiner le teint, entraîner la calvitie, voire la mort, en cas d'utilisation prolongée. En même temps que l'exigence de nouveaux cosmétiques plus efficaces, le nombre de préparations toxiques ou mortelles courantes s'accrut. Le rouge de fucus, utilisé comme rouge à lèvres, était en fait du cinabre (sulfure de mercure) ; de l'huile de vitriol (acide sulfurique) était parfois appliquée sur les cheveux pour les éclaircir.

En Europe, au xviiie s., les personnes des deux sexes cherchèrent à prendre une apparence presque entièrement artificielle. Sur les visages blanchis, on soulignait en bleu la ligne des veines.

Les mouches de velours ou de soie noires, inventées pour masquer les marques de variole, devinrent de plus en plus grandes, et prirent des formes de plus en plus complexes : croissants, petits points, oiseaux, étoiles, fleurs, ou encore symboles de la passion ou des idées politiques de ceux qui s'en paraient.

Cette utilisation flamboyante des cosmétiques diminua considérablement après la Révolution française et le début de l'époque victorienne. Les hommes abandonnèrent presque complètement le maquillage, et les femmes respectables s'en tenaient à une touche d'eau de Cologne ou à une trace de poudre de riz.

Un essor spectaculaire

Vers 1880, cependant, les progrès techniques et l'apparition de la réclame ouvrirent une ère nouvelle dans l'histoire des cosmétiques. La société américaine Harriet Hubbard Ayer investit 50 000 dollars en publicité pour sa crème pour le visage, qu'elle déclara avoir été mise au point par Mme Récamier. L'actrice anglaise Lillie Langtry se prêta à la publicité pour le savon Pears. Encouragées par la beauté et la respectabilité des modèles figurant dans de luxueux magazines, les femmes eurent à nouveau recours aux produits de beauté. La consommation s'accrut, de façon régulière, mais modérée, jusqu'en 1918. Elle progressa de façon spectaculaire entre les deux guerres. Les méthodes modernes de production et de conditionnement en série ont rendu les cosmétiques relativement bon marché, et, depuis la Seconde Guerre mondiale, les techniques modernes de publicité ont contribué à l'essor d'une industrie particulièrement florissante. On peut aujourd'hui réellement parler, en ce domaine, de démocratisation.

Outre la baisse du prix de revient des produits, occasionnée par le développement des produits de synthèse, les bouleversements de la vie sociale expliquent pour beaucoup le développement de cette industrie : urbanisation des populations ; participation massive des femmes à la vie professionnelle ; multiplication des emplois tertiaires entraînant un souci accru de la présentation physique.

La persistance d'un rôle magique (image physique idéale dans laquelle on se projette) et l'apparition de la nécessité d'un comportement utilitaire vont mettre au premier plan le souci de l'apparence. La contradiction dynamique entre la nostalgie du naturel et les progrès de l'artificiel dirige les rêves et la réalité de cette industrie.

Produits de beauté modernes

Suivant leur mode de fabrication, la plupart des produits de beauté modernes entrent dans l'une des catégories suivantes.

Parfums

La matière première est le plus souvent végétale (fleur, tige ou feuille des plantes aromatiques) ; les odeurs animales comme l'ambre gris ou le musc sont aujourd'hui reproduites par synthèse chimique. Les produits synthétiques (aldéhydes, phénols, par exemple) connaissent un développement spectaculaire depuis un siècle. Le prestige de la parfumerie française a popularisé les noms de Jean-Marie Farina, Guerlain, Piver ou François Coty… De leur côté, les grands couturiers ont souvent exercé leur création jusque dans le domaine de la parfumerie : Balmain, Chanel, Givenchy, Balenciaga, Yves Saint Laurent…

Poudres

Une poudre pour le visage contient généralement du talc, de la craie, du kaolin, des mélanges d'oxyde de zinc et d'oxyde de titane, et divers pigments colorés. Convenablement formulé, ce mélange s'étale facilement, adhère à la peau et absorbe un peu d'humidité. La poudre compacte est une poudre mélangée à de la gomme sèche, puis hydratée, compactée et séchée. Le fard à joues compact est une poudre pigmentée et compactée.

Émulsions

La plupart des préparations pour la peau, sous forme de crème ou de lotion, sont des émulsions, c'est-à-dire de fines particules d'huile dispersées dans de l'eau. La crème de jour est une émulsion constituée d'un acide gras, comme l'acide stéarique, de glycérine (ou de propylèneglycol) et d'eau. Ces crèmes pénètrent dans la peau sans laisser de trace luisante. Si l'on y ajoute des pigments, elles constituent des fonds de teint. Des émulsions plus légères, contenant davantage d'eau par rapport à leur teneur en huile, sont utilisées comme lotions démaquillantes.

Rouges à lèvres

On mélange des huiles (huile de castor, par exemple) et des cires, on y ajoute pigments et teintures ; on mélange à nouveau et on laisse durcir dans des moules. Du fait que le rouge à lèvres peut être ingéré, le choix des matières premières est limité à des ingrédients qui sont considérés comme non toxiques (colorants alimentaires).

Maquillage des yeux

Les crayons à sourcils, l'ombre à paupières et le mascara sont, comme le rouge à lèvres, composés d'huiles, de cires et de pigments. Ils doivent également contenir des produits non toxiques pour ne pas porter atteinte à l'organe de la vue.

Autres produits cosmétiques

Parmi les produits cosmétiques, on compte aussi : les déodorants et les dépilatoires ; les produits solaires, lotions ou crèmes, qui protègent la peau en filtrant les rayons du soleil grâce à une substance chimique qui absorbe la lumière, ou qui permettent le bronzage grâce à leur base huileuse ; les shampooings, reposant généralement sur des détergents hautement solubles, intégrant des parfums et parfois des composants spéciaux pour traiter les cheveux secs ou les pellicules, ou augmenter la brillance ; les laques, le plus souvent à base de résines ; les produits pour les ongles – les vernis sont d'ordinaire une solution de nitrocellulose et de colorants, avec des résines et des agents plastifiants pour donner le brillant et permettre l'adhérence ; les dissolvants – solvants de la nitrocellulose – sont fréquemment l'acétone ou l'acétate d'éthyle.

L'inocuité des produits cosmétiques

Le besoin d'une réglementation rigoureuse quant à l'inocuité des produits cosmétiques s'est peu à peu fait sentir. L'Ifra (International Fragrance Association), organisme international créé en 1973, établit et diffuse des directives visant à interdire les produits nocifs.

Les minéraux dangereux ont été complètement abandonnés : plomb, mercure, arsenic, argent. On a beaucoup développé les recherches dans le domaine de l'allergologie. La loi du 10 juillet 1975 réglemente en France les contrôles de tolérance et de nocivité : passage devant la commission de contrôle et tests de laboratoire ; indication de la composition du produit sur les emballages (à l'exclusion de la formulation complète, afin de conserver les secrets de fabrication).