Journal de l'année Édition 1993 1993Éd. 1993

Bande dessinée

Cette année bédéphile se révèle fertile en événements médiatiques, économiques et artistiques. Alors que les artistes sortent de belles réalisations, les éditeurs ne restent pas inactifs et organisent, qui une « OPA », qui le lancement spectaculaire d'une série. Avec près de 750 albums publiés en 1992 (dont plus de 70 % de nouveautés), avec de nouvelles revues, des dizaines de produits « dérivés » ou la diffusion sur le petit écran d'une adaptation animée de Tintin, le neuvième art affirme haut et fort sa vitalité.

Sur le plan éditorial, de nouvelles maisons se lancent dans l'aventure, tant en France qu'en Belgique. Notons ainsi l'apparition de Cizia Zykë, Palombia, Méphistopoulos, Comset et Pressibus, ou bien encore l'Association, formée de jeunes illustrateurs (Menu, Trondheim, etc.). Plusieurs faits marquants font également la une de la presse spécialisée : Magic-Strip ferme ses bureaux parisiens et recentre ses activités sur Anvers, siège social du groupe ; Zenda est intégrée par Glénat ; les éditions Blake et Mortimer, qui rééditaient les albums de Jacobs sont rachetées, à 96 %, par les éditions Dargaud ; Cartoon Création cesse de publier l'œuvre de Peyo, au profit de Lombard : Franquin cède les droits de Gaston à Marsu-Productions – cet éditeur annonce un nouvel album du gaffeur sympathique, à paraître en octobre 1993.

Presse

En 1991, de mauvais augures avaient prédit la disparition de la presse bande dessinée. Force est de constater qu'il faut, un an plus tard, nuancer cette assertion. L'hebdomadaire Pif connaît bien des déboires et est repris par Scanéditions ; Arédit, spécialisé dans les traductions de bandes dessinées américaines, solde la majeure partie de ses stocks. À l'inverse, de nouveaux titres apparaissent dans les kiosques et les librairies : la Lettre de Dargaud, un bulletin mensuel d'actualités bédéphiles : Tarzan et Hulk, deux « comics », chez Semic : Racaille, un support à l'humour ravageur, publié par Rackham ; sans oublier la renaissance de Charlie-Hebdo, dirigé par l'ineffable Gébé. Aux États-Unis, la sortie du numéro 75 des quatre Superman Comics, fait grand bruit : on y annonce l'assassinat du célèbre justicier.

Concepts

Plusieurs concepts d'édition et de nouvelles collections voient également le jour : « Génération Dargaud », un label regroupant de jeunes dessinateurs (Michaud, Bellamy, Meynet, Bravo, etc.) ; « les Chefs-d'œuvre de la BD populaire », chez Vents d'Ouest (Bibi Fricotin, Kriminal) ; « Hors-Collection », aux Presses de la Cité (Calvin et Hobbes) ; « Vivre avec... », chez Armand Colin (Terpant).

Après le « roman graphique », apparu il y a quelques années (Autrement, Futuropolis), voici les « romans BD », qui, s'ils ont l'apparence de « vrais » livres, se présentent malgré tout comme d'authentiques bandes dessinées (le Filet de saint Pierre, écrit et dessiné par Jean-Pierre Autheman, éd. Glénat ; l'Homme à la fenêtre, scénarisé par Ambrosi et illustré par Mattotti, éd. Albin Michel).

Séries

1992 marque le retour de séries importantes : « Tranches de vie », de l'incisif Lauzier, qui s'attaque cette fois aux institutions subventionnées (éd. Dargaud) ; « Nikopol ». du baroque Bilal, qui, avec l'album Froid-Equateur, conclut le cycle entamé naguère avec la Foire aux immortels et autre Femme-piège (éd. Humanoïdes Associés) ; le torturé Art Spiegelman sort, quant à lui, la suite de Maus, continuant ainsi son errance hallucinée à travers l'indicible, sur les traces de ses parents ayant survécu à la Shoah (éd. Flammarion) ; la plus connue des Bretonnes est également à l'honneur, avec Bécassine au studio, une histoire inédite en album, publiée en 1950, dans la Semaine de Suzette (éd. Gautier-Languereau), etc.

BDM Trésors de la bande dessinée, édition 1992-1993, Éditions de l'Amateur.

Patrick Gaumer