Aussi préoccupante soit-elle, cette évolution future du climat ne représente que l'un des problèmes liés à l'environnement qui vont se poser avec davantage d'acuité dans les prochaines décennies. Il convient d'y ajouter, par exemple, le problème de l'accumulation des déchets et celui de la gestion des réserves en eau de la planète.

L'homme, aujourd'hui, prend conscience du devoir qu'il a de ne pas saccager la Terre, la seule planète parmi celles actuellement connues où se soit développée une activité biologique importante. Est-ce un hasard si cette prise de conscience intervient à une époque où les recherches biologiques connaissent un fulgurant essor ?

Le génome humain

La totalité de l'information nécessaire pour le développement et la vie d'un être humain est contenue dans 46 chromosomes (molécules d'ADN) concentrés dans un volume qui ne dépasse pas quelques millièmes de millimètres cubes. Cette information se trouve sous la forme d'une double hélice d'ADN composée de l'enchaînement de quatre parties élémentaires (bases). Les progrès récents de la biologie moléculaire offrent la possibilité de lire cette information et donc d'accéder à la description exhaustive de l'ensemble des « plans » de la machine humaine. Cette ambition est à la base du programme de recherches sur le génome humain, l'une des plus grandes aventures scientifiques de cette fin du xxe siècle. On ne connaît encore aujourd'hui qu'environ 2 000 gènes sur les quelque 50 000 présents dans le noyau de chacune des cellules du corps humain.

L'objectif du programme « génome humain » comprend non seulement l'identification de tous les gènes humains, mais aussi leur positionnement précis le long du génome. Les enjeux sont considérables : en particulier, le clonage puis le séquençage des gènes responsables des quelque 3 000 maladies génétiques incurables aujourd'hui recensées ouvriront des voies nouvelles pour le diagnostic et la thérapeutique de ces maladies. De plus, l'identification de gènes et de modes de régulation inconnus permettra d'aborder sous un jour nouveau le fonctionnement des cellules vivantes dans leur ensemble, leur relation avec leur environnement, ainsi que le problème de l'évolution. Tandis que les Américains ont choisi de séquencer systématiquement tout le génome (une entreprise à laquelle ils ont prévu de consacrer 3 milliards de dollars sur quinze ans), les Français, dans le cadre du programme national dont le lancement a été annoncé en 1990, se limiteront à séquencer les parties codant la formation des protéines, soit environ 5 % du génome. Cette stratégie est non seulement moins coûteuse, mais doit permettre de concentrer les recherches sur les gènes impliqués dans les 100 ou 200 maladies génétiques les plus fréquentes.

La localisation et l'étude des gènes responsables des maladies héréditaires sont devenues un thème privilégié de la recherche biomédicale. L'année a été marquée par plusieurs succès en ce domaine : on est parvenu, notamment, à isoler le gène de la choroïdérémie, une affection liée à une dégénérescence progressive de la rétine, qui entraîne la cécité.

Outre la compréhension des mécanismes responsables des maladies héréditaires, une meilleure connaissance de nos chromosomes permet d'envisager de nouvelles thérapeutiques, avec la greffe d'un gène correcteur approprié sur le patrimoine héréditaire de certaines cellules. Autorisée aux États-Unis en septembre par la Food and Drug Administration (FDA), la première thérapie génique a été appliquée aussitôt, sur une fillette de quatre ans, au traitement d'une maladie grave très rare, le déficit en adénosine déaminase (une enzyme indispensable au fonctionnement du système immunitaire de l'organisme). La deuxième, pour laquelle l'Administration américaine a donné son accord en novembre, sera appliquée à des malades atteints d'une forme grave de cancer de la peau. En France, le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé a émis à son tour, le 13 décembre, un avis favorable concernant l'utilisation sur l'homme des thérapies géniques.

Fille ou garçon ?

Autre témoignage des progrès récents de la génétique : la découverte de la clef de la différenciation sexuelle. Parmi nos 46 chromosomes, 2 sont des chromosomes sexuels : les femmes ont deux chromosomes X et les hommes un chromosome X et un chromosome Y. Naître garçon ou fille dépend donc de la présence ou de l'absence, chez l'embryon humain, du chromosome Y. Les chromosomes étant constitués de gènes, qui sont porteurs de l'information héréditaire, on a soupçonné, il y a une trentaine d'années, qu'il existe un ou plusieurs gènes responsables de la différenciation sexuelle. Depuis lors, une course entre diverses équipes s'est engagée dans le monde pour trouver ce (ou ces) gène(s) situé(s) sur le chromosome Y et dont la présence ou l'absence chez l'embryon humain induit le développement des testicules ou des ovaires. Un jeune chercheur français du Centre de recherche de biochimie macromoléculaire CNRS/INSERM de Montpellier, Philippe Berta, a obtenu la première preuve formelle de l'identité de ce gène essentiel.

À l'instar des autres avancées majeures de la génétique, cette découverte fondamentale ne peut manquer de susciter des craintes d'ordre éthique en raison des nouvelles perspectives de manipulation des embryons qu'elle ouvre. D'année en année, l'homme acquiert, grâce aux progrès de la science, de nouveaux pouvoirs. À lui de faire preuve de discernement pour les utiliser à bon escient et ne pas jouer les apprentis sorciers.

Philippe de la Cotardière