Même si nous n'avons pas obtenu Béjart, qui a abandonné Bruxelles pour Lausanne, la danse tous azimuts, c'est pour 1988.

Catherine Michaud

Musique

Que l'on soit compositeur, interprète ou ministre, mort ou vif, français ou étranger, seul ou accompagné, le one man show est de rigueur. De la simple journée à Radio-France, pour Franco Donatoni, au festival complet, les manifestations ont misé sur le thème de l'homme seul. Berlioz a gagné la partie à Lyon avec la version authentique des Troyens, tandis que l'orchestre de Paris s'en remettait à Wagner pour faire de provisoires adieux à son public. Vint plus modestement le tour de Ravel : la France a célébré le cinquantième anniversaire de sa mort, avec l'intégrale de son œuvre donnée au Châtelet. Autres anniversaires discrets : celui de Villa-Lobos (né en 1887) et celui d'Albert Roussel. Mais l'homme de l'année reste Lully, réhabilité d'abord par l'Association départementale d'information et d'action musicale des Yvelines, organisatrice des manifestations versaillaises (exposition, colloque, concerts) puis par l'Opéra de Paris (salle Favart) qui donna Atys, l'œuvre préférée de Louis XIV. Le dixième anniversaire de la mort de Maria Callas a été aussi commémoré avec faste. Face au passé, le présent fêtait les dix ans de l'IRCAM, les vingt ans de l'Orchestre de Paris et les soixante ans de Rostropovitch. Célébrations moins prenantes toutefois que les évocations, ou les hommages rendus aux grands contemporains : Luigi Nono au Festival d'automne avec Prometeo ; Stockhausen non stop à Montpellier ; Landowski, dont on a découvert Montségur ; Olivier Messiaen, au centre Acanthes pendant le festival d'Avignon ; Ligeti, compositeur de l'été au Festival estival. Résistant à cette vague de vedettariat, quelques jeunes voix françaises se sont fait entendre. Il sera d'autant plus démodé de parler de la pénurie de chanteurs en France que force mesures ont été prises grâce à François Léotard, qui réforme l'enseignement artistique, prend en compte les malheurs du palais Garnier et poursuit les grands travaux.

Catherine Michaud

Variétés

Le retour des dinosaures

Heureusement qu'il y a eu les sixties : les idoles yéyé, les maîtres de l'amour en chansons et même les belles voix de l'avant-transistor ont fait les beaux jours de l'année. Depuis les sublimes retrouvailles avec Barbara, au Châtelet, revivant son éternelle histoire d'amour avec le public, jusqu'à l'émouvant retour d'Aznavour, miraculeusement épargné par la vague des musiques hurlées, tout a oscillé autour de la renaissance des variétés françaises. Merci à Michel Berger et à Jean-Jacques Goldmann d'avoir permis à Johnny Hallyday de rester fascinant. France Gall à son tour a bien défendu les couleurs de l'Hexagone, au Zénith, avec de nouveaux tubes, plutôt axés sur la danse. Serge Lama, au Casino de Paris, Yves Duteil, Jane Birkin, plus classiques, ont préféré se produire en des lieux plus intimes pour continuer à prôner la chanson poétique. Les albums les plus attendus de la rentrée, ceux de Gainsbourg (You're under arrest), d'Eddy Mitchell (Mitchell) et de Jacques Dutronc (CQF Dutronc) ont pris des allures de rétrospectives nostalgico-ironiques n'hésitant pas à reprendre de vieux succès. C'est une façon comme une autre d'essayer de reconquérir une part du marché intérieur, car il a bien fallu faire face à l'été des décibels dû à Michael Jackson, Prince et Madonna, accueillie en grande pompe, pour un unique concert, au Parc de Sceaux. La bande son de son dernier film Who's that Girl fut cependant devancée par le succès de l'album de Jackson, intitulé Bad, au score écrasant. Célébrations rétros, la France a reçu la fine fleur du jazz international ou plus exactement américain. Les « boss » sont revenus (Chuck Berry, Dizzy Gillespie, Sarah Vaughan, Fats Domino et même Art Blakey). Du « New Morning » au Palais des Sports, en passant par « le Petit Journal » ou « le duché d'Uzès », les temps sont si durs que, décidément, on ne s'en remet qu'aux valeurs sûres.