Patrick Roegiers

Archéologie

En 1989, l'activité de l'archéologie a été intense dans de nombreux pays. En dépit de tous les chefs-d'œuvre qui ont été exhumés au cours des deux derniers siècles, il en est résulté tantôt de vraies surprises, tantôt de simples confirmations de notre savoir.

Les surprises. En France, grâce à une forte sécheresse, l'été 1989 fut providentiel pour la prospection aérienne, qui permit de découvrir les ombres subtiles encore jamais aperçues des murs arasés de villas romaines. Des traces de villages gaulois ont été également détectées.

L'étonnant. La Chine nous déconcerte toujours. Elle vient d'extraire du lit du fleuve Jaune les statues colossales, de 9 tonnes chacune, de quatre bœufs en fer avec leurs bouviers, fort peu rouilles, bien que datant du viiie siècle après J.-C.

L'étrange. Dans les grottes préhistoriques de l'Ariège, des chercheurs ont découvert que les hommes du paléolithique utilisaient les échos musicaux des multiples cavités en marquant d'une touche de peinture, voire d'un dessin les endroits qui engendraient les bonnes résonances.

Le trésor. À Nimroud, près de Mossoul, les archéologues irakiens ont fait une rare trouvaille. Une douzaine de bijoux d'or, pesant plus d'une douzaine de kilos, étaient cachés sous le sol d'un palais près des tombes de deux princesses assyriennes du viiie siècle avant J.-C.

À elle seule, l'Égypte fournit un fort contingent de richesses. On décernerait volontiers la palme à la couronne d'or ornée d'une statuette du dieu Sérapis exposée à l'Institut du monde arabe. Elle provient de l'oasis de Douch, à la latitude d'Assouan, où une vaste nécropole d'époque romaine a livré des momies, des tissus brodés et des bijoux. Dans le temple de Louqsor, sous une cour, une découverte majeure a été faite. On a déterré une vingtaine de statues, souvent de grande taille, qui dataient de la XVIIIe dynastie.

Ailleurs, au bubasteion de Saqqarah, c'est la tombe du vizir de ce pharaon, Aper-El, cachée au tréfonds d'un hypogée, qui a livré un mobilier remarquable ainsi que de nombreux renseignements sur le personnage. À Tanis, vieille capitale du delta du Nil, les fouilles françaises en cours ont déjà entrepris le déblaiement de vastes temples, avec obélisques, colonnes monolithes, statues et rempart colossal. Le site est vaste et prometteur.

En France, les préhistoriens déstabilisent leurs chronologies. Les premiers hommes y seraient venus un bon million d'années avant notre temps, soit quelques centaines de milliers d'années plus tôt qu'on ne le croyait jusqu'à présent. Au Louvre, les fouilles se sont déplacées vers l'ouest, autour de l'arc du Carrousel. Au menu, des traces de champs et de prés gaulois, un volumineux talus de terre avec fossé, qui faisait partie de l'enceinte de Charles V, et un lotissement du xvie siècle.

Les épaves. Près de l'île d'Elbe, un navire romain recelait un riche butin de pirates. Autrement fabuleuse est l'épave du siècle, le SS Central America, naufragé en 1857 au large de la Caroline du Sud : les lingots d'or qu'on en a extraits représenteraient un milliard de dollars. Le cuirassé allemand Bismarck, coulé en Atlantique en 1941 par la marine britannique, a été repéré par 4 600 m de fond en relativement bon état, d'après les vues prises par des robots.

Le ministre Jack Lang a proclamé une année de l'archéologie entre septembre 1989 et septembre 1990. Elle doit permettre de réfléchir sur la science archéologique, sur les archéologues professionnels aujourd'hui nombreux et préoccupés de leur statut, et sur les innombrables bénévoles qui manquent souvent de formation. L'action officielle est axée sur la protection des sites et l'archéologie de sauvetage. Des textes officiels limitent maintenant l'utilisation des détecteurs de métaux et protègent les biens culturels maritimes (ce qui dépasse le domaine des seules épaves).

René Harot

Histoire

La France n'a pas commémoré en 1989 que le seul Bicentenaire de « sa » Révolution. En tenant le 9 septembre une séance au château de Villers-Cotterêts, l'Académie française a célébré le 450e anniversaire de l'ordonnance qui imposa le « français » comme langue de l'État.