Journal de l'année Édition 2004 2004Éd. 2004

Le pape nomme trente nouveaux cardinaux

Alors que les problèmes de santé du pape posent la question de sa succession, le souverain pontife a annoncé le 28 septembre la création de trente cardinaux, dont trois Français.

Au terme de la cérémonie d'investiture qui se déroulait à Rome le 21 octobre, 26 des nouveaux prélats devaient rejoindre le collège composé désormais de 135 électeurs chargés de désigner en conclave le prochain pape à la succession de Jean-Paul II. Le pape entend toutefois accomplir sa mission jusqu'à la fin, c'est-à-dire tant que « les forces du corps et de l'esprit » le lui permettront.

Le 24 septembre, Jean-Paul II a dû annuler précipitamment sa participation à l'audience publique des pèlerins de Rome sur la place Saint-Pierre, relançant les spéculations sur son état de santé, particulièrement insistantes depuis sa visite au début du mois en Slovaquie, où ses défaillances physiques avaient alarmé son entourage. Les « douleurs intestinales » invoquées pour expliquer cette absence à un rendez-vous hebdomadaire que le pape n'avait que rarement manqué en vingt-cinq années de pontificat se sont ajoutées à la longue liste des symptômes d'une aggravation de l'état de santé d'un homme atteint de la maladie de Parkinson depuis de longues années et dont le visage et l'attitude trahissent un affaiblissement accru au fil de ses apparitions publiques. Signe de cette détérioration de l'état physique du pape, ses bulletins de santé tendent à constituer l'essentiel des communiqués du Vatican, dont certains représentants préparaient les fidèles de l'Église catholique au pire, les appelant à la prière, tandis que les médias multipliaient les dossiers en forme de bilan sur un quart de siècle pontifical. C'est dans ce contexte alarmant, nullement dissipé d'ailleurs par la reprise de ses nombreuses activités, que le pape a annoncé la création de 30 nouveaux cardinaux au cours de son angélus le 28 septembre.

Une possible « renonciation »

Intervenant au lendemain de la cérémonie anniversaire de la mort, en 1978, de Paul VI et de Jean-Paul Ier, qu'il présidait en la basilique Saint-Pierre après avoir reçu la présidente des Philippines Mme Arroyo, cette initiative n'est pas passée inaperçue dans un calendrier papal surchargé. Ce dernier a pourtant été maintenu, même s'il semble présumer des forces de cet homme âgé de quatre-vingt-trois ans, désormais incapable de se mouvoir et même de prononcer un discours. Une initiative qui devait prendre tout son sens alors qu'a repris la rumeur d'une possible « renonciation » telle qu'elle est prévue dans le droit canon, même si la cérémonie d'investiture des cardinaux, anticipée au 21 octobre, a pu revêtir un caractère jubilaire en s'inscrivant dans le prolongement de la célébration de ses vingt-cinq ans de pontificat du 14 au 19 octobre. Car 26 des nouveaux cardinaux nommés par Jean-Paul II, dont trois Français, sont allés rejoindre le collège de ceux qui éliront le prochain pape au cours d'un conclave, auquel prendront donc désormais part 135 électeurs. On n'en est pas là et le pape n'a cessé de clamer, depuis le jour de ses soixante-quinze ans (âge de la démission pour tout évêque), qu'il irait jusqu'au bout de sa mission. À Cracovie le 18 août 2002, il avait prié pour que « les forces du corps et de l'esprit » lui permettent d'« accomplir jusqu'à la fin la mission que lui a confiée le Ressuscité ». Mais ses problèmes de santé l'ont amené à laisser à son entourage le plus proche des dispositions l'autorisant à intervenir si son « empêchement » (non prévu dans le droit) se révélait nécessaire au bien de l'Église. C'est ainsi la question de la succession qui est posée en filigrane derrière les nominations des cardinaux, qui revêtent donc un sens éminemment « politique », même si les observateurs du Vatican peinent à en décrypter la logique.

La question de la succession

Sans vouloir pénétrer les arcanes de la politique vaticane, il apparaît qu'avec 66 barrettes pourpres de moins de quatre-vingts ans (limite d'âge des cardinaux électeurs), les Européens représentent presque la moitié du collège électeur. Les Latino-Américains viennent ensuite, avec 24 cardinaux, soit 18 % du collège électeur, suivis par les 14 cardinaux d'Amérique du Nord, l'Asie et l'Afrique comptant chacune 13 membres, loin devant l'Océanie, qui n'a que 4 cardinaux électeurs. Les Italiens viennent en tête du classement par nations avec 23 électeurs, suivis des États-Unis (11), des Espagnols (8), des Allemands (6), à égalité avec les Brésiliens, et des Français (5), à égalité avec les Polonais. Dans la nouvelle promotion, dont la moyenne d'âge est de soixante-cinq ans, 7 prélats sont actuellement en poste à la Curie romaine, 19 autres représentant des églises locales.