Michel Louis Lévy

Religions

Église catholique

Au cours de L'année, le pape rend publiques deux encycliques. Avec Redemptoris missio (22 janvier), Jean-Paul II attire l'attention des catholiques sur « la valeur permanente du précepte missionnaire » dans l'Église, celle-ci étant non seulement le « sacrement de salut pour toute l'humanité », mais l'institution chargée, en priorité, de lutter contre « la tentation de réduire le christianisme à une sagesse purement humaine, en quelque sorte une science pour bien vivre ».

L'encyclique Centesimus annus (15 mai) est publiée cent ans, jour pour jour, après Rerum novarum de Léon XIII sur la condition des ouvriers. Dépassant cette question, Jean-Paul II se livre à une synthèse du problème social tel qu'il se pose aujourd'hui, dans sa diversité complexe et sa dimension internationale. Tout en se félicitant de l'échec du « socialisme réel » (le marxisme-léninisme), notamment en Europe orientale et centrale, le pape désigne les tares du capitalisme libéral, qui a constamment tendance à déraper aux dépens des principes éthiques qui sauvegardent la vocation transcendante de l'homme. Quant à l'Église, elle n'a pas de modèle à proposer à la société bouleversée de la fin du xxe siècle, mais une orientation intellectuelle indispensable qui permette aux hommes responsables de construire des systèmes efficaces adaptés aux situations géographiques et historiques.

Cet enseignement, Jean-Paul II le dispense au cours de quatre nouveaux voyages. Le 10 mai, il entame à Lisbonne sa seconde visite au Portugal. La principale étape de ce périple – qui le conduit aux Açores et à Madère – est Fatima, centre de pèlerinage marial de rayonnement international où, en mai 1917, trois enfants reçurent de la Vierge, qui leur apparut, trois secrets relatifs au sort du monde contemporain.

Du 1er au 9 juin, Jean-Paul II rencontre chez eux, pour la quatrième fois, ses compatriotes polonais. C'est la Pologne de Lech Walesa, du postcommunisme, en proie aux difficultés nouvelles d'une formidable mutation politique, économique, sociale et culturelle. Dans ses interventions publiques, le pape met l'accent sur la nécessité d'une régénération morale non seulement de la Pologne, mais de toute l'Europe, menacée par les effets pervers du libéralisme et de l'hédonisme.

Cet appel général à la reconstruction d'une Europe chrétienne – en fait catholique –, le souverain pontife le lance le 15 août d'une manière plus solennelle et plus médiatique à un million déjeunes venus de partout – y compris d'URSS – rassemblés à Czestochova, haut lieu du culte marial et du catholicisme polonais. De là, le pape gagne la Hongrie où, du 16 au 20 août, il parcourt un pays désorienté par quarante ans de communisme. Tout en se portant garant de la liberté, le pape demande aux Hongrois de considérer l'Église comme un centre non de pouvoir, mais de service. Dans le même temps, il appelle les hommes au respect des minorités, et plaide pour l'indépendance de la Croatie.

Lorsque, le 14 octobre, Jean-Paul II amorce un nouveau séjour au Brésil – il durera dix jours –, il sait qu'il va trouver une Église déchirée entre les éléments conservateurs et un clergé engagé aux côtés d'une population sur qui pèsent toujours aussi lourdement la pauvreté et le joug des oligarchies.

Après le décès, le 25 mars, à Martigny, près d'Écône (Suisse), de Mgr Marcel Lefebvre, principale personnalité du plus fort courant traditionaliste – dit « intégriste » –, qui ne s'était pas réconcilié avec Rome, la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, qu'il a fondée, et qui a pour supérieur général l'abbé Franz Schmidberger, revendique 4 (puis 5) évêques, 239 prêtres et 230 séminaristes.

Œcuménisme

Depuis l'effondrement du communisme en URSS et le vote, dans ce pays, de la loi sur la liberté religieuse, le dialogue entre catholiques et orthodoxes est paralysé par la résurgence de la question des uniates, intégrés malgré eux à l'orthodoxie, et par le réveil de la très ancienne crainte d'une reconquête, par l'Église catholique, des territoires chrétiens qui, au cours de l'histoire, ont échappé à l'autorité de Rome.