Au-dessus de la mêlée, la nomination au début de l'année d'Hervé Bourges à la tête du Conseil supérieur de l'audiovisuel a fait naître l'espoir de voir cette instance passer à l'âge adulte, en remisant sa tenue de gendarme pour de nouvelles missions. Des dizaines de chaînes, des satellites, des images transitant par des ordinateurs vont bientôt déferler sur les écrans, et le CSA se devrait d'être le précurseur et le pédagogue de cet univers multimédia.

La Cinquième creuse son sillon et a acquis une forte identité. Près de 15 % des Français la regarderaient, régulièrement, au moins une fois par semaine, surtout les 15-20 ans.

Le CSA a autorisé Canal + à émettre jusqu'à l'an 2000, mais la chaîne devra participer davantage au financement de la production audiovisuelle indépendante. Toutefois, le bénéfice net de la chaîne a baissé de 47,9 % en 1994, en raison d'investissements importants, surtout dans les nouveaux décodeurs. La chaîne, qui a franchi le cap des 4 millions d'abonnés, prévoit pour l'an prochain un retour à des bénéfices importants.

Au plan européen

Au plan européen, par exemple, la Commission de Bruxelles est parvenue à un compromis sur la directive Télévision sans frontières. Certes, les tenants de la défense irréductible de l'audiovisuel européen, Français en tête, ont obtenu en particulier le maintien des quotas de diffusion d'œuvres européennes pour les chaînes généralistes, à hauteur de 50 % des programmes ; mais ils ont dû concéder au camp opposé des libéraux, emmenés par sir Leon Brittan, la limitation de cette disposition à dix ans après l'entrée en vigueur de la directive. Les dix prochaines années seront donc décisives pour l'industrie européenne des programmes. Soit celle-ci devient compétitive, soit elle est reléguée à un rôle de second plan.

Turbulences sur les ondes

Le panorama radiophonique a été le théâtre de surprenants bouleversements avec, derrière RTL, toujours en tête des sondages, une vraie percée du service public et des radios thématiques. Le premier trimestre a été marqué par l'arrivée de NRJ dans le peloton de tête des trois stations les plus écoutées. En milieu d'année, France Info est venue talonner NRJ avec une audience cumulée de 9,9 %, contre 10,4 %. RTL demeure en tête avec 17,5 %, devant France Inter, 11,9 %, qui gagne un point. Ces résultats induisent la véritable surprise des sondages, avec la chute d'Europe 1, qui se retrouve à la cinquième place (9,6 %), perdant plus de un point en un an. En dépit de la baisse globale des stations généralistes (sauf France Inter), la situation préoccupante de la station de la rue François-Ier a conduit la direction à modifier son organigramme et sa grille. Denis Jeambar, venu du Point, et Gilles Schneider ont été nommés afin de redresser la situation. Redonner à Europe 1 une forte identité et ne plus banaliser l'information sont les objectifs prioritaires. La station semble donc renoncer à sa politique de stars, menée depuis des années (Michel Drucker, Franz-Olivier Giesbert), pour retrouver un ton plus personnel et moins orienté vers les élites. La politique commerciale de la station pourrait également être revue à la baisse, le déferlement des publicités automobiles faisant écho à la prime Balladur ayant fait fuir un certain nombre d'auditeurs. Derrière Europe 1, Fun Radio, avec 8 % d'audience, perd du terrain alors qu'Europe 2 (5,2 %), Nostalgie (5,1 %) Chérie FM (3,8 %) progressent. RMC ne décollant toujours pas (3,7 %), la privatisation du groupe monégasque a été jugée prioritaire dans l'entourage du Premier ministre. Quels candidats à la reprise des 83 % de parts détenues par l'État ? Havas a toujours dit ne pas être intéressé, et Europe 1 doit penser à sa propre situation. Reste NRJ...

Dérapage sur la FM

Un animateur de Fun Radio a été licencié pour « propos insultants » sur Auschwitz et un autre animateur de Skyrock, qui s'était réjoui de la mort d'un policier, a été condamné par la 17e chambre du tribunal de Paris. Skyrock a également été suspendue pendant vingt-quatre heures par le CSA.

Nominations

En novembre, Michel Boyon est élu par le CSA P-DG de Radio-France, en remplacement de Jean Maheu. Ancien élève de l'ENA, directeur de cabinet de François Léotard de 1986 à 1988, il a été préféré à plusieurs « professionnels » des médias, parmi lesquels figuraient Patrice Duhamel et Dominique Alduy. Le même mois, Jean-Paul Cluzel est nommé à la présidence de RFI (Radio France International). Ancien élève de l'ENA, M. Cluzel a été aux cabinets des ministres François-Poncet et Bosson avant d'être directeur général de l'Opéra de Paris à titre provisoire.

Presse écrite : entre déclin et reprise

Selon les chiffres publiés en juin par la Fédération internationale des journaux, la presse quotidienne accuse depuis dix ans un recul constant de sa diffusion dans le monde. En Europe, celle-ci va de − 18 % en Autriche à − 1,5 % en France, alors que dans les pays asiatiques, elle progresse. La palme des variations revenant au Pérou (+ 89 %) et à la Russie (− 91 %). Toutefois, selon une autre enquête, l'année 94 a été marquée en France par une embellie, le chiffre d'affaires ayant progressé de 2 %, avec une hausse de 2,7 % des revenus publicitaires. La presse locale (+ 2,9 % de chiffre d'affaires) tire mieux son épingle du jeu, alors que les quotidiens parisiens perdent 0,7 %. Seule l'Équipe connaît une progression significative de ses ventes (+ 14 %).