Le libéralisme s'étend donc, avec des effets contradictoires. Traduit-il une évolution passagère, un phénomène de mode ? Ou exprime-t-il un fait durable et irréversible ? Quelles que soient les perspectives dans ce domaine, l'année 1985 aura été une année charnière.

Dominique Colson

Consommation

La protection des consommateurs s'est accrue cette année avec la prise de plusieurs décisions émanant des pouvoirs publics, à la suite d'interventions des associations de défense.

L'interdiction des organismes de gestion des dettes, en juin, et la publication, par la direction de la Consommation et de la répression des fraudes, d'un indice de qualité pour vingt produits alimentaires choisis parmi les cinq familles réclamant le plus de soins dans les préparations font partie des mesures prises pour accroître la protection du consommateur et lui permettre d'avoir une conduite de plus en plus rationnelle.

En avril, le CNPF a édité à l'intention des chefs d'entreprise un Guide pratique sur l'art et la manière de satisfaire le consommateur. Ce guide préconise notamment la création d'un « service consommateur » rattaché à la direction générale de l'entreprise, permettant au consommateur individuel de faire connaître ses désirs ou ses griefs. Il faut noter que ce type de service est courant au Japon, où 71 % des firmes en possèdent un, alors que sur le territoire français leur nombre s'élève péniblement à cinquante.

Le comportement du consommateur français est l'objet de diverses études. Selon une enquête de l'INSEE et du CETELEM, les Français consomment moins malgré un niveau de richesse similaire à celui de l'année passée. Cependant, ils sont très attirés par toutes les nouveautés (lecteurs de disques à laser ou fours à micro-ondes). Cet attrait pose le problème du manque de compétitivité des produits français face à leurs concurrents étrangers.

Une autre étude du BIPE (Bureau d'informations et de prévisions économiques) démontre le changement d'orientation dans la demande des produits alimentaires avec un plus grand attrait vers des produits transformés, doublé d'une recherche de qualité.

Le léger gain de pouvoir d'achat devrait permettre une augmentation en volume de la consommation, ainsi qu'une modification de sa structure vers des produits de qualité supérieure.

Elisabeth Bordes

Agriculture et agroalimentaire

Pour l'agriculture du monde, 1985 a été dominée par l'aggravation de la crise laitière et surtout céréalière, due à la surproduction et à l'accumulation d'excédents.

Pour le lait, ce sont les exploitations agricoles des pays de la Communauté économique européenne qui ont été atteintes par la crise. La C.E.E. a dû se résoudre à instaurer un système de quotas de limitation de la production laitière, à l'instar d'autres pays (comme le Canada) qui avaient depuis longtemps établi un régime de contingentement et de régulation de l'offre, qui avait permis de limiter les dépenses publiques consacrées au soutien des prix. Au contraire, l'Europe des Six a longtemps retardé cette décision, car le maintien d'un rythme élevé de croissance de la production laitière a représenté pour les exploitants les plus jeunes le plus sûr moyen d'obtenir une amélioration continue des revenus.

Plus récemment, la crise céréalière s'est manifestée par une réduction des pays producteurs de l'Amérique du Nord (surtout les États-Unis) et de l'Europe occidentale (surtout la France) et, à partir de septembre 1985, par une baisse des cours internationaux. Cette baisse, déjà engagée avec la réévaluation du dollar, a entraîné aux États-Unis des difficultés pour les agriculteurs, pour l'industrie du machinisme agricole et pour les banques. Normalement, les baisses enregistrées depuis deux années devraient donner un coup d'arrêt au développement de la production pour permettre aux céréales de rester compétitives par rapport aux produits de substitution (manioc, gluten de maïs) et limiter la progression des dépenses de soutien. Cette réduction de la production devrait être durable dans la mesure où les pays importateurs comme la Chine, l'Inde (à cause du succès de la Révolution verte avec l'introduction de variétés céréalières à haut rendement) et l'U.R.S.S. ont accru leur production. La C.E.E. envisage donc de prendre des mesures tendant à la baisse des prix.