Journal de l'année Édition 1997 1997Éd. 1997

Banques : il reste beaucoup à faire

Les grands réseaux et les banques d'affaires ont été les seuls à véritablement profiter de cette année. Ces dernières ont eu beaucoup de travail avec les privatisations et les restructurations de toutes sortes. C'est ainsi, par exemple, que les spécialistes en ingénierie financière ont eu fort à faire avec la privatisation de la CGM (Compagnie générale maritime) ou la cession de Thomson à Matra et à Daewoo. Sans oublier qu'à chaque fois que le CDR (consortium de réalisation) du Crédit Lyonnais envisage de céder l'un des innombrables actifs de celui-ci, les banques d'affaires ont à intervenir.

Les heureux et les autres

Autres privilégiés, les établissements de crédit aux fins d'immobilier et de consommation. Ils ont profité de la détente générale des taux d'intérêt et, par contrecoup, du différentiel entre les crédits accordés à un taux avoisinant 10 à 12 % et le taux auquel ils se refinancent sur le marché, 4 % environ. De ce fait, les marges sont redevenues importantes, et presque tous les grands réseaux bancaires, au premier rang desquels la Société générale, le CIC et le groupe de la Compagnie bancaire, ont enregistré de très bons résultats. Les bénéfices ont été encore plus grands pour les établissements spécialisés dans les crédits, comme Sovac et Cétélem.

Par là même, les grandes banques ont enfin commencé à se refaire une santé après les terribles années précédentes, dues à la déconfiture du marché immobilier et à des investissements risqués, voire hasardeux.

Pour les établissements de moindre importance, l'année fut moins faste. Étant moins en mesure d'offrir des taux de crédit aussi intéressants que les groupes bancaires, plus sensibles à la concurrence et encore vulnérables du fait de la crise immobilière, plusieurs d'entre eux ont été mis en vente. Ainsi en est-il de la banque Phénix, jusque-là filiale des AGF ; de Laydernier, du groupe Crédit Lyonnais ; et du Crédit du Nord, appartenant à Paribas. Le CIC était également à céder dans le cadre des privatisations jusqu'à ce que le gouvernement décide de reporter l'opération. La banque Vernes serait à vendre après le décès de Jean-Marc Vernes.

Compte tenu du mouvement de concentration auquel pousse une concurrence de plus en plus vive, ces banques doivent trouver des alliances. D'autres, qui n'ont pas non plus les reins assez solides, préfèrent réorienter leurs activités. C'est ainsi, à titre d'exemple, que la banque Edmond de Rothschild s'est recentrée sur la gestion d'actifs et le conseil financier.

Au demeurant, le marché bancaire français est encore loin d'être suffisamment restructuré pour affronter la concurrence. Il en est pour preuve le fait que les banques étrangères ne s'intéressent pas à la place française. Ainsi, pour la vente du CIC, aucune offre étrangère n'a été formulée.

Ce mouvement de restructuration est donc loin d'être achevé, mais il a fait, en 1996, une victime de poids : le Crédit foncier de France. Cette institution plus que centenaire spécialisée dans le financement de l'immobilier va disparaître dans les années à venir. Joyau de l'économie mixte – le capital en est privé mais les dirigeants sont nommés par le gouvernement –, l'établissement est le premier émetteur privé d'obligations (270 milliards de francs). Avec 11 milliards de francs de pertes en 1995, le CCF fait les frais de la crise immobilière, mais également et surtout de l'impéritie de ses dirigeants. Les manquements des inspecteurs des finances parachutés à la tête de l'entreprise ont été d'autant plus graves de conséquences que, une fois de plus, les organes de contrôle (Commission bancaire) et de tutelle (Trésor) sont restés aveugles. Scandalisés, 86 députés avaient demandé l'ouverture d'une enquête parlementaire.

Concrètement, l'État va racheter le Crédit foncier par le biais de la Caisse des dépôts et consignations puis d'un établissement public spécialement créé. Il doit en coûter environ 2,6 milliards de francs. « La sécurité de la dette obligataire » sera ainsi assurée. Une partie des activités commerciales et le réseau d'agences du Foncier devraient être repris par le Crédit immobilier de France (le CIF étant spécialisé dans les prêts au logement pour les ménages modestes) pour ne pas dégrader les aides de l'État au logement social. Reste l'inquiétude des personnels (environ 2 000 personnes) qui ne seraient pas repris par le Crédit immobilier.