Journal de l'année Édition 2001 2001Éd. 2001

Proche-Orient : une nouvelle intifada

Après un semestre de négociations stériles sanctionné en juillet par l'échec du sommet de Camp David, on ne donnait déjà plus cher du processus de paix entre Israël et l'Autorité palestinienne. Mais celui-ci a encore été mis à mal par les émeutes dans les territoires qui ont éclaté fin septembre, et qui se sont conclues par des bombardements de Tsahal sur Gaza.

Depuis septembre 1999, date du sommet israélo-palestinien de Charm el-Cheikh, on pensait que le processus de paix issu des accords d'Oslo (1993) était à nouveau en bonne voie au Proche-Orient. Les accords qu'y avaient signés le premier ministre israélien Ehoud Barak (travailliste), jugé plus conciliant que son prédécesseur Benyamin Netanyahou (Likoud), et le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat prévoyaient un nouveau transfert de souveraineté territoriale d'Israël vers l'Autorité palestinienne en Cisjordanie. Appliqués dans leurs grandes lignes dès janvier 2000, ils devaient aboutir, neuf mois plus tard, à la signature d'un traité de paix définitif.

Des positions inconciliables

L'année 2000 s'est écoulée en négociations pour tenter d'arracher cet accord de paix. Dans un contexte tendu. Côté israélien, chaque concession de Barak se solde par l'affaiblissement de sa coalition parlementaire et gouvernementale avec la défection, durant l'été, des dix-sept députés du parti religieux Shas et des deux députés du parti Gesher, dont le ministre des Affaires étrangères David Lévy.

Côté palestinien, la colère de la rue, jusqu'alors contenue, commence à gronder : entorses israéliennes répétées à l'application des accords intérimaires, poursuite de la colonisation (2 600 nouveaux logements autorisés en Cisjordanie durant les trois premiers mois de la mandature Barak), bouclages répétés rendant la circulation et la vie quotidienne impossibles dans les territoires autonomes, enfin appauvrissement généralisé – baisse de 14 % du PNB palestinien par habitant entre 1992 et 1999, quasi-doublement du taux de chômage entre les même dates pour atteindre notamment 27,3 % à Gaza.

Le point d'orgue des négociations a lieu à Camp David (États-Unis), entre le 11 et le 24 juillet. Pendant deux semaines, le président américain Bill Clinton intercède auprès d'Arafat et Barak afin d'obtenir un consensus sur les cinq pommes de discorde recensées à Oslo : les réfugiés, Jérusalem, les frontières, les colonies dans les territoires occupés, et la sécurité. Malgré la publication finale d'une « déclaration tripartite » soulignant le caractère « sans précédent » des discussions, les positions se révèlent inconciliables. Israël propose le retour progressif d'environ 10 000 réfugiés palestiniens expulsés en 1948 (ils sont aujourd'hui plus de 2 millions), une souveraineté palestinienne sur quelques quartiers excentrés du grand Jérusalem et la restitution de 87 % de la Cisjordanie, le reste – comprenant l'essentiel des colonies – étant annexé. De son côté, l'Autorité palestinienne accepte le principe d'une souveraineté israélienne sur le quartier juif de la vieille ville de Jérusalem. Mais elle continue d'exiger, sur la base des résolutions 194 et 242 du Conseil de sécurité de l'ONU, le retour ou l'indemnisation de tous les réfugiés de 1948, ainsi que la souveraineté nationale à l'intérieur des frontières définies par la ligne d'armistice de 1967, représentant 22 % de la Palestine historique et comprenant l'essentiel de la vieille ville de Jérusalem. Au total, deux semaines de négociations plus dures que les deux mois de siège israélien à Beyrouth en 1982, selon Yasser Arafat.

Une visite explosive

C'est dans ce contexte de divorce à peu près total qu'intervient, le 28 septembre, la visite d'Ariel Sharon sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem. Alors leader de l'opposition de droite (Likoud), Sharon est bien connu des Palestiniens. Ministre des Affaires étrangères sous Netanyahou, il s'était tristement illustré en tant que ministre de la Défense, lorsqu'il avait laissé les phalanges libanaises massacrer plusieurs centaines de Palestiniens laissés sans défense dans les camps de Sabra et Chatila (banlieue de Beyrouth) en 1982. Étincelle réelle ou illusoire, sa sortie met le feu aux poudres. Aux premières manifestations de mécontentement succèdent d'autres, plus violentes.