Séoul 88
Jeux de la XXIVe Olympiade

La victoire de l'olympisme

Les Jeux de 1972 à Munich avaient été ensanglantés par le massacre de neuf champions israéliens tombés sous les balles de l'organisation terroriste palestinienne Septembre noir. À Montréal, la plupart des États africains s'étaient abstenus pour protester contre la décision du CIO de ne pas exclure la Nouvelle-Zélande, accusée d'entretenir des relations sportives avec l'Afrique du Sud. En 1980, à la suite de l'invasion de l'Afghanistan par les troupes soviétiques, les États-Unis, le Japon et l'Allemagne de l'Ouest, obéissant à la consigne de boycottage lancée par le président Jimmy Carter, avaient refusé de se rendre à Moscou. Quatre ans plus tard, en représailles, les pays de l'Est, à l'exception de la Roumanie, déclaraient à leur tour forfait pour Los Angeles. À Séoul, rien de tout cela. Hormis Cuba et l'Éthiopie, toute l'élite du sport mondial était présente, soit 160 délégations et plus de 9 000 concurrents dont la sécurité fut parfaitement assurée, sans débordement excessif, par un déploiement de forces de police impressionnant. Après vingt ans de discordes, de drames, de conflits politiques, l'unité olympique était enfin reconstituée, à la grande satisfaction de Juan Antonio Samaranch, qui avait œuvré dans ce sens depuis son entrée en fonction (1980) à la présidence du CIO. Cette importante victoire place désormais le mouvement olympique au-dessus de toutes les pressions, de toutes les interventions extérieures et lui donne une entière autonomie indispensable à sa survie.

Sur les 739 médailles distribuées, 132 l'ont été aux athlètes soviétiques, alors qu'au son de l'Internationale, le drapeau rouge frappé de la faucille et du marteau montait 55 fois au mât le plus haut. Certes, l'URSS n'a pas renouvelé son trust de 1980 à Moscou (79 victoires), mais elle a largement dominé la RDA (37 médailles d'or) et les États-Unis, qui sont parvenus à sauver la face grâce à la bonne santé de leur athlétisme. Scandaleusement avantagée par l'arbitrage dans les sports de combat, la Corée du Sud vient en quatrième position, juste devant la RFA, toujours aussi solide, la Hongrie en progrès et la Bulgarie, affectée par un problème de dopage démentiel qu'elle n'arrive plus à maîtriser. Enfin, avec l'apport de ses coureurs des hauts plateaux (4 titres à eux seuls), le Kenya s'est glissé dans le concert des grandes puissances, sans perdre pour autant de son authenticité, qui constitue sa force principale.

Seize médailles dont six en or, 50 finalistes, neuvième au classement des nations, le bilan de l'équipe de France a été conforme aux objectifs fixés par les responsables de la préparation olympique, même si le président du CNOSF, Nelson Paillou, espérait nettement mieux. Mais c'était sans compter sur les défaillances successives et imprévues de plusieurs de nos champions du monde (Fabien Canu, Joël Bouzou, Jeannie Longo, Patrice Mourier, etc.) dont les échecs ont été heureusement compensés par les médailles d'or obtenues en escrime, à la voile, au judo et en équitation. Quatre disciplines sportives qui ne sont pas pratiquées à l'école, preuve que tout notre système éducatif est à revoir et en particulier les rythmes scolaires. À charge maintenant pour le nouveau secrétaire d'État à la Jeunesse et aux Sports, Roger Bambuck, de régler ce délicat problème. On lui souhaite bien du courage.

Dans quatre ans, ce sera Barcelone, et, pour devenir plus compétitif, il faudra impérativement : s'engager à fond dans la voie du professionnalisme ; s'inspirer des techniques et des méthodes d'entraînement appliquées à l'étranger ; promouvoir une préparation contrôlée des athlètes en évitant de les placer dans un contexte social d'assistés dont ils seraient tentés de profiter sans contrepartie au niveau des résultats.

Athlétisme

La bombe Johnson

D'un niveau sans précédent, les compétitions d'athlétisme ont été en partie éclipsées par l'affaire Ben Johnson. Pris la main dans le sac, le Canadien a servi de bouc émissaire à toutes les bonnes consciences préoccupées par le très grave problème du dopage.