C'est donc une nouvelle vie musicale que la France a connue, plus décentralisée. La suppression du Festival Berlioz à Lyon en est d'autant moins admissible que R. Strauss et G. Mahler sont devenus les favoris des grandes formations symphoniques.

L'actualité donna des allures de prémonition à l'initiative de M. Rostropovitch gui, lors des Semaines musicales d'Évian, présenta la cantate Rayok de D. Chostakovitch, critique du discours sur la musique formaliste de 1948. Dans cette optique sont également intervenus la décision de Radio France et des éditions le Chant du monde d'être les artisans de la révision du procès dont ce compositeur a été la victime, et le fait que les lustres du Palais Garnier se soient éteints sur une œuvre dénonçant les absurdités et les cruautés commises dans les années 30 par le régime communiste soviétique (le Maître et Marguerite de York Höller).

Catherine Michaud-Pradeilles

Danse

Des danseurs manifestant contre un projet de loi, une étoile (Sylvie Guillem) aux prises avec son directeur de ballet, ce même directeur en conflit avec l'administration et sa troupe..., 1989 a été une année conflictuelle, peut-être mal venue au moment où le gouvernement voue le Palais Garnier à l'art chorégraphique.

Mais les querelles n'ont pas empêché les triomphes. Celui de Rudolf Noureïev, notamment, chorégraphe de Don Quichotte et du Lac des cygnes dans le cadre de l'opération « Danse en révolution ». Cette manifestation a réuni productions anciennes et créations – dont le plaidoyer discret de Béjart (1789... et nous) – en donnant également l'occasion à la France de renouer avec l'URSS, grâce à la présence de l'Academia Vaganova (école du Kirov) et des ballets Moïsseiev. Par ailleurs, un festival d'art soviétique a renforcé la reprise d'une collaboration entre les compagnies soviétiques et françaises en accueillant le Bolchoï, le ballet du Kirov et celui de Leningrad (compagnie Boris Eifman). De son côté, Rudolf Noureïev a invité le danseur étoile moscovite Irek Moukhamedov.

L'URSS était décidément très présente en Europe occidentale, mais la Russie l'a également été avec le centenaire Nijinski. L'Espagne a présenté la reconstitution américaine de la version d'origine du Sacre du printemps, tandis que la France rendait hommage au premier chorégraphe moderne par l'intermédiaire de la danse contemporaine.

Le cru 1989, d'inspiration très éclectique, trouva son souffle grâce au sport (R. Chopinot), au théâtre (M. Monnier) et à la musique vivante (A. Preljocaj, A.T. de Keersmaeker), mais il prouva surtout que les jeunes chorégraphes européens n'ont plus rien à redouter des « géants » américains ayant leurs habitudes en France. Les festivals ont également rappelé que la danse contemporaine de l'Hexagone pouvait s'imposer.

Catherine Michaud-Pradeilles

Variétés

Cette année, les Français ont pris leur revanche. En effet, la vente des disques a attesté que la production française l'emportait maintenant sur l'anglo-saxonne, ce qui nous a valu quelques albums d'or et de platine dont les lauréats figurent parmi les valeurs consacrées dans les années 60.

Ce grand retour des « anciens », au style revu et corrigé « Afro » ou « Californie » (Le Forestier, Nougaro), n'explique pas seul la percée de la musique française. Elle est due aussi à la reconnaissance, par les multinationales, du rock alternatif, ce maillon marginal de la production dont le show-business convoite le succès et auquel se rattache le son français. Cette esthétique a su mettre fin à l'hégémonie anglo-saxonne.

L'année 1989 a donc fêté les trente-cinq ans du rock sous le signe des rescapés des Sixties. La programmation du Printemps de Bourges, miroir des événements, a bien résumé la situation en affichant, entre autres, J. Higelin, C. Nougaro, M. Le Forestier, Charlélie Couture et Stevie Wonder. Éclipse volontaire ou purgatoire, le silence de certains ne leur a donné que plus de force pour revenir sur scène, parfois après avoir joué les héros des temps modernes ou les aventuriers solitaires.